Proposition de loi réformant l'adoption : la CMP butte sur les conséquences de la PMA
La commission mixte paritaire (CMP) n'est pas parvenue à trouver un accord sur la proposition de loi relative à l'adoption (sur le contenu initial du texte, voir notre article du 10 décembre 2020). Déposée par Monique Limon, députée (LREM) de l'Isère (et ancienne directrice du développement social, puis de l'insertion, au département de l'Isère), la proposition de loi reprend très largement les propositions de la mission confiée en avril 2019 par Adrien Taquet, le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles, à Monique Limon et Corinne Imbert, sénatrice (LR) de Charente-Maritime (voir notre article du 18 avril 2019). Déjà dense à l'origine, la proposition de loi est passée de 18 à 26 articles lors de son examen à l'Assemblée au point de compter alors 24 pages. Elle comporte de nombreuses mesures ponctuelles, souvent intéressantes, pour améliorer et clarifier les procédures. Mais elle ne peut évidemment répondre à l'obstacle principal à l'adoption : la diminution continue du nombre d'enfants adoptables, avec en particulier l'effondrement de l'adoption internationale (voir notre article du 3 mars 2021).
Selon Muriel Jourda, sénatrice (LR) du Morbihan, qui rapportait le texte en CMP pour le Sénat, "si nous nous en étions tenus à la déclinaison législative de son rapport au gouvernement [le rapport de Monique Limon de 2019, ndlr], nous serions sans doute parvenus à un accord entre nos deux assemblées, même si ce n'était pas évident au départ". La plupart des dispositions faisaient en effet consensus, malgré quelques divergences surmontables sur le consentement exprès de l'adopté simple à l'adjonction du nom de l'adoptant ou sur le rôle des organismes autorisés et habilités pour l'adoption (OAA).
Le blocage est venu, comme affiché dès le début de la réunion de la CMP, de l'article 9 bis, introduit par un amendement du gouvernement lors de l'examen du texte à l'Assemblée. Il concerne un cas particulier, décrit par l'article comme celui de "l'enfant issu d'une procréation médicalement assistée réalisée à l'étranger dans les conditions prévues par la loi étrangère et dans le cadre d'un projet parental commun de deux femmes, mais que la mère désignée dans l'acte de naissance de l'enfant [la mère biologique, ndlr] s'oppose sans motif légitime à l'établissement du lien de filiation à l'égard de l'autre femme". Cette dernière aurait alors trois mois pour demander l'adoption au tribunal. Pour Muriel Jourda et les sénateurs, "le dispositif adopté par l'Assemblée nationale, que le Sénat refuse, revient à se passer du consentement de la mère biologique. Puisqu'il s'agit d'imposer une filiation, on pourrait parler d'une adoption forcée. Il ne me paraît pas possible de passer outre l'un des principes fondamentaux de l'adoption - le consentement du parent biologique à l'adoption de son enfant". Même si le cas ne concernerait, selon les chiffres avancés lors des débats, qu'environ 200 couples de femmes, il a suffi à bloquer l'accord entre les deux chambres. La proposition de loi va donc repartir pour une seconde lecture à l'Assemblée et au Sénat, à des dates qui restent encore à fixer.