Territoires - Projet de loi sur la consommation : ce qui concerne les collectivités
L'examen à l'Assemblée du projet de loi sur la consommation s'est achevé, jeudi soir, avec, en particulier, l'extension des indications géographiques protégées (IGP) aux produits manufacturés et la protection du nom des collectivités territoriales (articles 23 et 24). C'est la troisième fois en moins de deux ans que les parlementaires tentent de faire passer de telles mesures : un projet de loi sur la consommation porté par l'ancien ministre Frédéric Lefebvre n'avait pu achever son parcours parlementaire avant l'élection présidentielle de 2012 et, fin 2012, une proposition de loi UMP avait été rejetée par l'Assemblée...
Le nouveau texte, qui comprend au total pas moins de 73 articles, permettra ainsi aux produits industriels et artisanaux d'être protégés de la même manière que le sont les produits alimentaires depuis 1992. Cette mesure répond à la demande de valorisation des savoir-faire français, notamment locaux. Une centaine de produits seraient concernés. Défendant son projet de loi, lundi, le ministre de la Consommation, Benoît Hamon, a cité pêle-mêle la porcelaine de Limoges, la dentelle de Calais ou du Puy, le linge basque, la faïence de Quimper, les couteaux de Laguiole ou de Thiers "que le droit des marques ne protège pas d'une concurrence parfois déloyale". La mesure portée par son homologue à l'Artisanat, Sylvia Pinel, prévoit que, pour recevoir son label, le produit devra répondre à un cahier des charges nécessitant la consultation des collectivités, des groupements professionnels et des associations de consommateurs concernées.
Si cette mesure s'est avérée consensuelle, la seconde, la protection des noms de collectivités, a donné lieu à des échanges assez vifs. Le texte prévoit que toute collectivité ou intercommunalité pourra demander à l'Inpi d'être alertée en cas de dépôts d'une demande d'enregistrement d'une marque portant son nom. Les députés ont ajouté que les régions et les départements pourront en faire de même concernant les "noms de pays" situés sur leur territoire. Mais ces dispositions n'ont pas convaincu le député UMP de l'Aveyron Yves Censi, dont la circonscription couvre la commune de Laguiole empêchée de disposer de son propre nom parce qu'un homme d'affaires l'avait déposé avant elle (et qu'elle ne s'y était pas opposée dans les délais impartis). Le député aurait voulu que l'information de la collectivité soit automatique, sans avoir à s'enregistrer à l'Inpi, et que le nom soit la propriété "pleine et entière" de la commune. C'était le sens de sa proposition de loi rejetée en décembre. "Le texte est extrêmement léger", a même déclaré le député. Selon lui, le projet de loi ne résout pas le problème de "la spoliation du nom de la commune". "Aujourd'hui, non seulement les habitants [...] sont empêchés d'ouvrir des magasins au nom de la commune de Laguiole, mais la commune elle-même se retrouve au tribunal", a-t-il dénoncé.
Une bouffée d'oxygène pour les stations-service
Le projet de loi prévoit par ailleurs bien d'autres dispositions destinées à renforcer le droit des consommateurs, à commencer par la création de l'"action de groupe" (article 1er), autre serpent de mer, puisqu'elle avait déjà été envisagée par les précédents gouvernements. Réservée aux associations de consommateurs, elle leur permettra d'intenter une action au nom de plusieurs consommateurs s'estimant lésés.
Les députés ont également voté la création d'un registre national des crédits à la consommation, prévu par la conférence nationale contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale des 10 et 11 décembre 2012. Ce registre vise à responsabiliser les prêteurs qui devront s'informer de l'état d'endettement de la personne souhaitant un crédit alors que, selon Benoît Hamon, au 31 décembre 2012, 772.000 ménages étaient en cours de désendettement et que 87% des dossiers de surendettement concerne le crédit à la consommation.
Jeudi matin, les députés ont par ailleurs voté un amendent donnant une bouffée d'oxygène aux stations-service. Cet amendement, défendu par le député socialiste de Saône-et-Loire Thomas Thévenoud, repousse au 31 décembre 2020 (au lieu de fin 2013) la mise aux normes des réservoirs enterrés des stations-service distribuant moins de 3.500 m3 par an. "On assiste à une véritable disparition, dans toutes nos campagnes, dans tous nos cantons ruraux, des stations-service. Elles y sont pourtant parfois les derniers commerces, et servent aussi aux artisans et commerçants des communes rurales", a justifié le député.
La Fédération nationale des artisans de l'automobile, qui a fait un intense lobbying ces derniers mois, s'est aussitôt félicitée de cette mesure, rappelant qu'"un tiers des propriétaires-exploitants de stations-service, soit plus de 1.600 points détaillants de vente de carburants, sont menacés de fermeture à plus ou moins brève échéance en raison du coût de ces mises aux normes environnementales".
A noter enfin, l'adoption d'un amendement défendu par Sylvia Pinel rendant obligatoire la mention "fait maison" sur les menus pour les plats cuisinés sur place à partir de produits bruts. En cas d'utilisation frauduleuse, l'auteur encourra des sanctions pénales dont le détail sera précisé par décret.
Le vote par scrutin public sur le texte est prévu mercredi 3 juillet, avant examen au Sénat en juillet ou en septembre.