Finances locales - Pour un pilotage coordonné des dépenses publiques entre l'Etat et les collectivités
Un mois après l'agence de notation Moody's, c'est au tour de Standard and Poor's de publier un rapport sur la situation des finances des collectivités locales. Si la première mettait en perspective un relatif avantage des régions françaises sur leurs homologues européennes (Espagne, Italie, Allemagne), la seconde est moins optimiste : elle préfère mettre en avant l'excellence des régions européennes (Espagne et Belgique) dont la France devrait s'inspirer.
Les deux clés de la réussite... au-delà des frontières
Les régions françaises se placent entre les régions italiennes - échec du système de régionalisation de la santé - et les régions espagnoles et belges qui réunissent les deux clés de la réussite des collectivités : une autonomie fiscale et de gestion et une gouvernance partagée avec l'Etat. Les régions espagnoles, pleinement responsables en matière d'éducation, d'enseignement supérieur et de santé depuis 2002, "disposent d'une forte autonomie de gestion sur les compétences qui leur ont été transférées". Standard and Poor's précise que leur autonomie fiscale a été renforcée, leurs ressources fiscales étant largement assises sur la consommation (TVA), les revenus et les transactions immobilières alors "que la fiscalité des collectivités françaises est essentiellement assise sur les stocks". Pour 2008, les régions vont bénéficier d'un taux accru de participation aux impôts nationaux. Regardant du côté de la Belgique, l'agence de notation précise que depuis les années 90, "l'Etat fédéral n'a eu de cesse d'associer l'ensemble des entités à la maîtrise des déficits et de l'endettement public... Un modèle de gouvernance à méditer".
Une optimisation de la gestion des dépenses est-elle possible ?
A l'instar du diagnostic de Moody's, Standard and Poor's estime ainsi que la vague de décentralisation actuelle va fragiliser les finances des collectivités. Comment maîtriser l'évolution du RMI ou celle du vieillissement de la population ? "De même que celui de l'APA, du RMI ou du TER, le transfert des TOS induit des coûts administratifs et organisationnels supplémentaires que les compensations ne couvriront pas intégralement." Avec les hausses massives de la fiscalité locale de ces dernières années, la capacité d'autofinancement des collectivités ne devrait pas se dégrader en 2007. Pour autant, la réforme de la taxe professionnelle, la part régionale de la TIPP dont l'effet de levier est faible, et le transfert de taxes sans modulation possible placent les collectivités sous une dépendance renforcée de l'Etat tout en laissant les gestionnaires locaux dans l'incertitude. Les enveloppes allouées aux contrats de projets 2007-2013 comme la croissance zéro du pacte de stabilité annoncée pour 2010 vont donc de fait imposer un renouvellement des pratiques financières locales.
Pour l'agence de notation, les collectivités vont procéder à des arbitrages sur leurs dépenses en se recentrant sur leurs compétences. Elles devront chercher à augmenter leurs performances opérationnelles avec la mise en place d'un processus budgétaire rénové, un contrôle de gestion renforcé et une gestion active de leurs actifs. Si certaines collectivités se sont déjà engagées dans des logiques similaires à celles de la Lolf, comment pourront-elles efficacement les mettre en action si elles ne sont pas pleinement responsables des compétences qui leur sont dévolues ? Comme l'ont souligné les rapports Richard et Valletoux, rien ne sera possible sans une nouvelle gouvernance des relations Etat- collectivités.
Clémence Villedieu