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Santé - Pharmacies : bien réparties sur le territoire mais... "tous les trois jours, une officine ferme"

Les pharmacies sont toujours "harmonieusement" réparties sur le territoire et leur nombre est quasiment stable, mais derrière ce constat "en trompe-l'oeil" se cachent des "signaux inquiétants" pour l'avenir de la profession liés à "de fortes recompositions", prévient le conseil national de l'Ordre des pharmaciens qui vient de publier son recensement annuel des pharmaciens au 1er janvier 2012. Avec, cette année, un intérêt particulier pour la dimension territoriale, puisque l'ordre met pour la première fois en ligne sur son site 21 fascicules régionaux.
Au 1er janvier 2012, on comptait en France 22.706 pharmacies (22.080 en métropole et 626 dans les départements d'outre-mer), soit une légère baisse (-0,5%) par rapport à l'année précédente. De même, le nombre de pharmaciens inscrits à l'ordre est quasiment stable, à 73.127 (-0,2%).
En termes de répartition territoriale, l'ordre constate que "les zones rurales ne sont pas désertées", sachant que plus d’un tiers des officines sont situées dans des communes de moins de 5.000 habitants. Grâce au dispositif de régulation qui les régit, les pharmaciens resteraient ainsi les professionnels de santé les mieux répartis.
On compte aujourd'hui une pharmacie pour 2.900 habitants (et un pharmacien d'officine pour environ 1.200 habitants) et plus de trois pharmacies pour 100 km2.
Du côté des signaux positifs, on remarque que les nouveaux titulaires d’officine ne désertent pas les zones rurales. Les pharmaciens titulaires de moins de 40 ans "ont tendance à privilégier la moitié nord de la France avec une préférence alternative marquée pour l’ouest normand ou pour le quart nord-est (Lorraine, Alsace, Bourgogne…) notamment dans les territoires les plus ruraux", détaille l'ordre.
Autre constat d'ordre géographique : la quasi-totalité des 292 transferts s’effectuent au sein de la même commune. Plus globalement d'ailleurs, il apparaît que la mobilité territoriale des pharmaciens est faible, la très grande majorité des étudiants en pharmacie choisissant, après l’obtention de leur diplôme, de s’inscrire dans la région où ils ont achevé leurs études.
On saura aussi que la répartition des officines par taille est évidemment elle aussi liée à des facteurs territoriaux ("aux territoires très ruraux et peu denses de la France de l’Ouest et du Centre, s’oppose une France du croissant Est-Midi, celle des frontières et du tourisme où les officines accueillent le plus souvent plus de deux pharmaciens").
Un autre chiffre, en revanche, vient assombrir le tableau : la disparition de 141 pharmacies en 2001 (contre 116 en 2010). "Tous les trois jours, plus d’une officine ferme", résume l'ordre. Des fermetures d'officines liées à "leur fragilité économique et non pour des raisons de santé publique", ce qui "pose problème quand une ville de 2.000 habitants avec des villages alentour se retrouve sans pharmacie", explique Isabelle Adenot, présidente de l'ordre, interrogée par l'AFP.
"Le pharmacien est un premier recours, un lien social indispensable. Il conseille, délivre des médicaments ou oriente vers un médecin, voire un hôpital", ajoute-t-elle, précisant que ce professionnel est "de plus en plus impliqué dans les soins de premier recours au niveau européen et mondial".
Au final, donc, "en apparence, rien ne bouge, mais il existe des signaux inquiétants pour les années à venir et même à très court terme", confirme Isabelle Adenot, qui souligne en outre que plus d'un quart des jeunes diplômés ne s'inscrivent pas à l'Ordre des pharmaciens à l'issue de leurs études. "On les retrouve dans tous les domaines : marketing, contrôle de gestion, etc.", déplore Isabelle Adenot. Selon elle, "ils sont inquiets pour l'avenir et lassés de toutes les suspicions qui entourent le médicament, malgré la confiance du public dans leur profession". Cette "fuite" des jeunes diplômés révèle un "défaut d'attractivité" de la profession, plus important chez les titulaires d'officine et les pharmaciens biologistes que chez les pharmaciens hospitaliers dont les effectifs sont en hausse (+4,4%). Elle s'inscrit dans un contexte de vieillissement de la profession qui "n'est pas enrayé" selon l'ordre : l'âge moyen est de 46,1 ans et un pharmacien titulaire d'officine sur trois a plus de 55 ans. L'ordre s'interroge aussi sur une "moindre attraction de l'exercice libéral", constatant une baisse du nombre d'inscriptions en sections A (pharmaciens titulaires d'officines) et G (pharmaciens biologistes libéraux). Ceci, même si "le niveau de désintérêt de l'exercice libéral n'atteint pas celui des autres professions de santé", comme les médecins.