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Commande publique - Une conciliation difficile entre le droit des marchés publics et le secret professionnel des avocats

L'acheteur public ne doit jamais imposer aux avocats candidats aux marchés publics des références nominatives dans les documents de la consultation dès lors qu'elles sont couvertes par le secret professionnel. En revanche, les avocats candidats aux marchés publics peuvent, s'ils le souhaitent, produire des références nominatives après obtention de l'accord exprès de leur client.


Dans une question écrite, Jean-Louis Masson, sénateur de la Moselle, interrogeait la ministre de l'Intérieur sur la conciliation, dans le cadre de marchés publics de prestations intellectuelles à caractère juridique, de l'indication des références des candidats autorisée par le règlement intérieur du Conseil national des barreaux avec les dispositions de la loi 71-1130 du 31 décembre 1971 et la jurisprudence la plus récente du tribunal administratif de Marseille.
Dans sa réponse, en date du 26 février 2009, le ministère rappelle que la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques pose le principe du secret professionnel. Par ailleurs, la décision du Conseil d'Etat du 7 mars 2005, "Communauté urbaine de Lyon", précise que le principe du secret des relations entre l'avocat et son client ne fait pas obstacle à la production de références professionnelles "dès lors que les renseignements apportés ne comportent pas de mention nominative et ne permettent pas non plus d'identifier les personnes qui ont demandé les consultations au travers d'indications sur les circonstances dans lesquelles les conseils ont été donnés". C'est en application de cette jurisprudence que le tribunal administratif de Marseille (TA de Marseille, 12 mars 2008, société d'avocat L. c. Ville d'Aix-en-Provence, Gazette du Palais, Recueil mai-juin 2008) a rendu récemment une ordonnance annulant la procédure de passation d'un marché public. Cette jurisprudence semble, toutefois, ignorer l'article 2.2 du règlement intérieur du Conseil national des barreaux qui dispose que "dans les procédures d'appels d'offres publics ou privés et d'attribution de marchés publics, l'avocat peut faire mention des références nominatives d'un ou plusieurs de ses clients avec leur accord exprès et préalable ".
En l'état actuel de la jurisprudence, les services du ministère se montrent prudents et  préconisent ainsi aux acheteurs publics de toujours s'abstenir d'imposer des références nominatives dans les documents de la consultation dès lors qu'elles sont couvertes par le secret professionnel. En revanche, "les références produites par les avocats candidats aux marchés publics peuvent être nominatives s'ils obtiennent l'accord de leur client ou non-nominatives s'ils se voient refuser cet accord". Cet accord du client permet alors de considérer que la règle du secret professionnel n'a pas été méconnue.
Il est à noter que la décision du tribunal administratif de Marseille n'est pas confirmée à ce jour. Le Conseil d'Etat devrait se prononcer dans les prochaines semaines.


L'Apasp

 

Référence : réponse à la question écrite 06296 de Jean-Louis Masson (Moselle-NI), publiée dans le JO du Sénat du 26 février 2009 - page 500.

L'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971

"En toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil  ou celui de la défense, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses confrères à l'exception pour ces dernières de celles portant la mention 'officielle', les notes d'entretien et plus généralement toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel."

L'obligation d'aviser l'ancien cabinet d'avocat de la demande expresse formulée auprès du client

Il est important de préciser que l'alinéa 3 de l'article 2.2 du règlement intérieur du Conseil national des barreaux dispose que "si le nom donné en référence est celui d'un client qui a été suivi par cet avocat en qualité de collaborateur ou d'associé d'un cabinet d'avocat dans lequel il n'exerce plus depuis moins de deux ans, celui-ci devra concomitamment aviser son ancien cabinet de la demande d'accord exprès adressée à ce client et indiquer dans la réponse à appel d'offres le nom du cabinet au sein duquel l'expérience a été acquise".

 

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