Protection de l’enfance : une mobilisation inédite à Paris, un appel à accueillir bénévolement des enfants en Alsace

Le système de protection de l’enfance va mal et des enfants qui devraient être mis en sécurité ne le sont pas : c’est en substance le message qui a été porté par les manifestants mobilisés par le "collectif des 400.000", le 25 septembre à Paris. Au même moment, Frédéric Bierry, président de la Collectivité européenne d'Alsace, a lancé un appel à la générosité des habitants qui souhaiteraient accueillir, bénévolement et de façon permanente, un enfant de l’aide sociale à l’enfance – "un nouveau champ de la protection de l'enfance", amené selon lui inévitablement à se développer pour faire face à la saturation du dispositif.

"Les enfants doivent être protégés." Sous la bannière du "collectif des 400.000" fédérant 70 organisations de protection de l’enfance, des professionnels – éducateurs spécialisés, chefs de service, psychologues, juges… - et des jeunes et anciens de l’aide sociale à l’enfance (ASE) – près de 3.000 personnes en tout selon la Cnape qui coordonnait la mobilisation - ont manifesté, le 25 septembre à Paris, pour "dénoncer les défaillances criantes d’un système à bout de souffle". 

Nommé ainsi en référence aux plus de 380.000 enfants concernés par une mesure de protection de l’enfance, le collectif des 400.000 porte quatre revendications : "mettre fin aux listes d’attente, réinvestir dans le soutien aux familles en difficulté, reconnaître et remédier au déclassement des travailleurs sociaux, et assurer un véritable accompagnement aux jeunes majeurs sortant de l’aide sociale à l’enfance". "Le caractère inédit de cette mobilisation réside dans l’union sans précédent des acteurs du secteur, tous engagés à dénoncer une politique qui ne remplit plus ses promesses", souligne le collectif. 

Plusieurs parlementaires se sont joints au défilé ou ont affiché leur soutien à la manifestation, à l’instar de la députée socialiste Isabelle Santiago pour qui la protection de l’enfance est "en situation d’urgence absolue". La députée a déposé, le 16 septembre 2024, une proposition de résolution visant à recréer la commission d'enquête sur les manquements des politiques publiques de protection de l'enfance, qui avait démarré en avril 2024 et dont les travaux ont été interrompus par la dissolution. 

Des tiers bénévoles administratifs pour accueillir des enfants au profil "moins complexe"

Côté départements, Frédéric Bierry, président de la Collectivité européenne d'Alsace (CEA) et vice-président de Départements de France, a organisé une conférence de presse le 24 septembre au foyer de l’enfance de Strasbourg, "en soutien à la grande marche de mobilisation nationale". L’élu a présenté un tableau détaillé du contexte national et local, mettant l’accent sur la "hausse continue du nombre d’enfants confiés" et sur la diminution des ressources humaines disponibles pour y faire face (par exemple "12 départs d’assistants familiaux pour 10 recrutements en 2023", selon une enquête réalisée en 2024 par Départements de France). 

Face à un dispositif saturé, le président de la collectivité alsacienne a annoncé vouloir davantage s’appuyer sur les possibilités ouvertes par la loi Taquet de 2022 en matière de bénévolat et a lancé un appel à la générosité des citoyens. Une campagne est donc lancée par la CEA pour recruter des "tiers bénévoles administratifs" (TBA) qui accepteraient d’accueillir chez eux un enfant de l’ASE au profil "moins complexe" que d’autres, à temps plein et de manière continue. 

L’association SOS France victimes 67 sera chargée, à compter du mois d’octobre, d’"informer, évaluer et accompagner tout adulte" désireux de s’impliquer bénévolement dans une telle mission, indique la CEA dans un prospectus destiné aux habitants. Cette association accompagnera également les tiers dignes de confiance (TDC), un autre dispositif que le département souhaite davantage mobiliser. 

"C'est un nouveau champ de la protection de l'enfance qui s'ouvre, il faut qu'on puisse le relever", a insisté Frédéric Bierry, cité par l’AFP, tout en ne manquant pas de rappeler à l’État sa responsabilité concernant la prise en charge des enfants en situation de handicap. Selon une enquête menée auprès des départements dans le cadre de la mission confiée par le chef de l’État à Stéphane Haussoulier et Lucie Carrasco, 22% des enfants confiés à l’ASE (entre 10 et 35% selon les départements) sont en situation de handicap.