Pilotage de France 2030 : quelle place pour les collectivités ?
Le député Bruno Bonnell a été nommé, mercredi 26 janvier, secrétaire général pour l'investissement, chargé du plan France 2030 annoncé par le président de la République le 12 octobre. Dès la semaine prochaine, il animera un "comité de lancement" avec l'ensemble des parties prenantes, pour définir la gouvernance de ce grand plan d'investissement de 30 milliards d'euros. Intercommunalités et régions sont sur les rangs pour défendre une approche territoriale.
Qui pour piloter le plan France 2030 présenté par Emmanuel Macron le 12 octobre ? Il s’agira du député LREM du Rhône Bruno Bonnell, nommé secrétaire général pour l’investissement en conseil des ministres ce 26 janvier. Il prendra officiellement ses fonctions le 31 janvier. Le député du Rhône de 63 ans a été choisi parmi une quarantaine de candidatures. Il est connu pour sa carrière dans les jeux en ligne (cofondateur des sociétés Infogrames et Atari) et la robotique. En 2019, il avait co-écrit avec Catherine Simon un rapport ("Robotique et systèmes intelligents") dans lequel il pointait les retards de la France dans la robotisation des processus industriels. Sa première tâche sera de définir la "gouvernance" de ce grand plan d’investissement de 30 milliards d’euros, qui a déjà démarré avec une première enveloppe de 3,5 milliards d’euros budgétés en 2022 et de nombreux appels à projets lancés dans tous les domaines.
Comité de lancement
Pour ce faire, un "comité de lancement" se tiendra "la semaine prochaine", indique Matignon. Il s’agira, selon la même source, de "réorganiser" et "clarifier" la place de chacun et d’arrêter une "stratégie de long terme plus transparente" pour ce plan qui vise à projeter l’économie française dans un horizon de dix ans, en positionnant la France dans une dizaine "d’innovations de rupture" (voir encadré ci-dessous) : hydrogène vert, mini-réacteurs nucléaires, "révolution" de l’agriculture, batteries, semi-conducteurs, robotisation, santé, etc. Et à faire émerger des "champions de demain"… après le dépeçage en règle des Alstom et autres Alcatel. Ce comité de lancement associera des parlementaires, les grandes organisations syndicales et patronales, les opérateurs et vraisemblablement les collectivités qui seront de toute façon parties prenantes dans la réflexion, comme l’avait indiqué le président de la République en octobre. "Les collectivités sont déjà associées aux programmes d’investissements d’avenir", souligne Matignon qui promet "plus d’ouverture", une logique "bottom up".
Ecosystèmes industriels
Les attentes des intercommunalités et des régions, déjà très impliquées dans le programme Territoires d’industrie, sont fortes dans ce domaine. Elles font notamment valoir que les dispositifs du type programmes d'investissements d'avenir ou crédit d’impôt recherche sont efficaces pour faire émerger des champions nationaux mais moins pour soutenir des entreprises industrielles plus modestes, qui ont du mal à se positionner dans les appels à projets nationaux. "Le programme doit élargir sa méthode et la gamme de ses interlocuteurs, sans quoi il risquerait de passer à côté de nombreuses difficultés, pépites et opportunités dans les territoires", prévenait ainsi Intercommunalités de France il y a quelques jours. "C’est en mettant autour de la table toutes les parties prenantes des écosystèmes industriels (entreprises, clusters, services et opérateurs de l’Etat, collectivités, et branches…) que le plan France 2030 dessinera une stratégie industrielle d’envergure, en mesure de concilier besoins immédiats et projets d’avenir." A partir des grandes priorités nationales, l’association plaide pour une gestion déconcentrée, via une contractualisation pluriannuelle. "Les 146 Territoires d’industrie (TI) constituent une machine à projets industriels n’appelant qu’à être alimentée par France 2030, dont ils pourraient constituer un versant", fait-elle valoir.
En attendant, le programme est déjà sur sa lancée avec une dizaine d'appels à projets sur les mini-lanceurs spatiaux, la sous-traitance automobile, les transferts de technologie, les compétences et métiers d’avenir, les stratégies de développement des établissements d’enseignement supérieur et de recherche... Ou, plus récemment, l'annonce d'un plan de 2,3 milliards d'euros sur cinq ans pour favoriser le développement des start-up industrielles. "Ca avance, se félicite Matignon. Avec l’arrivée de Bruno Bonnell, on va prendre un nouveau départ, avec de nouvelles séquences et de nouvelles annonces dans les prochaines semaines."
Aides d'urgence, plan de relance, France 2030… Dans un rapport publié en janvier 2022, la Direction générale des entreprises (DGE) dresse un tableau complet du soutien mis en place par l'Etat durant la crise covid et au-delà, pour relancer l'économie. Au total, près de 37 milliards d'euros de subventions ont ainsi été versés à plus de 2 millions d'entreprises depuis mars 2020 pour gérer l'urgence. D'après les estimations du Centre pour la recherche économique et ses applications (Cepremap), ces politiques de soutien ont permis non seulement de limiter la contraction du PIB mais aussi l'augmentation de la dette publique. En l'absence des mesures mises en place, la chute de l'activité économique au troisième trimestre 2020 est estimée à -37% par rapport à la situation d'avant-crise, contre une baisse de 17% observée. Même constat pour la dette publique : sans les mesures, la crise aurait amené à une hausse plus forte de la dette publique, près de 145% du PIB, contre 115%. Emilie Zapalski |