Commande publique - Prestations juridiques : le pouvoir adjudicateur peut demander des références nominatives, assure le Conseil d'Etat
Le Conseil d'Etat vient de mettre un terme aux difficultés de conciliation ente le droit des marchés publics et le respect du secret professionnel des avocats. Dans un arrêt du 6 mars 2009, il autorise le pouvoir adjudicateur à demander à un avocat candidat à un marché public de fournir des références nominatives, sous réserve que ces références aient été soumises à l'accord exprès et préalable de leurs clients.
Dans cette affaire, une commune avait lancé une procédure de passation de marché de services de conseil et d'assistance juridique. Une société d'avocats évincée du marché avait saisi le juge des référés du tribunal administratif de Marseille d'une demande d'annulation de la procédure, au motif que la commune permettait aux candidats qui le souhaitaient d'assortir leurs références du nom des collectivités avec lesquelles elles avaient précédemment conclu un marché, après accord de ces dernières.
Le juge des référés, par une ordonnance en date du 12 mars 2008, a fait droit à cette demande sur le fondement de la jurisprudence du Conseil d'Etat du 7 mars 2005, Communauté urbaine de Lyon, au motif qu'il appartenait au pouvoir adjudicateur de s'abstenir d'imposer aux candidats des prescriptions qui les conduiraient à méconnaître les règles déontologiques ou légales s'imposant à leur profession. C'est d'ailleurs ce que le Minefe a préconisé dans une réponse écrite, le 26 février 2009, lequel ajoutait que les références produites par les avocats candidats aux marchés publics pouvaient être nominatives après accord préalable et exprès de leur client (voir ci-contre notre article du 4 mars).
Le Conseil d'Etat a censuré la décision du juge des référés. La Haute Cour a ainsi précisé qu'il convenait de faire la distinction entre, d'une part, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre son client et son avocat et, plus généralement, toutes les pièces du dossier qui sont couvertes par le secret professionnel au titre des dispositions de l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 et, d'autre part, l'existence même d'un marché de services juridiques conclu avec une personne publique. En effet, "la conclusion d'un tel marché ne peut légalement être confidentielle sous réserve des cas de secrets protégés par la loi". Par conséquent, une collectivité peut demander aux candidats de fournir des références de prestations similaires à celles demandées dans l'appel d'offres, c'est-à-dire d'indiquer, dans le cadre des règles déontologiques applicables à la profession d'avocat, les marchés de services juridiques similaires conclus par les intéressés, sous réserve que les références permettant d'identifier les personnes publiques concernées soient soumises à leur accord préalable et exprès, conformément à l'article 2.2 du Règlement intérieur national de la profession d'avocat.
Par ailleurs, le Conseil d'Etat profite de cette décision pour préciser que le pouvoir adjudicateur pouvait examiner, au cours d'une phase unique, la recevabilité des candidatures et la valeur des offres. Ainsi, il pouvait retenir, pour choisir l'offre économiquement la plus avantageuse, le critère tiré de l'expérience des candidats dans les domaines relevant dudit marché.
L'Apasp
Référence : Conseil d'Etat, 6 mars 2009, Commune d'Aix en Provence, 314610
Article 2.2 du Règlement intérieur national (RIN) de la profession d'avocat :
"Dans les procédures d'appels d'offres publics ou privés et d'attribution de marchés publics, l'avocat peut faire mention des références nominatives d'un ou plusieurs de ses clients avec leur accord exprès et préalable."