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Projet de loi Egalité et Citoyenneté - Plec, titre II : pluie d'amendements "logement" en commission

Le projet de loi Egalité et Citoyenneté qui sera discuté dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale à partir du lundi 27 juin a déjà été bien amendé en commission spéciale. 1.200 amendements déposés dont la moitié sur le volet logement (titre II). 350 adoptés dont plus de 250 qui changeront, parfois profondément, la vie des acteurs de l'habitat. Parce qu'on a beau dire que le texte répond avant tout à une commande politique, les dispositifs qu'il est en train d'engendrer sont loin d'être anecdotiques pour tout le monde. A défaut d'être réellement efficaces pour lutter contre les ghettos.

Présenté comme la réponse législative aux ghettos et à l'"apartheid territorial, social, ethnique" évoqué par Manuel Valls peu de temps après les attentats de janvier 2015 (voir notre article du 20 janvier 2015), le projet de loi Egalité et Citoyenneté serait aussi un texte destiné à séduire un électorat de gauche dans le timing de la prochaine élection présidentielle.
Quoi qu'il en soit, depuis la version présentée en conseil des ministres le 13 avril (voir notre article du 14 avril 2016) le volet logement, qui était qualifié d'usine à gaz depuis l'origine et accusé de "ne pas être à la hauteur des enjeux" (voir notre article ci-contre du 15 mars), a encore gagné une centaine de mesures et dispositifs à la faveur de son passage en commission spéciale de l'Assemblé nationale les 14, 15 et 16 juin. On peut espérer que la discussion en séance publique, qui démarrera lundi prochain, gagnera en légèreté...
Si l'on se concentre sur les amendements adoptés dans le domaine du logement - ce qui en fait déjà plus de 250 ! – on voit de tout : certains amendements bienvenus tentent de remettre de l'ordre dans la complexité (c'est le cas de la création de la CIA notamment, la "convention intercommunale d'attribution"), d'autres font passer des mesures très importantes qui jusque-là n'avaient pas trouvé leur public ou leur cavalier législatif (plafond "Pupponi", dispositif pour réduire les minorités de blocage dans le cadre de la définition d'un intérêt communautaire...). On voit aussi une quantité d'amendements qui entendent arrondir les angles de règles posées dans le texte initial et jugées à la réflexion trop uniformes (dans certaines conditions, les préfets pourront continuer à déléguer leur contingent aux maires, les EPCI à déterminer des quartiers où le supplément de loyer de solidarité ne s'applique pas, les communes à mutualiser les objectifs de rattrapage SRU à l'échelle intercommunale...) au risque de complexifier encore plus les choses. Enfin, on voit surgir de nouveaux articles qui peuvent être des copier-coller de propositions de loi dont la discussion parlementaire n'a jamais été achevée (comme la proposition de loi "Gens du voyage" adoptée en 2015 par l'Assemblée nationale) ou des dispositifs que la ministre du Logement et de l'Habitat durable désire mettre en place durant la petite année qu'il lui reste vraisemblablement à faire au gouvernement.
Une fois qu'on a dit ça, il faut bien les examiner un à un ces amendements adoptés, repérer celui qui sera anodin pour un office public de l'habitat mais incontournable pour une communauté d'agglomération, anecdotique pour une communauté de communes mais essentiel pour une commune SRU... Si vous vous intéressez de près ou de loin aux politiques de l'habitat, il y en a forcément pour vous !
(A lire également, notre article de ce jour : "Plec, titres I et III : les députés de la commission font feu de tout bois")

CHAPITRE 1 : AMELIORER L'EQUITE ET LA GOUVERNANCE TERRITORIALE DES ATTRIBUTIONS DE LOGEMENTS SOCIAUX

Pour rappel, la première série de mesures du titre II, réunies dans le chapitre 1, visent à mieux piloter les attributions de logements sociaux, en fixant un quota de 25% des attributions hors quartiers de la politique de la ville (QPV) aux demandeurs les plus pauvres (et aux relogés Anru) et en responsabilisant les EPCI concernés. Les "demandeurs les plus pauvres" étant définis comme ceux qui, sur le périmètre de l'EPCI, appartiennent au quartile des demandeurs aux ressources les plus faibles : un quart des logements sociaux situés hors QPV seraient attribués au quart des demandeurs aux ressources les plus modestes. Les EPCI concernés par la réforme des attributions sont ceux tenus de se doter d'un programme local de l'habitat (PLH) ou compétents en matière d'habitat, et comportant au moins un QPV.
Ces principes n'ont pas été remis en cause par la commission spéciale. Mais des aménagements et des ajouts sont apparus.

