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"Métiers territoriaux du grand âge" : quels leviers d'attractivité ?

Dans une étude publiée le 9 décembre, l'Observatoire MNT relaie les témoignages d'agents territoriaux du secteur du grand âge travaillant notamment dans des CCAS, des services d'aide à domicile et des Ehpad, et décrit les difficultés rencontrées par ces professionnels. Pour renforcer l'attractivité de ces métiers, les auteurs recommandent de prendre soin des professionnels via des revalorisations et des contrats stables, des organisations favorisant davantage l'autonomie des équipes, des politiques de prévention, d'accompagnement et de formation solides.  

"Parmi le 1,9 million d’agents territoriaux, 56.000 exerceraient uniquement sur le strict champ d’activité du grand âge (toutes structures et tous métiers confondus, y compris les métiers supports), dont 37.900 aides à domicile et 15.100 aides-soignants (AS)", selon des chiffres de 2019 du Centre national de la fonction publique territorial (CNFPT). Dans une étude publiée le 9 décembre 2022 et réalisée en partenariat avec l'Union nationale des centres communaux d'action sociale (Unccas), l'Observatoire mutuelle nationale territoriale (MNT) s'est intéressée à ces "métiers territoriaux du grand âge" et à ces "professionnels du lien en attente de stabilité".

Les auteurs, les journalistes Laurence Denès et Jean Dumonteil, ont pour cela réalisé une soixantaine d'entretiens avec des agents territoriaux, notamment des aides à domicile, des aides-soignants et des auxiliaires de vie sociale, "issus de structures" (CCAS, Ehpad, services à domicile…) et "de territoires variés". L'ambition de ce travail : éclairer "les pratiques et les difficultés rencontrées par ces personnels au quotidien" et contribuer à "changer le regard sur ces métiers du lien et du soin". Alors que ces métiers souffrent d'un déficit de reconnaissance et d'attractivité, il s'agit de "donner à voir, à travers l’enjeu de la dignité des personnes âgées, la dignité de celles et de ceux qui prennent soin d’elles".  

90% de femmes, 30% de contractuels

À l'appui également d'entretiens avec des experts, le rapport décrit ce "secteur éclaté au fonctionnement complexe", précisant par exemple que les centres communaux et intercommunaux d'action sociale (CCAS et CIAS) gèrent directement 700 établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et 600 résidences autonomie. Les auteurs rappellent que les difficultés de ce secteur sont structurelles et bien antérieures à la pandémie de Covid-19, avec par exemple un mouvement de grève dans les services d'aide à domicile de France en 2019 et une dégradation des conditions de travail qui était pointée en 2018 dans le rapport des députées Monique Iborra et Caroline Fiat. La crise du secteur est accentuée par un environnement complexe, le "pilotage multipartite" et le "financement disparate sur le territoire". 

Dans ce contexte, une vingtaine de métiers liés au grand âge sont identifiés par le CNFPT, dont les directeurs de CCAS, les aides médico-psychologiques, les infirmiers et les directeurs de foyers-logements, même si 95% des agents territoriaux dans ce domaine sont des aides à domicile – ou emplois proches tels que les auxiliaires de vie sociale, relevant de la catégorie C de la filière sociale – ou des aides-soignants – relevant depuis le 1er janvier 2022 de la catégorie B de la filière médicosociale. Plus de neuf agents territoriaux du grand âge sur dix sont des femmes, "jusqu’à 97% en ce qui concerne les aides à domicile". "Témoignant de la précarité du secteur, 30% des effectifs relèvent de la contractualisation, soit huit points au-dessus de la moyenne nationale", relèvent les auteurs.

Rendre ces métiers plus attractifs par davantage de stabilité, d'autonomie et d'innovation

Le rapport valorise l'engagement de ces professionnels confrontés à "l'urgence du quotidien", à la charge physique et émotionnelle de leur métier et au fait que les personnes, en particulier en Ehpad, sont de plus en plus vulnérables. "Selon France Alzheimer, 70% à 80% des résidents en Ehpad seraient atteints de troubles cognitifs", est-il rapporté. A cette évolution des publics répond une évolution des métiers : "Cela se traduit par moins de ménage de confort au profit de l’accompagnement de pathologies lourdes, de fins de vie et d’aide aux aidants familiaux", témoigne ainsi une directrice adjointe de CCAS. 

Face à la crise du recrutement et au turnover dans ce secteur, plusieurs recommandations sont formulées pour "offrir une certaine stabilité à ces postes ainsi qu’une meilleure qualité de vie au travail aux agents". À commencer par une "déprécarisation" de ces métiers via une revalorisation des rémunérations et une "titularisation massive" des personnels en CDD. Certains CCAS passent par la voie de la mutualisation entre employeurs, notamment via la création d’un Groupement d’employeurs pour l’insertion et la qualification (Geiq), "pour assurer des temps pleins et fidéliser les agents".

Autres "leviers d'attractivité" mis en avant : l'accompagnement des jeunes recrues, la formation, une meilleure adaptation des jours et horaires aux contraintes des professionnelles ou encore une organisation favorisant davantage l'autonomie et le travail en équipe sur le modèle des communautés de soins infirmiers Buurtzorg aux Pays-Bas. Les auteurs appellent également à "faciliter la mobilité des agents entre Ehpad et domicile" et à expérimenter de nouvelles formes de structures comme les "Ehpad hors les murs". Ou encore à "institutionnaliser" de nouveaux métiers tels que le "care manager" qui, au Danemark, est celui qui suit le parcours d'une personne âgée et coordonne les interventions à domicile. Pour une politique de prévention visant à réduire la pénibilité de ces métiers, il est enfin recommandé de miser sur des innovations technologiques ayant déjà fait leurs preuves.