Commande publique - PPP : en l'absence de complexité du projet, le contrat est censé n'avoir jamais existé...
Un arrêt du 2 janvier 2014 a été l'occasion pour la cour administrative d'appel de Lyon de se prononcer sur le bien-fondé du recours au contrat de partenariat public-privé (PPP) par la personne publique pour la réalisation d'un projet.
Dans les faits, la commune de Commentry avait décidé de recourir au contrat de partenariat pour la réalisation d'une piscine municipale. Par délibération du 9 février 2011, le conseil municipal de la commune autorise le maire à signer, avec une société privée, un contrat de partenariat pour la conception, la construction, le financement et la maintenance dudit projet. Le conseil régional de l'ordre des architectes de l'Auvergne attaque cette délibération ainsi que la décision du maire de signer le contrat devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand. Il estime en effet que la condition de complexité requise pour recourir au contrat de partenariat fait ici défaut. Cette requête ne trouve toutefois pas d'écho favorable devant le juge de première instance et la cour administrative d'appel de Lyon est saisie de la question.
La complexité du projet en cause était-elle avérée ? C'est la question principale qu'a du résoudre la juridiction d'appel.
Pour répondre à cette interrogation, la cour rappelle les dispositions de l'article L.1414-2 du Code général des collectivités territoriales autorisant la personne publique à recourir au contrat de partenariat. Selon l'article, "les contrats de partenariat ne peuvent être conclus que si, au regard de l'évaluation, il s'avère : 1) que, compte tenu de la complexité du projet, la personne publique n'est pas objectivement en mesure de définir seule et à l'avance les moyens techniques répondant à ses besoins ou d'établir le montage financier ou juridique du projet (…)".
Pour recourir au contrat de partenariat, la commune invoquait la complexité du projet liée en particulier à une réglementation stricte et évolutive, à la nécessité de coordonner la mise en service de la piscine avec un réseau de distribution de chaleur créé simultanément et destiné à l'alimenter, mais aussi au regard de la mise en œuvre de critères d'écoconditionnalité nécessaires à l'obtention de subventions. Pour la cour, ces contraintes "sont insuffisantes pour caractériser, dans les circonstances de l'espèce, une complexité telle que la commune n'ait pas été objectivement en mesure de définir seule et à l'avance les moyens techniques répondant à ses besoins, compte tenu notamment de la faculté dont elle disposait d'établir pour la piscine municipale et, en l'absence de particularité suffisante du projet, des spécifications techniques en terme de fonctionnalité ou de performance". Le critère de complexité permettant à la personne publique de recourir au contrat de partenariat n'est pas donc pas rempli, estime la juridiction d'appel. Le recours au contrat de partenariat est jugé illégal et le conseil régional de l'ordre des architectes est fondé à demander l'annulation des actes détachables au contrat.
La question du devenir du contrat se pose nécessairement lorsque le recours au partenariat est jugé illégal. La cour d'appel estime dans cette affaire que le vice entachant la délibération et la décision du maire de signer le contrat a affecté le bien-fondé du contrat. L'irrégularité du recours à ce type de montage contractuel "d'une particulière gravité, et qui n'est pas régularisable, est de nature à justifier la résolution du contrat", estime la cour. La résolution a un effet rétroactif, ce qui signifie que les parties sont remises dans l'état où elles se trouvaient à la date de la conclusion du contrat. Concrètement, cela signifie que le contrat est anéanti rétroactivement et est censé n'avoir jamais existé…
L'Apasp
Référence : cour administrative d'appel de Lyon, 2 janvier 2014, n°12LY02827