Finances locales - Péréquation, fiscalité... les députés jouent leur partition
Baisse des dotations
Lors de la discussion en séance du projet de loi de finances pour 2014, les députés ont approuvé, le 7 novembre, la baisse de 1,5 milliard d'euros en 2014 des dotations de l'Etat aux collectivités. Par l'adoption de trois amendements du gouvernement, ils ont, en outre, précisé les modalités concrètes de la baisse. S'agissant des communes et des EPCI, les recettes réelles de fonctionnement, qui servent de critère pour le calcul de la réduction des dotations, seront minorées du montant des "flux croisés" (attributions de compensation notamment). Des dispositions techniques ont par ailleurs été votées pour permettre le calcul de la baisse des dotations des communes ayant changé d'intercommunalité au cours des dernières années, de même que pour les intercommunalités dont le périmètre a évolué. Enfin, il a été décidé de prendre comme source d'information les comptes de gestion et non les comptes administratifs comme initialement prévu.
Péréquation entre collectivités
Les députés ont adopté une bonne partie des amendements modifiant les modalités du fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (Fpic) qui avaient eu les faveurs de la commission des lois lors de sa réunion du 28 octobre dernier (lire ci-contre notre article du 30 octobre 2013). Ils prévoient le relèvement de la condition de l'effort fiscal pour le bénéfice du Fpic, ainsi que l'assouplissement des règles d'adoption par les conseils communautaires des modalités de répartition libre des prélèvements et des reversements dans le cadre du Fpic. Les députés ont voté aussi en faveur de l'amendement relevant le niveau de richesse au-delà duquel les communes et les intercommunalités sont prélevés au titre du Fpic. Et ce malgré la demande de retrait du gouvernement. Selon Anne-Marie Escoffier, "le tiers des collectivités actuellement contributrices seraient exonérées à l’avenir", ce qui aboutirait à "une concentration des prélèvements sur un nombre réduit de collectivités". Les territoires urbains, notamment ceux d'Ile-de-France, seront davantage ponctionnés, ont souligné de concert Christine Pires Beaune, rapporteure spéciale de la commission des finances, et Gilles Carrez, président de cette même commission.
En revanche, l'amendement prévoyant que seules soient contributrices les communes membres d'un EPCI dont le potentiel financier est supérieur à 90% du potentiel financier moyen national a été retiré. Le but était d'exonérer de prélèvement les communes pauvres situées dans des EPCI favorisés financièrement. Le gouvernement s'est engagé à présenter des simulations et à aborder de nouveau le sujet "au plus tard dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015". Des amendements qui, d'après leurs auteurs, améliorent la répartition de la charge des prélèvements, tant pour le Fpic que pour le fonds de solidarité des communes de la région Ile-de-France (FSRIF) ont, par ailleurs, été adoptés.
Comme il s'y était engagé, le gouvernement a présenté un amendement précisant les contours du fonds de solidarité financière entre les départements d'Ile-de-France créé par le projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale. Les députés ont approuvé la création de ce fonds de 60 millions d'euros.
Communes nouvelles
A l'initiative de Jacques Pélissard, député et président de l'Association des maires de France, l'Assemblée nationale a décidé, avec l'avis favorable du gouvernement, de donner un coup de pouce à la création des communes nouvelles, nouveau type de collectivité territoriale prévu par la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités. Les communes nouvelles créées d'ici le 1er janvier 2016 et dont la population n'excédera pas 10.000 habitants ne pourraient pas subir de baisse de leur dotation globale de fonctionnement (DGF) durant les trois années suivant leur création. Ce qui est un avantage, puisque les dotations baisseront en 2015. En outre, pour l'heure, leur stabilité n'est pas garantie en 2016. Ces nouvelles collectivités nées de la fusion de plusieurs communes devraient, comme aujourd'hui, résulter du consentement de tous les conseils municipaux concernés. La douzaine de communes nouvelles nées en 2012 et 2013 bénéficieraient de cette garantie de ressources.
Un amendement déposé également par Jacques Pélissard visait à exonérer la commune nouvelle des frais liés à sa constitution. "Cette exonération est déjà prévue lorsque la commune est créée dans le périmètre d’une intercommunalité existante et il s’agirait de l’étendre à toutes les communes nouvelles", a-t-il expliqué. L'amendement a été déclaré irrecevable, parce qu'il crée une dépense supplémentaire (article 40 de la Constitution). Mais le gouvernement pourrait le présenter de nouveau dans le cadre de la discussion du collectif budgétaire qui aura lieu le mois prochain.