Règle des 25 %

Possibilité d'adapter les 25% hors QPV - Si l'objectif du gouvernement reste bien de consacrer 25% minimum des attributions hors QPV aux plus pauvres (le 1er quartile des demandeurs de logement social), il y aurait possibilité "le cas échéant, en tenant compte de la situation locale, de fixer une adaptation locale à ce pourcentage, dans le cadre des orientations en matière d'attributions adoptées par la conférence intercommunale et dont la mise en œuvre est approuvée par l'EPCI et le préfet de département". La ville de Paris serait concernée (art.20).

Plafond de pauvres en QPV (amendement "Pupponi") - La part des attributions réservée aux plus pauvres dans les QPV serait plafonnée à 50% du total des attributions(art.20). Ce même plafond de 50% serait appliqué à Action Logement (art.21) et aux communes dont au moins 40% de la population réside dans un QPV. La règle pourrait être dérogée en cas d'accord local au sein de la conférence intercommunale du logement (CIL).
A noter que cet amendement, porté par le député-maire de Sarcelles et président de l'Anru François Pupponi, et cosigné par 34 autres élus socialistes, a été adopté contre l'avis du gouvernement et du rapporteur général Razzy Hammadi (art.20).

Substitution du préfet - La substitution du préfet en cas de manquement d'une collectivité ou d'un bailleur aux obligations relatives aux 25% d'attributions situées en dehors des QPV ne serait plus optionnelle mais obligatoire (art.20). Idem pour Action Logement (art.21). Lorsqu'un bailleur n'aura pas atteint son objectif de 25%, le préfet ou le maire pourrait procéder à l'attribution des logements restant sur l'ensemble des contingents (art.20).
Contingent préfectoral délégué aux maires – Le projet de loi initial prévoyait de mettre fin aux conventions de délégation du contingent préfectoral consenties aux maires. Mais les députés ont estimé que parfois "l'application de la convention de délégation se fait en bonne intelligence entre le préfet et le maire", et que dès lors il serait possible au préfet de région, après avis du CRHH (comité régional de l'habitat et de l'hébergement), de décider de résilier ou non les conventions de délégation existantes (art.20).

Publics prioritaires

Dalo (dans la série "ça va mieux en le disant") – Le texte préciserait explicitement que le quota minimal de 25% applicable aux contingents des collectivités concerne à la fois les ménages Dalo et les autres publics prioritaires. Les rôles seraient clarifiés entre le PDALHD (plan départemental d'action pour le logement et l'hébergement des personnes défavorisées), et les orientations en matière d'attribution définies par la conférence intercommunale du logement (CIL) (art.20).

Action Logement et Dalo - Pour Action Logement, il serait rappelé que la cible première de l'obligation de 25% d'attribution est constituée des personnes bénéficiant du Dalo et que, à défaut, les attributions pourront concerner un autre public prioritaire. "Cette règle figure actuellement dans une circulaire (d'abord les ménages Dalo et subsidiairement les sortants d'hébergement) qu'Action Logement refuse d'appliquer faute de base légale", indiquent les rapporteurs dans leur exposé des motifs. Ils rappellent également que "plus de la moitié de ceux qui bénéficient du Dalo sont salariés ou demandeurs d'emploi" (art.21).

Elargissement des publics prioritaires – Seraient ajoutés à la liste des publics prioritaires pour l'accès au logement social : les jeunes en formation professionnelle et les personnes malades chroniques quittant un appartement de coordination thérapeutique parce que leur situation administrative, sociale et médicale s'améliore... (art.20).

