Plan de relance : un an après, la territorialisation au rendez-vous ?
Alors que le plan de relance souffle sa première bougie, un rapport de la délégation aux collectivités territoriales de l'Assemblée nationale montre que sa "territorialisation" est en bonne voie, grâce notamment à l'implication forte des collectivités. Il pointe toutefois un "succès en demi-teinte" des sous-préfets à la relance et avance des pistes d'amélioration.
C'était il y a un an jour pour jour. En lançant le plan de relance le 3 septembre 2020, le Premier ministre soulignait l'enjeu de la "territorialisation" des crédits (voir notre article). Un pari en passe d'être gagné, malgré les craintes maintes fois exprimées par les associations d'élus, si l'on en juge par la dernière contribution de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l'Assemblée nationale sur le sujet publiée mi-juillet 2021. Après un premier point d'étape publié en novembre 2020 soulignant les enjeux d'équité territoriale du plan de relance, les députées Catherine Kamowski (LREM) et Véronique Louwagie (LR) concluent à un "succès" et se félicitent de "la rapidité d’engagement des crédits" (35 milliards sur 10 à mi-mai) dans chacun des trois volets du plan (compétitivité, écologie, cohésion).
Le groupe de travail met par ailleurs l'accent sur l'implication financière des collectivités territoriales qui "se sont engagées à cofinancer un grand nombre de mesures du plan de relance" : 3 milliards d'euros d'investissements pour les deux années à venir dans le cadre de l'accord de relance signé entre la région Auvergne-Rhône-Alpes et l'État le 16 janvier 2021 par exemple, 13,8 milliards pour l'Île-de-France, ou encore 3,4 milliards pour la Bretagne…
Une attention portée à l'équité entre les territoires
"Au 30 avril 2021, 15 accords de relance ont été signés en région, signale le document, les régions ont engagé dans ce cadre 10 milliards d'euros sur les deux premières années." Le rapport souligne aussi la "mise en oeuvre rapide" des contrats de relance et de transition écologique (CRTE), au nombre de 842 au 20 juin 2021, même si ces derniers n'en sont encore qu'au stade des protocoles d'engagement. Cela représentait pourtant un réel défi, puisque "c'est la première fois qu'une démarche contractuelle entre l'État et les collectivités a vocation à couvrir l'intégralité du territoire", insiste le groupe de travail.
Il met aussi en avant le succès remporté par les 47 appels à projets déconcentrés, grâce au dialogue mis en place en amont avec l'État, et le suivi du plan de relance, réalisé via des indicateurs et données cartographiées. Le rapport souligne enfin l'attention apportée pour obtenir une forme d'équité entre les territoires. Face à des délais très longs entre l'idée et la réalisation d'un projet, dus au manque d'ingénierie, l'Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT) a rectifié le tir, prenant en charge les prestations d'ingénierie pour les communes de moins de 3.500 habitants et pour les EPCI de moins de 15.000 habitants, soit pour 32.000 communes en tout. Pour les autres, l'ANCT prend en charge une part du coût de l'accompagnement en ingénierie, en fonction de leur degré de fragilité et de la situation des contextes locaux.
Cette recherche d'équité se retrouve à tous les niveaux, d'après le groupe de travail, que ce soit au niveau des crédits attribués via la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) ou la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) ou par les opérateurs type Ademe. Exemple avec la répartition de la DSIL exceptionnelle : au 31 décembre 2020, plus de 574 millions d'euros de subventions sur un total de 950 millions avaient été accordés à 3.357 projets d'investissements. Ces crédits ont été principalement attribués à des projets dans les villes de moins de 3.500 habitants.
"Succès en demi-teinte" des sous-préfets
Toutefois, le rapport fait état d'un "succès en demi-teinte" du déploiement des sous-préfets à la relance. Trente jeunes hauts fonctionnaires ont été envoyés sur le terrain à partir de janvier 2021 pour fluidifier les relations entre l'État et les acteurs locaux dans le cadre du plan de relance. Si le groupe de travail souligne les points positifs de ces fonctionnaires (méthodes de travail nouvelles en matière de mise en réseau et de circulation de l'information), il pointe leurs difficultés à être opérationnels sur le terrain. Leur arrivée tardive par rapport au lancement du plan et leur "méconnaissance du tissu économique local" expliquent en partie ces difficultés. "Ce constat ne doit pas masquer la nécessité de renforcer les équipes préfectorales qui ont besoin de compétences, notamment en matière de développement économique local", souligne le rapport qui propose de pérenniser au sein des préfectures de département des postes ou des fonctions de sous-préfets développeurs en charge de l'animation économique locale.
Mais le succès de la territorialisation "devra aussi s’apprécier ex post en fonction de l’implantation des filières économiques sur le territoire", jugent les deux députées. Le gouvernement fera feu de tout bois la semaine prochaine pour vanter les effets du plan sur la réindustrialisation et les relocalisations. Le Premier ministre s'exprimera lundi devant le Conseil national de l'industrie, avant de se rendre à Roussillon (Isère) pour visiter un projet de réimplantation de production de paracétamol. Pour un bilan plus exhaustif, le premier rapport d'évaluation du comité national de suivi du plan France Relance attendu en octobre sera suivi de près.