Finances publiques - Olivier Dussopt : "Le pacte financier peut aboutir si l'Etat bouge sur le projet de budget"
A quelques heures du début de la discussion budgétaire à l'Assemblée nationale, le président de l'Association des petites villes de France a dénoncé devant la presse des "chausse-trappes" et des "contraintes" nouvelles que le projet de loi de finances et le projet de budget pluriannuel introduisent selon lui pour les collectivités. Le pacte financier voulu par le président de la République pourra aboutir, estime-t-il, à condition que le gouvernement revienne sur certaines des mesures les plus discutables.
Le président de l'Association des petites villes de France (APVF) a souhaité, ce 17 octobre, le succès du pacte financier que le président de la République entend passer entre l'Etat et les collectivités territoriales. "J'espère que ça va aboutir", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse au siège de l'association à Paris.
Même si le gouvernement n'entend passer des contrats qu'avec les 319 collectivités territoriales les plus peuplées, ce qui exclut les villes de 3.500 à 25.000 habitants que l'APVF représente, les petites villes doivent se sentir concernées par l'effort de maîtrise des dépenses locales, a estimé Olivier Dussopt. Faire autrement "ne serait pas juste", a-t-il considéré.
Le député socialiste ne reproche pas aux présidents de région d'avoir claqué la porte de la Conférence nationale des territoires dont les réunions doivent permettre de préciser les modalités du pacte. "Je comprends la colère des présidents de région qui considèrent que la parole de l'Etat n'est pas honorée", a-t-il dit. En estimant que la cause du mécontentement des élus régionaux - à savoir l'absence de prise en compte des 450 millions d'euros du fonds de soutien au développement écononique dans la fraction de TVA affectée aux régions en 2018 - "peut être résolue". Il a "espéré" qu'entre l'Etat et les présidents de région, "le dialogue" soit "renoué".
"Un sentiment d'injustice"
L'Etat peut parvenir à conclure un pacte avec les collectivités à condition de "respecter la libre administration des collectivités territoriales" et de prendre en compte réellement les particularités propres à certaines, a-t-il détaillé. Il faudra aussi, a-t-il jugé, que l'Etat "se donne des marges de manoeuvre" et "la possibilité de bouger" notamment sur les dispositions du projet de loi de programmation des finances publiques (PLPFP) 2018-2022 qui concernent les collectivités locales.
En l'état, ces mesures ne suscitent guère d'enthousiasme chez les maires des petites villes. Elles nourrissent plutôt "un sentiment d'injustice". Au nom du redressement des finances publiques, "les collectivités sont sollicitées au-delà de leurs capacités et malgré les efforts déjà consentis", se plaignent les édiles. Avec le renforcement de la règle d'or (article 24 du PLPFP), "on fait porter l'effort de désendettement sur ceux qui portent l'investissement public et qui ont déjà contribué fortement à la baisse de la dépense publique", a pointé aussi le président de l'APVF. Qui dénonce à la fois un risque de "mise sous tutelle des collectivités territoriales" et la mise en place de mécanismes défavorables à l'investissement public local.
Par ailleurs, la rédaction de l'article 13 du projet de loi concernant le plafonnement de l'ensemble des concours financiers aux collectivités territoriales sur la durée du quiquennat doit d'urgence être clarifiée, a insisté Olivier Dussopt. En l'état, a-t-il expliqué, il n'est pas impossible que la fraction de TVA accordée aux régions - c'est-à-dire une ressource de nature fiscale - soit intégrée à l'enveloppe plafonnée des dotations de l'Etat aux collectivités. Le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), qui permet aux collectivités de récupérer une partie de la TVA qu'elles ont payée sur leurs investissements, pourrait aussi faire partie de cette enveloppe "normée". Si ces faits devaient être confirmés au cours de la discussion budgétaire au Parlement, ils seraient "totalement inacceptables", estime le député. Qui a appelé, si c'est nécessaire, à une modification des dispositions en question.
"Des inquiétudes au-delà de 2018"
Le président de l'APVF a encore dénoncé les "chausse-trappes" que comporte selon lui le projet de loi de finances pour 2018, telle que la prise en compte de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) dans les variables d'ajustement. Ce projet de loi de finances "ouvre des débats et des inquiétudes pour les années d'après", a-t-il aussi analysé. Selon lui, les doutes portent "principalement" sur la suppression progressive de la taxe d'habitation, notamment parce que le dégrèvement au profit des collectivités territoriales n'est pas complètement garanti à terme.
Le député a laissé entendre que la discussion parlementaire sur les textes financiers pourrait apporter quelques bonnes surprises. Le fonds de modernisation prévu pour un montant de 50 millions d'euros pourrait ainsi être "abondé", a-t-il confié.
Mission Richard-Bur : un engagement "à titre personnel"
Olivier Dussopt a commenté brièvement sa nomination au sein du comité d'experts de la mission préparatoire au pacte financier entre l'Etat et les collectivités territoriales que le Premier ministre a confiée au sénateur Alain Richard et au préfet honoraire Dominique Bur (voir notre article du 13 octobre 2017 :
Edouard Philippe lance la mission Richard-Bur). C'est "à titre personnel" que le député a accepté de participer aux travaux de la mission, "en réponse à une demande d'Alain Richard et du Premier ministre". Cette nouvelle responsabilité n'engage ni "mon groupe politique" (PS), ni l'APVF, a-t-il précisé. En disant vouloir "faire valoir une expérience de terrain" et s'inscrire en contrepoint des hauts fonctionnaires lorsqu'il le jugera utile.