Relogement des publics prioritaires PML – A Paris, Marseille et Lyon, la répartition des logements dont l'attribution relève de la commune est effectuée par le maire d'arrondissement pour moitié et par le maire de la commune pour l'autre moitié. Il serait possible de déroger à cette règle du moitié-moitié dans le cas de relogement de personnes prioritaires : après avis des conseils d'arrondissement, le conseil municipal pourrait fixer une liste de relogements prioritaires, lesquels ne pourront porter, dans chaque arrondissement, sur plus de la moitié des logements dont l'attribution relève de la commune (après art.20).

PLH et mobilisation de l'habitat privé – Les programmes locaux de l'habitat (PLH) auraient l'obligation de prévoir les actions à mener pour mobiliser l'offre locative privée existante à des fins sociales (c'est-à-dire faisant l'objet d'une convention ouvrant droit à l'APL), y compris en intermédiation locative (que ce soit en mandat de gestion avec une location directe aux personnes ou en location/sous-location par des organismes agréés). En zone tendue, des objectifs chiffrés devraient être fixés par commune, selon les modalités de répartition prévues par les dispositions de l'article 4 de la loi Besson sur les plans locaux d'action pour le logement des personnes défavorisées (PLALPD) (art.20).
Accords collectifs… si je veux ! - Les EPCI qui ne rentreraient pas dans le champ de compétence de la conférence intercommunale du logement (CIL) auraient tout de même la possibilité d'élaborer des accords collectifs intercommunaux centrés sur le logement des ménages Dalo et des publics prioritaires (art.20).

Avis de la CIL sur le Dalo - La conférence intercommunale du logement (CIL) donnerait son avis sur le projet d'arrêté du préfet fixant le délai au-delà duquel les demandeurs peuvent saisir la commission de médiation du Dalo (art.20).

Obligation de CIL, création de la CIA et un peu de ménage dans tout ça

CIL obligatoires – La création des conférences intercommunales du logement (CIL) serait obligatoire par les EPCI concernés par la réforme des attributions. Pour les rapporteurs, auteurs de l'amendement, les CIL doivent être "l'organe central" où s'élaboreront les politiques de mixité sociale, les orientations en matière d'attribution et la convention intercommunale d'attribution (CIA) (art.20).

Création de la convention intercommunale d'attribution (CIA) – Aujourd'hui, les conventions d'application des orientations définies par la conférence intercommunale du logement (CIL) se traduisent dans deux documents distincts : l'accord collectif intercommunal et la convention d'équilibre territorial (dite convention "article 8", en référence à l'article 8 de la loi Lamy du 21 février 2014 qui l'a créée). A la faveur d'un amendement des rapporteurs, ces deux documents seraient fusionnés en un seul : la "convention intercommunale d'attribution" (CIA). Dès lors, concrètement, la CIA fixerait la répartition, entre les bailleurs sociaux, des attributions à réaliser, sous réserve que le pourcentage de 25%, applicable au territoire de l'EPCI, soit respecté globalement. La CIA serait signée entre l'EPCI, les bailleurs sociaux, les réservataires "et, le cas échéant, d'autres collectivités territoriales ou d'autres personnes morales intéressées". L'atteinte des objectifs fixés ferait l'objet d'une évaluation annuelle présentée à la CIL. Et en cas de manquement d'un bailleur social à ses engagements, le préfet ou le président de l'EPCI pourrait procéder lui-même aux attributions, après consultation des maires des communes intéressées (art.20).

Un an de délai - Les EPCI déjà engagés dans l'élaboration des orientations de la conférence intercommunale ou dans une convention "article 8" auraient un an pour se mettre en conformité (art.20).

Encourager la fusion des contingents – Les orientations adoptées par la CIL pourraient prévoir des catégories ou des territoires pour lesquels les désignations des candidats aux commissions d'attribution se font d'un commun accord entre tous les partenaires. "L'objectif est d'encourager explicitement les démarches locales conduisant progressivement à la fusion des contingents", expliquent les rapporteurs (art.20).

CIL, commission d'attribution et président d'EPCI – Quand un EPCI a créé une CIL et qu'il a adopté le plan partenarial de gestion de la demande, le président de l'EPCI serait membre de droit des commissions d'attribution (CAL) "avec voix prépondérante". "Il pourra ainsi s'assurer que les orientations en matière d'attribution, adoptées par la CIL, s'appliquent", justifient les rapporteurs, auteurs de l'amendement (art.22).

