PLF 2012 - Péréquation intercommunale : les sénateurs sortent de la logique des "strates"
Faut-il ou non organiser les prélèvements et les versements du fonds national de péréquation intercommunal en fonction de la taille des collectivités ? La question suscite depuis des mois une intense bataille entre les élus urbains et ceux du monde rural. Les sénateurs de la commission des finances n'ont pas souhaité rentrer dans ce débat, contrairement aux députés. Ils reprochent aux fameuses "strates" les effets de seuil auxquels ils conduisent. Le 15 novembre, ils ont donc décidé de leur substituer une solution qui s'applique déjà au calcul de la dotation de base des communes. Ce mécanisme consiste à majorer la population des territoires par un coefficient croissant en fonction de leur population. "Ainsi, le potentiel financier d'une grande ville pourra être comparé à celui d'une petite commune, sans que les effets liés à la taille de ces communes se fassent sentir", explique l'amendement adopté en commission, qui est issu d'une proposition du groupe socialiste.
Autre changement majeur décidé par la commission des finances : le potentiel financier servant de critère aux prélèvements et aux reversements serait remplacé par un "indicateur de ressources élargi" censé être plus représentatif des ressources effectives des collectivités. A l'inverse du potentiel financier, ce nouvel indicateur prendrait en compte les dotations de péréquation versées par l'Etat et les versements au titre du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle.
Par ailleurs, les sénateurs ont décidé que le fonds de péréquation serait doté d'1 milliard d'euros dès 2015, comme le projet de loi le prévoyait avant que les députés ne reculent l'échéance d'un an (lire ci-contre notre article du 4 novembre). En 2015, une "clause de revoyure" permettrait au Parlement d'"évaluer les effets des dispositifs de péréquation horizontale et verticale concernant les communes et leurs groupements. Les sénateurs sont aussi revenus à un prélèvement des territoires les plus riches plafonné à 15% de leurs recettes fiscales (contre 10% dans le texte voté par l'Assemblée).
Enfin, ils ont adopté un amendement fixant un objectif de réduction des inégalités de ressources entre les collectivités. Selon l'amendement, aucune commune ou aucun ensemble intercommunal ne devra avoir, dans un délai de dix ans, "un indicateur de ressources élargi par habitant, corrigé par les dispositifs de péréquation horizontale, inférieur à 80% de celui de sa strate démographique". Ce système, qui s'inspire de mécanismes en vigueur en Allemagne, a été préconisé par le Conseil des prélèvements obligatoires.
Thomas Beurey / Projets publics
Péréquation et communautés urbaines
Il n'était pas à Tours jeudi. Il était en revanche à Nice vendredi. Le ministre chargé des collectivités territoriales, Philippe Richert, n'avait pas pu se rendre au congrès de l'Association des régions de France (voir notre article ci-contre) mais a pu le lendemain se rendre sur un autre congrès qui se déroulait en même temps, celui de l'Association des communautés urbaines de France (Acuf).
Philippe Richert a entre autres assuré aux représentants des communautés urbaines qu'il restait "ouvert aux propositions d'amélioration" concernant le nouveau fonds de péréquation horizontal. Un dispositif dont les membres de l'Acuf affirment "l'injustice et les incohérences", celui-ci consistant à "prélever des territoires dont la richesse financière est inférieure à la moyenne au profit de territoires dont l'effort fiscal est inférieur à la moyenne". "Cette contradiction devra être levée dans les prochains jours. Des amendements vont être déposés au Sénat pour faire évoluer cela", a déclaré Gérard Collomb. Pour Michel Destot, président de l'Association des maires des grandes villes (AMGVF), présent à Nice, "ceux qui ont pris la responsabilité de prélever des impôts sont aujourd'hui pénalisés" et "il ne serait pas acceptable que l'effort fiscal de nos villes ne soit pas pris en compte". Il s'est aussi érigé contre "l'opposition stupide entre territoires, où les grandes villes seraient riches et les zones rurales seraient pauvres".
La déclaration finale des présidents des communautés urbaines demandant entre autres une révision des règles a également été signée par le député-maire (UMP) de Nice, Christian Estrosi, seul représentant de la majorité présidentielle au sein de l'Acuf.
C.M.