Des chantiers en suspens
L'Assemblée a rejeté un amendement UMP visant à maintenir le bénéfice de la fraction "bourg centre" de la dotation de solidarité rurale (DSR) pour les quelque 2.0000 communes qui perdront la qualité de chef-lieu de canton du fait du redécoupage cantonal. Ces dotations sont de toute façon garanties en 2015 et 2016, a répondu la ministre en charge de la décentralisation, Marylise Lebranchu. Celle-ci compte aborder la question dans le cadre du chantier qui aura lieu l'année prochaine sur la refonte de la DGF.
On notera enfin que le gouvernement a demandé le retrait d'un amendement PS prévoyant une nouvelle définition du potentiel fiscal des départements, outil de mesure de la richesse qui sert de référence dans le calcul des dispositifs de péréquation. Redéfini depuis la suppression de la taxe professionnelle, ce potentiel fiscal est considéré par beaucoup d'élus comme injuste. Anne-Marie Escoffier et Marylise Lebranchu se sont engagées à travailler sur cette question et en particulier à fournir des simulations d'ici la lecture au Sénat du projet de loi de finances 2014.
Thomas Beurey / Projets publics
La commission des finances de l'Assemblée adopte les articles non-rattachés du PLF
Le 6 novembre, la veille de l'examen en séance publique des crédits de la mission "Relations avec les collectivités territoriales" de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2014, les députés de la commission des finances adoptaient les articles non-rattachés de ce même PLF, après les avoir amendés et complétés par de nouvelles mesures. Plusieurs des articles concernent les finances locales.
La commission a modifié à sept reprises l'article 60, qui crée un
fond de soutien en faveur des collectivités ayant souscrit des emprunts structurés. Globalement, ces modifications apportent de la souplesse au dispositif, comme le souhaitaient les associations d'élus locaux, notamment l'Association des maires de France. Un amendement permet aux collectivités de continuer, au-delà de la période prévue au départ, de percevoir l'aide du fonds de soutien. Elle pourra ainsi attendre des conditions de marché plus favorables pour procéder au remboursement anticipé du ou des prêts toxiques. Un autre amendement prévoit la création dans la loi d'un comité d'orientation et de suivi, au sein duquel siègeront notamment des élus locaux, et qui sera chargé d'élaborer la doctrine d'intervention du fonds.
Le rapporteur général du budget a proposé de revaloriser forfaitairement les
valeurs locatives servant de base aux impositions directes locales de 0,9%, soit le taux d'inflation de l'année 2013. Son amendement a été approuvé.
Deux amendements identiques réparent un oubli concernant l'harmonisation des modes de financement du service public de
collecte et de traitement des déchets, lorsque celui-ci est financé par la redevance des ordures ménagères (Reom), dans le cadre d'une intercommunalité dont le périmètre a évolué.
La commission a encore voté pour un amendement permettant "le reversement de
la taxe d’aménagement d’une commune vers les EPCI ou groupements de communes dont elle est membre, et qui ont en charge, compte-tenu de leurs compétences, la réalisation d’équipements publics sur le territoire de cette commune".
Sur le sujet sensible de la
majoration de la taxe foncière des terrains non bâtis dans certaines communes, les députés ont voté deux amendements prévoyant un report d'un an de cette mesure. Jusqu'ici, le projet de loi de finances prévoit une majoration de 25% de la valeur locative cadastrale, qui sert d'assiette à la taxe sur les terrains non bâtis, et de 5 euros à partir de 2014 pour plus d'un millier de communes situées dans des zones où la demande de logement dépasse l'offre. Le report d'un an permettra, entre autres, "d'éviter des hausses brutales d'imposition pour les propriétaires de terrains constructibles, exploitants agricoles par exemple, pour lesquels aucune opération de construction n'est envisagée à court terme", ont expliqué les députés de l'UDI signataires de l'un des amendements.
Les députés n'ont pas modifié l'article permettant aux départements de relever temporairement le taux des
droits de mutation à titre onéreux. Le Premier ministre devait ce 8 novembre rendre des arbitrages sur une évolution des règles concernant cette disposition.
Les députés examineront en séance publique ces articles à compter du 14 novembre au matin.
T.B.