Action Logement

Echelle intercommunale – Il est précisé que l'obligation pour les collecteurs d'Action Logement de réserver 25% des attributions aux publics prioritaires s'apprécie à l'échelle du territoire des EPCI ou des EPT (les établissements publics territoriaux du Grand Paris). "Il est important que cette obligation contribue aux objectifs propres à chaque territoire et ne soit pas appréciée à une échelle nationale", insistent les rapporteurs dans l'exposé des motifs (art. 21).

Plafond "Pupponi" - Un amendement "Pupponi" précise que, au sein de l'obligation de 25 % d'attributions, pas plus de la moitié de celles-ci ne pourraient être réalisées en QPV, sauf en cas d'accord local au sein de la conférence intercommunale du logement (art.21).

Substitution du préfet - En cas de manquement d'un collecteur d'Action Logement à l'obligation de consacrer 25% des attributions sur son contingent aux ménages prioritaires, la substitution du préfet n'est plus optionnelle mais "obligatoire" (art.21).
Commission d'attribution - Les réservataires qui ne sont pas membres de droit de la commission d'attribution des logements (CAL) - comme les organismes collecteurs d'Action Logement par exemple, qui n'auraient qu'une voix consultative -, pourraient participer aux décisions de la commission concernant l'attribution des logements qui relèvent de leur contingent (art.22).

Données concernant les occupants du parc locatif social

Logements sociaux vacants - Le projet de loi initial prévoyait que les offices HLM porteraient à la connaissance du public les logements sociaux vacants, leur description et leurs conditions d'accès, et cela "au plus tard le 1er janvier 2022". La date serait avancée au 1er janvier 2020, y compris pour les Sem de construction et de gestion de logements sociaux (art.24).

Données concernant les occupants du parc locatif social – A la faveur de plusieurs amendements gouvernementaux, l'exploitation des données collectées sur les caractéristiques des occupants du parc locatif social serait élargie, en donnant des garanties sur le caractère anonyme de ces données. Ainsi, les données personnelles recueillies par les bailleurs seraient anonymes et le ministère réaliserait des "cartographies précises de l'occupation socio-économique du parc locatif social" et les communiquerait anonymisées aux acteurs locaux (services de l'Etat, EPCI, conférences intercommunales du logement, communes).
Les bailleurs sociaux pourraient collecter les avis d'imposition ou de non-imposition de leurs locataires pour alimenter l'enquête biennale OPS (occupation du parc social) et pourraient créer des outils d'analyse de l'occupation sociale de leur parc.
Un décret en Conseil d'État déterminerait les conditions dans lesquelles les organismes de logement social pourraient transmettre les données agrégées à certains tiers (Etat, région, département, EPCI, Union sociale pour l'habitat, fédérations HLM et Action Logement).
L'Ancols (Agence nationale de contrôle du logement social) serait habilitée à obtenir des organismes HLM la communication de ces données (art.25).

Exploitation par les agences d'urbanisme et CAUE - Les agences d'urbanisme et les conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE) seraient aussi habilités à recevoir des données d'enquêtes des bailleurs sociaux (art.25).

Et aussi...

Politique des loyers des bailleurs – Il serait clairement inscrit dans la loi que "Les bailleurs peuvent adapter leur politique des loyers pour remplir les objectifs de mixité". Objectif de cet amendement de Christophe Caresche : "laisser les organismes définir une politique de loyers en cohérence avec les objectifs de mixité qui leur sont fixés" (art.20).

Revenus du patrimoine et attribution – Les commissions d'attribution peuvent prendre en compte le patrimoine détenu par un candidat à un logement social et motiver un refus sur la base des revenus potentiels générés (après art.20).

Cotation – Quand un système de cotation a été mis en place sur un territoire, les demandeurs de logements sociaux seraient informés sur les règles régissant son fonctionnement général et sur les points qui ont été attribués à leur dossier à partir de ces règles (art.24).

Location "voulue" - Le terme de "location choisie" serait remplacé par celui de "location voulue". Le système ne change pas : il permet de prendre en compte, lors de la décision d'attribution, l'intérêt du demandeur pour un logement dont il connaît la vacance. C'est juste une question de vocabulaire : il ne fallait pas que les demandeurs s'imaginent qu'ils pourraient "choisir" leur logement dans une liste ; c'est bien toujours la commission d'attribution du bailleur qui peut seule déterminer le logement qui sera finalement attribué (art.24).

