Patrimoine - Patrimoine mondial : pas d'inscription "en urgence" pour la grotte Chauvet
La manoeuvre tentée par la France pour accélérer l'inscription de la grotte Chauvet - une merveille de l'art pariétal située en Ardèche - a finalement échoué. Le 21 janvier 2012, le gouvernement français annonçait sa décision de présenter la candidature de la grotte Chauvet - et celle des vignobles de Bourgogne - au comité du patrimoine mondial de l'Unesco (voir notre article ci-contre du 23 janvier 2012). Les délais habituels d'instruction des dossiers font que ces deux candidatures devaient être examinées par le comité lors de sa session de l'été 2013.
Mais, dès le 1er mars 2012, le Centre du patrimoine mondial informait la France que le dossier d'inscription avait été jugé incomplet. Le gouvernement a alors tenté une manoeuvre pour faire non seulement passer la candidature, mais aussi avancer la décision à 2012. Dans sa réponse, la France a en effet affirmé que les conditions climatiques à l'intérieur de la grotte constituaient une telle menace imminente sur sa conservation que le dossier pouvait prétendre à la procédure de proposition d'inscription en urgence, prévue par les textes régissant le Comité du patrimoine mondial. Un classement dès 2012 était supposé permettre à la France de mobiliser la communauté scientifique mondiale pour traiter le problème.
L'Icomos - qui assure l'expertise des candidatures pour le compte de l'Unesco - a trouvé la ficelle un peu grosse. Dans leur rapport sur l'évaluation de cette demande de classement en urgence, les experts laissent d'ailleurs percer une certaine ironie : "Du point de vue de l'Icomos, les conditions climatiques et biologiques de la grotte Chauvet sont restées pratiquement inchangées depuis 20.000 ans, y compris les concentrations de CO2 et de radon." Dans ces conditions, la notion d'urgence - à un an près - ne semble pas franchement convaincante et le rapport de l'Icomos "considère que les conditions requises [...] ne sont pas pleinement remplies, car aucun dommage grave ou danger sérieux et précis menaçant la grotte Chauvet n'a été démontré" et "recommande que la grotte ornée Chauvet-Pont-d'Arc [...] ne soit pas inscrite sur la liste du patrimoine mondial sur la base d'un traitement en urgence".
Plutôt que de persister et de s'exposer à un rejet public lors de la 36e session du Comité du patrimoine mondial - qui se tient à Saint-Pétersbourg du 24 juin au 6 juillet 2012 -, la France a préféré retirer le dossier de la grotte Chauvet. Daniel Rondeau, l'ambassadeur de France auprès de l'Unesco, a ainsi indiqué à l'AFP que la France renonçait à l'inscription en urgence de la grotte Chauvet au titre de 2012. L'ambassadeur a toutefois confirmé que le dossier serait présenté à nouveau, selon la procédure normale, en 2013. Dès lors que le dossier aura été dûment complété et que les recommandations de l'Icomos auront été suivies, l'inscription de la grotte Chauvet ne fait guère de doute.
En attendant, seule la candidature du bassin minier du Nord-Pas-de-Calais sera examinée au cours de la session 2012 (voir notre article ci-contre du 11 juin 2012).