Emploi des jeunes - Pour les missions locales, la barque commence à être chargée
Fortement mises à contribution par la crise et ses conséquences sur le chômage des jeunes, les missions locales commencent à s'inquièter pour leurs finances. Réunies en assemblée générale la semaine dernière, l'Union nationale des missions locales (UNML) a adopté une motion pour réclamer des "moyens supplémentaires". "Depuis plusieurs années, les dotations de l'Etat aux missions locales sont gelées à environ 178 millions d'euros, cela finit par manquer", alerte le président de l'UNML, Jean-Patrick Gille. "Dans ma mission locale (de Touraine, ndlr), le manque à gagner correspond à trois postes sur les 50", poursuit-il.
Selon lui, la charge de travail des missions locales a crû de 10% en un an. La motion rappelle que le taux de chômage des 15-24 ans (la cible des missions locales) a augmenté de 3,4 points en un an : aujourd'hui plus d'un jeune actif sur quatre est au chômage (soit 730.000 personnes). Or, les missions locales sont fortement mises à contribution dans le cadre des nouveaux dispositifs pour l'emploi des jeunes comme les emplois d'avenir ou encore l'Accord national interprofessionnel du 7 avril 2011 sur les décrocheurs scolaires, et le seront prochainement avec la nouvelle garantie jeunes. "Ces responsabilités nouvelles sont accompagnées de financements toujours conjoncturels et donc précaires, conduisant les missions locales à une gestion complexe de leurs moyens humains et financiers", souligne la motion.
Certes, le dispositif sur les décrocheurs devrait à nouveau être prorogé de six mois avec les crédits qui vont avec. Quant aux emplois d'avenir, une enveloppe de 25 millions d'euros a été prévue. Mais "tout ceci occasionne des frais de structure et certaines missions locales sont dans une situation financière difficile", renchérit Jean-Patrick Gille.
Garantie jeunes
Quant à l'augmentation du budget pour l'emploi pour l'année prochaine (+6,7%), rien ne dit qu'elle servira aux missions locales. "Ce sera un débat, François Patriat et moi-même allons l'engager (le premier est rapporteur au Sénat sur les crédits de la politique de l'emploi et le second à l'Assemblée, ndlr), il ne faudrait pas que ces crédits ne servent qu'aux contrats aidés."
Les missions locales attendent aussi des éclaircissements sur la nouvelle garantie jeunes. "On avait cru comprendre qu'on expérimenterait un Civis++, il semble que ce ne soit plus tout à fait ça. La garantie sera expérimentée dans des territoires, vraisemblablement des départements, on va vers un nouveau dispositif d'accompagnement avec rémunération", précise Jean-Patrick Gille. "Tous les six mois, on invente un nouveau dispositif, le réseau souffre de ces changements", se plaint-il. D'autant qu'à cette garantie s'ajoute celle de l'Europe, avec une enveloppe de 400 millions d'euros à la clé pour la France. "On est à l'affût, on essaie de comprendre, on espère en récupérer une partie."
Quant aux emplois d'avenir, le président de l'UNML observe que "les chiffres sont en train d'augmenter après toute la polémique superflue de ces dernières semaines". "Ils vont jouer à plein en septembre, beaucoup de dispositifs sont liés aux rythmes scolaires, explique-t-il. On va atteindre les objectifs, ça peut être une manière de montrer la qualité du réseau." Jean-Patrick Gille note par ailleurs que les recrutements sont plus aisés en milieu rural. "Quand on connaît bien son public, on peut réagir plus facilement que dans l'anonymat des zones très urbaines, fait-il valoir. Par ailleurs, les grandes collectivités pourvoyeuses ont mis plus de temps à démarrer."
Un conseil national pour l'insertion des jeunes
En revanche, s'agissant du nouveau dispositif des "emplois francs", inauguré aujourd'hui à Marseille, le président de l'UNML se montre plus sceptique. "Le vrai sujet pour les entreprises, c'est d'être sécurisé sur le jeune, de s'assurer que la structure qui l'accompagne est compétente. C'est la grande force des écoles de la deuxième chance : l'entreprise sait qu'en cas de problème, il y aura quelqu'un pour y répondre dans l'heure qui suit. Cette relation de confiance donne des résultats étonnants. C'est aussi valable pour les missions locales."
Enfin, l'UNML prend les devants sur la réorganisation du réseau voulue par le Premier ministre. Elle propose, dans une autre motion, la création d'un "Conseil national pour l'insertion des jeunes" qui serait "un lieu d'échanges, de réflexion et de concertation des missions locales avec les pouvoirs publics, les collectivités territoriales, les acteurs associatifs, les partenaires socio-économiques qui agissent pour l'insertion des jeunes". Sa mission serait de "contribuer au développement d'une politique de la jeunesse, rompant avec la segmentation des interventions et l'empilement des dispositifs".