CHAPITRE 2 : FAVORISER LA MOBILITE DANS LE PARC SOCIAL ET L'ACCES DES MENAGES DEFAVORISES AUX QUARTIERS ATTRACTIFS

Expérimentation du loyer HLM unique (amendement "Appéré") – Les intercommunalités auraient la possibilité d'expérimenter, durant 5 ans, une politique des loyers visant à faire converger l'ensemble des loyers pratiqués au sein du parc locatif social vers un niveau de loyer maitrisé, identique à tous les logements d'une typologie donnée. Cette possibilité serait accordée aux intercommunalités déjà engagées dans une politique "volontariste" en matière d'habitat et "particulièrement impliquées dans la garantie du droit au logement sur leur territoire", et "souhaitant agir davantage en matière de mixité sociale", ainsi que l'ont défendu les auteurs de l'amendement mené par la députée-maire de Rennes, Nathalie Appéré (art.26).

Quartiers hors QPV et hors SLS - Les EPCI auraient finalement toujours la possibilité de déterminer, dans le PLH, des quartiers situés en dehors des QPV ou des anciennes ZUS où le supplément de loyer de solidarité (SLS) ne s'appliquerait pas. Ce zonage s'effectuerait sous le contrôle du préfet (avis conforme). Pour rappel, la version initiale du projet de loi supprimait cette possibilité, mais entre-temps les rapporteurs ont estimé que "l'application du SLS peut, dans certains quartiers en voie de paupérisation, qui ne sont pas encore classés en QPV, accélérer le recul de la mixité sociale" (art.27).

Plafonnement du SLS à 30% - Le plafonnement du SLS serait porté à 30% des ressources du foyer (contre 25% actuellement et 35% dans la première version du projet de loi). Les rapporteurs ont estimé que le taux de 30% "correspond davantage au taux d'effort maximal communément admis dans le parc locatif, d'autant plus que les charges locatives ne sont pas comprises dans ce plafond" (art.27).

Perte du droit au maintien dans les lieux : le PLS devient la référence - La version initiale du projet de loi abaissait le seuil de déclenchement de la perte du droit au maintien dans les lieux à 150% de dépassement du plafond de ressources applicable pour l'attribution du logement (au lieu de 200%). Cette mesure de "portée symbolique" (900 ménages touchés sur 4,76 millions de ménages logés dans le parc HLM) n'est pas remise en cause. Mais pour "conserver une certaine mixité sociale tout en dégageant des ressources supplémentaires", la référence au dépassement des plafonds de ressources serait celle des logements de type PLS, et cela peu importe le logement occupé par le locataire. Le seuil de perte du droit au maintien dans les lieux se situerait ainsi à 45.000 euros de revenus annuels pour une personne seule à Paris et à 39.000 euros en régions (art.27).

Quand un organisme HLM veut vendre plus de la moitié de son patrimoine... - Un nouvel article, introduit par amendement gouvernemental, obligerait les organismes HLM qui souhaitent céder plus de 50% de leur patrimoine à motiver leur décision d'aliénation et déclarer s'ils souhaitent poursuivre leur activité ou demander à terme à être dissouts. L'objectif est de permettre au préfet de "porter une appréciation sur l'orientation stratégique de l'organisme" avant de décider ou non de délivrer l'autorisation d'aliénation (après art.28). Une mesure qui intervient dans un contexte où des offices publics de l'habitat (OPH) municipaux situés sur le territoire du Grand Paris envisagent de transférer leur patrimoine à une Sem pour ne pas être fusionnés dans des organismes au périmètre des EPT (voir notre article Localtis du 26 mai 2016).

Sous-location et meublés HLM pour les actifs en mobilité - Les conditions d'utilisation des logements HLM par leurs locataires seraient rendues "plus lisibles". Sont visés : les cas de sous-location, les échanges, les procédures de résiliation de bail, les dérogations... (après art.25). En revanche, un nouvel article élargirait aux "actifs en mobilité géographique liée à l'emploi" la possibilité de louer un logement social en meublé. "Cela doit notamment permettre aux enseignants d'accepter plus facilement les remplacements qui leur sont proposés, en leur offrant des solutions de logement de courte durée", font valoir les rapporteurs, auteurs de l'amendement (art.26).

