Protection de l’enfance : l’accueil familial est désormais moins fréquent que le placement en établissement
Fin 2022, 41% des enfants placés étaient accueillis en établissement, contre 38% chez une assistante familiale, selon la Drees qui vient de publier une synthèse des données disponibles sur l’aide sociale à l’enfance. Ces données illustrent la hausse du nombre de mesures et des dépenses afférentes depuis 1998, mais aussi la diversité des pratiques entre les départements.
"L’accueil chez une assistante familiale n’est plus la modalité de prise en charge la plus fréquente" en protection de l’enfance, selon la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees, ministères sociaux) qui vient de publier une nouvelle étude rassemblant les données disponibles sur l’aide sociale à l’enfance (ASE).
"Fin 2022, 38% des enfants confiés à l’ASE sont accueillis chez des assistantes familiales, contre 56% à son maximum en 2006" et encore 50% en 2015, indique la Drees. Ainsi l’accueil en établissement devient, "pour la première fois, la modalité d’accueil la plus fréquente (41% fin 2022)". Les modalités d’accueil des 21% enfants restants sont variées : hébergement autonomes, placements à domicile, tiers bénévole, ou "attente de lieu d’accueil" ou d’une "future famille adoptante". La Drees précise que cette répartition varie selon l’âge des enfants accueillis, les plus jeunes (3 à 5 ans) étant accueillis aux deux tiers chez une assistante familiale, "contre seulement 19% des 16-17 ans". La part des accueils en famille est aussi très variable d’un département à l’autre, elle est notamment très importante en outre-mer.
Cette évolution est liée aux difficultés de recrutement, alors que la moitié des assistants familiaux avaient 55 ans ou plus en 2021 (voir notre article), mais aussi à l’aggravation de la situation de certains jeunes du fait notamment d’un manque de prise en charge en pédopsychiatrie. Or, l'accueil de jeunes "complexes, avec des difficultés relationnelles, d'attachement" ou des comportements violents est plus difficile en famille d’accueil, selon Baptiste Cohen, coordinateur protection enfance à la fondation Apprentis d'Auteuil, interrogé par l’AFP.
La protection de l'enfance est "obligée de placer en foyers des jeunes dont on sait qu'ils seraient mieux dans des familles d'accueil", selon Pierre-Alain Sarthou, directeur général de la Cnape. "Taux d'encadrement, sécurité affective, placement à long terme : la solution de la famille d'accueil serait parfois préférable", a-t-il expliqué à l’AFP. Fin juin 2024, les professionnels et élus réunis aux Assises de la protection de l’enfance ont insisté sur ces enjeux (voir notre article). Autre intérêt de l’accueil familial : son coût "sensiblement moins [élevé]" que les autres modes d’accueil, de l’ordre de 31.600 euros par an en 2022 contre 41.900 euros, selon la Drees.
22,9 mesures en moyenne pour 1.000 jeunes de moins de 21 ans
Les mesures d’ASE étaient au nombre de 381.000 au 31 décembre 2022, un nombre multiplié par 1,4 entre fin 1998 et fin 2022. Il s’agit à 55% de mesures d’accueil et à 45% de mesures de soutien à domicile. Le nombre de jeunes accueillis à l’ASE (208.000 fin 2022) augmente régulièrement chaque année depuis 2020, après avoir "connu une progression d’ampleur inhabituelle entre fin 2015 et fin 2019 (+4,7%) en raison principalement de l’importante augmentation du nombre de mineurs non accompagnés (MNA) et de jeunes majeurs anciennement MNA au cours de cette période (+ 29% par an en moyenne)". Fin 2022, le nombre de jeunes majeurs bénéficiant d’un accueil provisoire (31.000) était en baisse, du fait d’une diminution du nombre de MNA prise en charge pendant la crise sanitaire.
Les dépenses d’ASE des départements se sont élevées à près de 10 milliards d’euros en 2022 et ont été multipliées par 2,3 en euros constants entre 1998 et 2022. 80% de ce montant correspond aux dépenses d’accueil, le reste finançant les actions éducatives, le versement d’allocations et des actions de prévention.
Au niveau national, le taux de mesures d’ASE est de 22,9 mesures en moyenne pour 1.000 jeunes de moins de 21 ans fin 2022, alors qu’il était de 16,6 pour 1.000 jeunes fin 1998. Ce taux "varie fortement selon les départements", selon la Drees, qui met en avant des "pratiques diverses" entre les départements, notamment sur la part des actions éducatives qui résultent d’une décision de justice.