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Aménagement numérique - Plan FTHD, projet de loi, agence, usages... Axelle Lemaire fait le point

Auditionnée la semaine dernière successivement par les commissions des affaires économiques et du développement durable du Sénat, Axelle Lemaire a apporté des précisions sur le déroulement des chantiers numériques qui relèvent de son secrétariat d'Etat. Dans l'ensemble la feuille de route "infrastructures" et "services" sur le numérique suit son cours, avec quelques infléchissements ou accélérations. Revue de détail.

Plan France Très haut débit
Face à des sénateurs parfois critiques, la ministre a considéré le plan français comme particulièrement exemplaire : "Très peu de pays dans le monde ont mis en œuvre un plan équivalent, à l'échelle du territoire et en concertation avec les acteurs privés", a-t-elle souligné. A l'issue de son déploiement en 2022, certains experts évaluent à près de cinq années l'avance que ce plan, donnera à la France sur son voisin allemand. Il est vrai que le déploiement suit largement le cours prévu avec 66 projets publics couvrant 78 départements déposés au FSN à ce jour, dont de nombreuses collectivités territoriales à dominante rurale (Gers, Ardèche, Haute-Marne, Haute-Saône, Auvergne et Limousin). Sur cet ensemble, 31 projets (pour 39 départements) ont fait l'objet d'un accord de principe ou définitif du Premier ministre, ce qui représente un investissement de 7 milliards sur 5 ans, permettant à 4 millions de foyers d'accéder au Ftth.
On pouvait craindre l'impact du rachat de  SFR par Numéricable, que l'autorité de la concurrence vient d'autoriser (1). Certes, ce rachat change la donne dans les zones conventionnées, ce que reconnaît la ministre, "mais sans remettre en cause l'équilibre initial". Elle souhaite conserver une "bonne dynamique" en permettant à Numéricable de déployer du Ftth hors de la zone câblée, "comme la société en a manifesté l'intention", et à Orange de déployer dans la zone câblée. Une situation désormais facilitée par un marché qui s'anime avec l'appétence des consommateurs.
La ministre a par ailleurs confirmé son engagement sur le développement du numérique dans les "zones rurales et périphériques". Quelques dispositions devraient renforcer les effets des politiques publiques actuelles : ainsi, la nouvelle version du cahier des charges ouvrant droit aux aides du Fonds national pour la société de l'information (FSN), qui sera adopté d'ici quelques semaines, introduira de nouvelles mesures destinées à faciliter le raccordement des entreprises et des services publics locaux (voir ci-contre notre article du 11 septembre). Axelle Lemaire n'exclut pas d'étendre également les zones d'initiative publique à certaines zones périphériques situées dans les zones conventionnées (Amii), "si les opérateurs ne veulent pas y aller", y compris d'y convier d'éventuels investisseurs étrangers intéressés.

Projet de loi sur le numérique
Ce projet de loi sera déposé dans le courant du premier semestre et comportera trois axes : un volet innovation et croissance du numérique qui traitera principalement des questions économiques dans lequel il sera question de "libérer l'innovation" en faisant évoluer le cadre réglementaire de certains secteurs d'activité afin de les rendre plus compétitifs ; un volet juridique consacré aux données personnelles et à l'évolution de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) ; un volet relatif à l'action publique plus axé sur la réutilisation des données publiques produites par l'administration (Open data).

Téléphonie mobile et territoires
Cette problématique semble remonter sensiblement dans la hiérarchie des priorités nationales. Elle résulte d'une forte insatisfaction liée à la mauvaise qualité de la couverture mobile en milieu rural. Si les taux de couverture pour la 2G (99%) et la 3G (97%) atteignent un taux très élevé, le niveau de qualité perçu par les utilisateurs semble plutôt décevant. La ministre a confirmé ses préoccupations en la matière et son ambition "d'étendre la couverture mobile à l'ensemble du territoire d'ici la fin du quinquennat". Plusieurs mécanismes de financement sont étudiés pour raccorder les 175 communes encore dénuées de tout réseau. Par ailleurs, les opérateurs seront invités à faire preuve de plus de transparence sur la réalité de leur présence, et le niveau de couverture à l'intérieur des appartements devrait être sensiblement amélioré avec le déploiement de technologies d'amplification de type "Femtocell" (2). La ministre compte donc impliquer les opérateurs dans le cadre d'une stratégie nationale de couverture mobile plus volontariste.

Agence du numérique
Axelle Lemaire a confirmé le regroupement de trois structures au sein d'un service à compétence nationale qui dépendra du ministère des Finances : la mission très haut débit, la mission French Tech et la Délégation aux usages de l'internet rebaptisée pour l'occasion "Mission aux services et aux usages du numérique". L'agence, dont la date de création n'est pas précisée, ne viendra pas concurrencer les structures existantes mais assurera le lien direct avec les collectivités territoriales et les entreprises et sera en situation de "réactivité pour mener à bien les politiques publiques dont elle a la charge", a-t-elle assuré. Dans le cadre de cette Agence, la ministre prévoit notamment de réactiver le réseau des espaces publics numériques à travers la création d'un label de la médiation numérique qui impliquerait les différentes structures d'accompagnement et de tiers lieux (espaces publics, FabLabs, espaces de travail partagés, ateliers numériques) afin de mettre en valeur les pratiques et les initiatives locales.

Philippe Parmantier / EVS

(1) Communiqué publié le 27 octobre 2014.
(2) Un petit boîtier qui permet d'améliorer la couverture intérieure des réseaux de téléphonie mobile et d'utiliser son téléphone cellulaire à domicile, via une ligne fixe.