Délégation du conseil municipal au maire - Un nouvel article étendrait les possibilités de délégation du conseil municipal au maire afin de rendre plus réactives les actions des collectivités en matière de logement en évitant de passer par une délibération en conseil municipal. Il s'agirait de la délégation du droit de préemption urbain (DPU) et de la délégation du droit de priorité aux Sem et organismes HLM.
Par ailleurs, pour permettre aux maires d'être plus réactifs dans la gestion du patrimoine de la commune, notamment en vue de le mobiliser pour construire du logement, le conseil municipal pourrait leur déléguer la compétence de dépôts des autorisations d'urbanisme relatives à la démolition, à la transformation ou à l'édification des biens municipaux. Une disposition analogue est prévue pour les présidents de conseils départementaux (pour les biens de la collectivité départementale) et régionaux (pour les biens de la collectivité régionale) (après art.28).

CHAPITRE 2 BIS : RENFORCER LA DEMOCRATIE LOCATIVE DANS LE LOGEMENT SOCIAL

Il s'agit d'un nouveau chapitre au titre II, introduit par la commission spéciale.

Parité chez les représentants des locataires - Un nouvel article instaurerait la parité entre les femmes et les hommes dans les listes de candidats aux élections des représentants des locataires dans les offices publics de l'habitat (OPH), les entreprises sociales pour l'habitat (ESH) et les Sem de construction et de gestion de logements sociaux (après art.28).

2 euros pour les plans de concertation locative - Un nouvel article obligerait les bailleurs sociaux à prévoir un financement minimal de 2 euros par logement et par an, au bénéfice des représentants de locataires pour qu'ils exercent leur fonction dans le cadre des plans de concertation locative créés par la loi SRU. Cette règle s'appliquerait à compter des prochaines élections des représentants des locataires, soit au 1er janvier 2019 (après art.28).

Actions de groupe - Un nouvel article autoriserait la création d'associations ad hoc pour l'introduction d'actions de groupe à l'égard d'un bailleur social ayant manqué à ses obligations légales. Cet amendement a pour objet d'assurer aux locataires une meilleure protection de leurs droits dans la mesure où il y a souvent une "étroitesse des liens entre les bailleurs et les associations de défense des locataires", justifient les rapporteurs, auteurs de l'amendement (après art.28).

CHAPITRE 3 : MIEUX REPARTIR L'OFFRE DE LOGEMENT SOCIAL SUR LES TERRITOIRES ET FAVORISER LE DEVELOPPEMENT DES STRATEGIES FONCIERES

Article 55 de la loi SRU

Les communes carencées ne toucheraient plus la DSU – Un nouvel article rendrait inéligibles à la Dotation de solidarité urbaine (DSU) toutes les communes carencées au sens de l'article 55 de la loi SRU, et cela quel que soit leur taux de logements sociaux. L'article dirait également que : "La perte de recettes pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et, corrélativement pour l'Etat, par la création d'une taxe additionnelle (sur les tabacs)" (après art.31).
Hausse du prélèvement – Le prélèvement sur les ressources fiscales des communes carencées passerait de 20 à 25% du potentiel fiscal par habitant. Audrey Linkenheld, qui a porté l'amendement devant la commission spéciale, estime que la part du prélèvement dans le budget des communes carencées est si faible aujourd'hui que "dans les faits, nombre de communes préfèrent s'en accommoder plutôt que de réaliser des logements locatifs sociaux" (art.31).

Faible tension dans le parc - Le critère de très faible tension de la demande de logement social pouvant permettre à certaines communes d'être exonérées de l'application de l'article 55 de la loi SRU ne serait mesuré que "dans le parc locatif social" (art.29).

