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Commande publique - Quel critère de marge retenir pour l'indemnisation d'un concurrent irrégulièrement évincé ?

Lorsqu'un candidat a été irrégulièrement évincé de l'attribution d'un marché public, ce dernier peut prétendre, sous certaines conditions, à l'indemnisation intégrale de son manque à gagner. Dans une décision du 20 octobre 2011, la cour administrative d'appel de Lyon revient sur la méthode de calcul de cette indemnisation. En l'occurrence, un pouvoir adjudicateur avait lancé un appel d'offres pour un marché de fourniture et d'installation de stérilisateurs à vapeur. Un concurrent évincé a demandé et obtenu du tribunal administratif de Lyon, l'annulation du contrat passé entre le centre hospitalier et l'attributaire du marché. La société requérante estimait notamment que son éviction du marché avait été irrégulière.

Les sous-critères et leur pondération doivent être indiqués aux candidats

Pour rappel, lorsque l'acheteur décide d'apprécier un ou plusieurs des critères d'attribution grâce à des sous-critères, il doit les mentionner ainsi que leur pondération, dans le règlement de consultation ou dans l'avis d'appel public à concurrence. Or, dans cette affaire le pouvoir adjudicateur avait fixé quatre critères de jugement des offres dont celui de l'aspect technique pondéré à 50%. L'appréciation de ce critère s'est faite au regard de trois sous-critères : la valeur technique évaluée sur la base du questionnaire technique (10 points), l'avis des utilisateurs (30 points) et la formation / appui technique (10 points). Le pouvoir adjudicateur en omettant d'indiquer aux candidats l'existence de ces sous-critères, a ainsi manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence.

Quelle indemnisation pour le concurrent irrégulièrement évincé ?

Afin de déterminer l'étendue de la réparation du préjudice du concurrent irrégulièrement évincé, le juge a procédé à plusieurs vérifications. Tout d'abord, il s'est assuré que l'entreprise requérante avait une chance de remporter ce marché. Dès lors, elle avait droit au remboursement des frais engagés pour présenter son offre. Dans l'hypothèse inverse, l'entreprise n'aurait pu prétendre à aucune indemnisation. Ensuite, le juge a vérifié que l'entreprise avait des chances sérieuses d'emporter le marché. Dans cette situation, elle avait droit à l'indemnisation intégrale de son manque à gagner, celui-ci comprenant nécessairement les frais de présentation de l'offre.
En l'occurrence, l'offre de la société requérante était classée deuxième, mais elle avait obtenu de meilleures notes que l'attributaire sur la majorité des critères. En effet, seul celui de l'aspect technique lui échappait, notamment en raison de sa notation sur le sous-critère relatif à l'avis des utilisateurs. Au regard de ces différents éléments, la société requérante avait donc une chance sérieuse d'emporter le marché.

Quels éléments prendre en compte pour l'indemnisation du manque à gagner ?

La cour administrative d'appel de Lyon rappelle que cette indemnisation doit être déterminée "non en fonction du taux de marge brut constaté dans son activité mais de la marge nette que lui aurait procuré le marché" si la société l'avait obtenu. Les magistrats soulignent également que le préjudice "ne peut être évalué par différence entre le prix de vente des biens et leur coût de revient".
Le critère de la marge nette est beaucoup plus restrictif que celui de la marge brute. En effet, une marge brute se calcule en soustrayant le coût des matières premières au chiffre d'affaires. Quant à la marge nette d'une entreprise, elle correspond à la différence entre la marge brute et l'ensemble des charges afférentes à l'activité. Notons, qu'il appartient au candidat d'apporter les justificatifs du montant du bénéfice net attendu dans le cadre du marché.

L'Apasp

Référence : cour administrative d'appel de Lyon, 20 octobre 2011, Société HSC, n° 10LY02217.