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Fonction publique - Protection sociale complémentaire : le décret est sur les rails

Le projet de décret permettant aux employeurs publics locaux d'aider financièrement leurs agents à acquérir une mutuelle arrive devant le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Attendu depuis trois ans, ce texte donne globalement satisfaction à l'instance de concertation. Prudents, certains syndicats pointent des "risques de contournement" de la réglementation par les employeurs et les assureurs.

Une formation spécialisée du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) examinera, le 14 décembre, le projet de décret relatif à la participation des collectivités territoriales au financement de la protection sociale complémentaire de leurs agents. Le texte, que Localtis s’est procuré (en téléchargement ci-contre), est à l’ordre du jour de la séance plénière du 22 décembre. Il s’agit encore d’une version provisoire, sur laquelle la Commission européenne se penchera. A l’origine, le projet de décret devait paraître après celui qui vise les agents de l’Etat, dont la publication est intervenue en septembre 2007. Mais l’attente ne devait pas durer plus d’un an. De report en report, le texte concernant les territoriaux devrait donc être signé trois ans et demi après celui des agents de l’Etat, soit début 2011.

Les grands principes préservés

Rappelons le contexte : depuis 2006, le cadre juridique permettant à une collectivité d'aider ses agents à bénéficier d'une protection complémentaire santé ou prévoyance est instable. Ce qui a des conséquences très pratiques : seulement un agent territorial sur trois dispose actuellement d'une garantie de maintien de salaire en cas d'arrêt de travail. Et un sur cinq seulement bénéficie d'une aide de son employeur pour sa complémentaire santé. Ce décret sur la protection sociale des territoriaux doit permettre aux collectivités, beaucoup plus facilement qu'auparavant, d'aider leurs agents sur ce plan.
Le projet de texte suscite des réactions globalement positives. Il faut dire que cette version de décembre 2010 n'est pas tout à fait une découverte : les grands principes restent les mêmes que dans les précédentes versions. L’aide de l’employeur est facultative et elle n’est pas plafonnée. Qu’il s’agisse des risques "santé" ou "prévoyance", la collectivité a le choix entre deux solutions : soit l’aide bénéficie à des contrats labellisés, soit elle intervient dans le cadre d’une convention de participation souscrite auprès d'un organisme retenu par appel d’offres. Les collectivités pourront moduler leur participation "dans un but d’intérêt social" en prenant en compte le revenu des agents et, "le cas échéant", leur situation familiale.

Elargissement du public pour une aide facultative

Mais des modifications substantielles ont par exemple été apportées sur le public visé : la participation des employeurs publics locaux pourra bénéficier aux agents de droit privé des collectivités – parmi lesquels figurent les contrats aidés. De plus, les retraités de l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’Etat et des collectivités locales (Ircantec) "peuvent bénéficier de ce dispositif s’ils ont été recrutés contractuellement pendant une durée minimale de six ans".
Au CSFPT, on s'estime satisfait de la dernière version du texte : "Nous soutenons depuis cinq ans qu’il ne faut pas de mise en concurrence lourde pour les collectivités locales." La procédure de labellisation nationale des contrats d’assurance, fixée par la loi du 3 août 2009 et décrite précisément par le décret, répond à cette préoccupation. Cet outil convient en particulier aux employeurs publics locaux. "Les collectivités n’ont pas le temps de passer des appels d’offres", fait remarquer Daniel Leroy, élu de Seine-et-Marne et président de la formation spécialisée qui examinera le projet de décret. De plus, les employeurs auront le choix entre la labellisation et une autre solution, la convention de participation. Dernier motif de satisfaction pour les employeurs : l’aide qu’ils apporteront à leurs agents ne sera en aucun cas obligatoire.

"Risques de contournement"

Du côté syndical, on note de nombreuses avancées par rapport à la première version du projet de décret. Mais on s’inquiète de l’absence complète d’indications concernant l’association des organisations syndicales à la définition des choix des élus locaux. Rien non plus n’est dit sur l’intervention des centres de gestion, que la loi a pourtant autorisés à passer des conventions de participation pour le compte des collectivités. Finalement, comment collectivités et assurances vont-elles concrètement mettre en oeuvre la réglementation ? A cette question simple, peu de réponse pour l'instant. Olivier Mourot, secrétaire national de l’interco CFDT pointe des "risques de contournement". Il assure que les collectivités pourront avoir des "politiques d‘affichage" vis-à-vis de leurs agents, car elles pourront très bien ne pas mettre la main au portefeuille. Quant aux assureurs, ils auront la possibilité de remettre en cause leurs engagements de départ, ce qui laisse planer une menace sur l'évolution des cotisations des agents.
La mutuelle nationale territoriale (MNT), principale mutuelle de la fonction publique territoriale, se dit "satisfaite dans les grandes lignes". La reconnaissance de la procédure de labellisation, dont elle est une fervente partisane, est son premier motif de satisfaction. Elle souligne que cette procédure sera vraiment adaptée aux collectivités. Pour ce qui est de la convention de participation, elle prévient qu’elle ne sera pas "un appel d’offres classique", mais qu’elle sera "beaucoup plus compliquée". Mais la MNT reconnaît que la convention de participation sera un outil sans doute plus approprié pour couvrir les risques en matière de prévoyance.