Rattrapage à l'échelle intercommunale - Le projet de loi initial supprimait la possibilité, pour les EPCI compétents en matière de PLH, de mutualiser, sur le territoire intercommunal, les objectifs triennaux de rattrapage au titre de la loi SRU. Mais constatant que "des territoires utilisent cet outil de manière pédagogique afin d'entraîner dans la construction de logements sociaux des communes historiquement en retard ou nouvellement entrantes dans le dispositif SRU", les rapporteurs ont convaincu la commission spéciale de ne plus supprimer cet outil mais "de mieux l'encadrer" en limitant la mutualisation à une seule période triennale, en la réservant aux EPCI délégataires des aides à la pierre et en imposant que l'objectif de rattrapage intermédiaire ne puissent être inférieur, pour chaque commune déficitaire, au tiers de l'objectif de rattrapage légal (art.29).

Exemptées SRU pour cause d'inconstructibilité – Aujourd'hui, une vingtaine de communes dont plus de la moitié du territoire urbanisé est soumise à une inconstructibilité résultant de la couverture par un plan d'exposition au bruit ou par un plan de prévention des risques naturels, technologiques ou miniers, ou soumise à une servitude de protection sont exemptées de l'application de l'article 55 de la loi SRU. Un décret en dressera la liste actualisée et les conditions de concertation (conditions identiques aux autres communes exemptées par insuffisance de tension sur le logement social ou de relation avec les bassins de vie, ainsi que le prévoit toujours le projet de loi). Dans l'attente de ce décret, les communes exemptées à ce titre le resteront (art.29).

Carence - Il sera précisé dans la loi que toutes les communes déficitaires, prélevées ou non, peuvent faire l'objet de la procédure de carence (art.29).

Amende de 1.000 euros - Lorsque, pendant la durée d'application d'un arrêté de carence, le droit de préemption est exercé par le préfet, la déclaration d'intention d'aliéner (DIA) en vue de l'acquisition d'un bien immobilier lui est transmise par le maire. Si le maire tarde trop à lui transmettre, il serait passible d'une amende forfaitaire de 1.000 euros à verser au Fonds national des aides à la pierre (ou au fonds régional d'aménagement foncier et urbain lorsque la commune se situe dans un département d'outre-mer) (art.30).

PLH

Organismes HLM et PLH – Il serait inscrit dans la loi que les organismes HLM sont associés "de droit" à l'élaboration des PLH. Défendu par François Pupponi, cet amendement lui a été suggéré par l'Union sociale pour l'habitat (art.29).

Une ordonnance pour les PLUIH - Le gouvernement serait habilité à légiférer par voie d'ordonnance pour traiter, dans le cadre des fusions d'EPCI, le cas des plans locaux d'urbanisme intercommunaux tenant lieu de programme local de l'habitat (PLUIH), et notamment des dispositions permettant de gérer les PLUIH existants ou en cours jusqu'à l'élaboration d'un PLUI sur le nouveau périmètre, afin de conserver le bénéfice des travaux engagés (art.33).

PLH et Grand Paris - Un nouvel article prévoirait la prorogation de tous les PLH existants dans le périmètre de la Métropole du Grand Paris (MGP), dans l'attente de l'adoption du plan métropolitain de l'habitat et de l'hébergement (PMHH) qui tiendra alors lieu de PLH. Et cela pour une durée maximale de deux ans à compter de la date du transfert de la compétence politique locale de l'habitat à la MGP prévue le 1er janvier 2017 (après art.32).

Gens du voyage

Renforcement des pouvoirs du préfet – Un nouvel article renforcerait les pouvoirs de substitution du préfet en matière de construction d'aires d'accueil et un autre améliorerait le régime d'évacuation forcée des campements illicites. Tous deux reprennent la proposition de loi relative au statut, à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, adoptée par l'Assemblée nationale le 9 juin 2015 (voir notre article du 11 juin 2015) (après art.33).

PLH et PDALHPD – Les besoins d'accueil et d'habitat des gens du voyage vivant en résidence mobile seraient identifiés au sein des PLH et des PDALHPD (plan départemental d'action pour le logement et l'hébergement des personnes défavorisées) (après art.33).

PIG - Le préfet aurait la possibilité de qualifier les aires d'accueil des gens du voyage de projet d'intérêt général (après art.33).

Compétence intercommunale - La compétence "terrains familiaux locatifs" serait donnée aux EPCI qui disposent déjà de celle relative aux aires d'accueil des gens du voyage (après art.33).

