Commande publique - Petits rappels sur les marchés de services juridiques
Le caractère sensible et confidentiel des prestations juridiques en font des contrats particuliers, parfois difficilement conciliables avec le droit commun des marchés publics. Pourtant ces marchés sont soumis, comme tout autre, aux principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures posés par l'article 1er du Code des marchés publics (CMP). Les députés Christian Vanneste et David Douillet ont donc demandé au gouvernement de les éclairer sur la procédure qu’une collectivité doit suivre pour choisir son avocat.
Les marchés de représentation juridique dépendent du régime dérogatoire de l’article 30 du CMP et peuvent être passés "quel qu'en soit leur montant, selon une procédure adaptée". La procédure classique se heurte en effet aux règles de déontologie attachées à la profession d’avocat, notamment le secret professionnel qui interdit de communiquer le nom des clients pour lesquels les candidats ont fourni des prestations similaires. Ainsi, pour évaluer les capacités professionnelles des soumissionnaires (art. 45-1 du CMP) et contrôler leurs aptitudes à traiter le dossier, le pouvoir adjudicateur peut demander que lui soient communiquées des conclusions dénuées de toute référence nominative. Pour évaluer les spécifications techniques à insérer dans le dossier de consultation, l’acheteur doit définir autant que possible ses besoins. Il faut ainsi déterminer le type de contentieux concerné (administratif, judiciaire, pénal...) pour indiquer la spécificité requise de l'avocat (droit public, droit privé…). De même, pour évaluer la durée de l’engagement nécessaire, l’acheteur vérifie s’il s’agit d’un besoin ponctuel ou récurrent (un seul dossier ou plusieurs sur une durée déterminée). Dans sa réponse, le ministère de l'Intérieur conseille de privilégier l’allotissement en divisant le marché en plusieurs lots selon les besoins spécifiques. Les besoins de la collectivité étant souvent amenés à évoluer dans le temps, le ministère conseille de "remettre fréquemment en jeu le marché initial" et de privilégier les accords-cadres.
Enfin, concernant l’attribution des marchés d'un montant supérieur à 193.000 euros, le Gouvernement rappelle qu'en vertu de l'article 30 du CMP, c’est à la commission d’appel d’offres d'attribuer les marchés de services juridiques et que l’acheteur doit publier - auprès de l’office des publications officielles de l’Union européenne et au Bulletin officiel - un avis d’attribution dans les 48 jours à compter de la notification (art. 85 du CMP). En revanche, le marché n’a pas besoin d’être soumis au contrôle de légalité, même lorsque son montant excède 193.000 euros. Il est exécutoire dès sa conclusion et n’est pas soumis au titre IV du CMP.
L’Apasp
Références : questions n°77004 du député David Douillet et n°75165 du député Christian Vanneste ; réponse publiée au JO du 24 août 2010, p.9338.
Réglementation :
- articles 30 et 85 du Code des marchés publics ;
- directive Services n°92/50 du 16 juin 1992 : c'est le premier texte imposant le choix d’un prestataire juridique à des contraintes procédurales ;
- directive n°2004-17 du 31 mars 2004 : elle distingue le service de conseil juridique du service de représentation légale ;
- décret n°98-111 du 27 février 1998 : les marchés de prestations juridiques sont soumis au CMP.
Jurisprudence :
- CE 6 mars 2009, commune d'Aix-en-Provence, n°314610 : le Conseil d'Etat autorise le pouvoir adjudicateur à demander à un avocat candidat de fournir des références nominatives, sous réserve que ces références aient été soumises à l'accord exprès et préalable de leurs clients :
- CE 9 juillet 2007, n°297711 : les juges confirment la compatibilité du CMP à la profession d’avocat ;
- CE 9 avril 1999, n°196177 : les marchés de prestations juridiques incluent les prestations de conseils et la représentation juridique mais excluent l’arbitrage et la conciliation.