Intercommunalité et inter-intercommunalité

Intérêt communautaire - Anticipant que l'élargissement des périmètres intercommunaux "aura pour conséquence la constitution d'organes délibérants comptant un nombre plus important de membres" et que cela "rendra plus difficile à atteindre le seuil actuellement fixé par la loi pour la définition de l'intérêt communautaire des compétences, fixé à deux tiers des membres du conseil", Nathalie Appéré a défendu avec succès un amendement visant à éviter les minorités de blocage en comptabilisant la majorité qualifiée des deux tiers non plus en tenant compte des membres, mais des suffrages exprimés (art.33).

OPH et bassin de vie – Un nouvel article permettrait que les offices publics de l'habitat puissent être rattachés à un syndicat mixte composé d'un département et d'un ou plusieurs EPCI compétents en matière d'habitat ; ou encore à un syndicat mixte composé de plusieurs EPCI compétents en matière d'habitat. Car, selon les rapporteurs auteurs de l'amendement, "il apparaît que c'est au niveau d'un bassin de vie qu'une politique locale de l'habitat prend tout son sens et que dans de nombreux cas, les intercommunalités existantes n'atteignent pas ce périmètre" (après art.33).

Président d'OPH un jour... - La loi Alur puis la loi Notr ont prévu le rattachement des OPH communaux aux EPCI compétents en matière d'habitat à partir du 1er janvier 2017. Un nouvel article permettrait, de manière transitoire (jusqu'au 31 décembre 2020), aux anciens présidents, conseillers municipaux non membres de l'organe délibérant de l'EPCI, de conserver leur présidence sous réserve d'être désignés personne qualifiée par l'EPCI (après art.33).

Et aussi...

1% associatif et culturel - Un nouvel article instaurerait la règle dite du "1% associatif et culturel" mise en place par la loi "Quillot" du 22 juin 1982 et supprimée par la loi "Méhaignerie" du 23 décembre 1986. Dans le cadre de la construction de tout bâtiment d'habitat collectif d'au moins 50 logements, une surface équivalant à au moins 1% de la surface totale serait consacrée à des locaux à usage collectif pour les résidents. A défaut, le constructeur serait tenu de verser une somme équivalant au coût de la construction de la surface afférente à une structure associative (après art.33).

Sieg - Un nouvel article inscrit dans le Code de la construction et de l'habitat (CCH) donnerait l'obligation, pour les organismes HLM, de distinguer dans leur comptabilité interne les activités relevant du Sieg (service d'intérêt général) et celles n'en relevant pas, à compter du 1er janvier 2018. Cela fait suite à la Décision 2012/21/UE relative aux aides d'Etat sous la forme de compensation de service public de la Commission européenne (après art.33).
Expulsion d'un habitat précaire – Un nouvel article uniformiserait les procédures d'expulsion quel que soit le type d'habitat, qu'il soit bâti ou précaire ou informel, pour que "les personnes dont le domicile est un habitat précaire puissent jouir des mêmes droits que les occupants de bâtis", explique l'amendement gouvernemental. En l'occurrence, l'expulsion ne peut être effectuée qu'en vertu d'une décision de justice (après art.33).

Résidences hôtelières à vocation sociale – Les RHVS, dispositif initialement ouvert à un public qui souhaite disposer d'un hébergement pour une courte durée notamment les jeunes et apprentis en mobilité professionnelle, s'ouvriraient aux personnes en difficulté relevant de l'hébergement d'urgence notamment dans le cadre du plan de mobilisation de 45.000 nuitées hôtelières. Alors, les critères relatifs aux logements seraient assouplis et un accompagnement social serait organisé (après art.33).

Décote : la Sovafim aussi - L'ensemble des cessions de la Sovafim serait soumis à la décote prévue par la loi Duflot I. Ce qui, selon les auteurs de l'amendement, n'aurait jamais été le cas jusqu'à aujourd'hui pour cette Société de valorisation immobilière (Sovafim) chargée par l'Etat, son unique actionnaire, de "valoriser" des terrains lui appartenant (après art.32).

Ancols - Un nouvel article, issu d'un amendement gouvernemental, adapte certaines dispositions relatives à l'Agence nationale de contrôle du logement social (Ancols) afin d'améliorer son fonctionnement après sa première année d'existence (après art.33).

 

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