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Emploi - Maisons de l'emploi : des fermetures en cascade... en attendant une éclaircie ?

Plusieurs maisons de l'emploi s'apprêtent à fermer leurs portes d'ici la fin de l'année en raison du désengagement de l'Etat. Pourtant, selon leur réseau Alliance Villes Emploi, la tendance pourrait s'inverser. L'association fonde ses espoirs sur le rapport d'évaluation du Conseil national de l'emploi, favorable à ces structures, appelant à une stabilisation de leurs finances.

La maison de l'emploi de Givors, dans le Rhône, va fermer ses portes à la fin de l'année 2014. La décision vient d'être prise par le conseil d'administration. En cause : le désengagement de l'Etat. Selon Martial Passi, maire de Givors, récemment interrogé par l'AFP, le financement, quasi exclusivement assuré par l'Etat et la ville depuis sa création, "s'est fragilisé, au point de devenir critique avec l'annonce il y a quelques mois de la diminution (-10% en 2014 , -70% en 2015), et même de la suppression des subventions de l'Etat allouées à toutes les maisons de l'emploi". "Les publics pourront se tourner vers les missions locales ou Pôle emploi, précise-t-on à la mairie, cela va poser des problèmes supplémentaires, et cela n'aide pas du tout l'emploi !" La commune affiche un taux de chômage compris entre 15% et 16%...
La maison de l'emploi de Givors n'est pas un cas isolé. D'autres structures, parmi les 182 maisons de l'emploi existantes, ont les mêmes difficultés et ont décidé de fermer. C'est le cas de la maison de l'emploi d'Alençon créée en 2006, qui, faute de crédits, va elle aussi cesser ses activités le 31 décembre 2014, avec six salariés à reclasser. Les subventions de l'Etat pour cette maison de l'emploi sont passées de 100.000 euros annuels à 50.000 euros. Le reste du budget est pris en charge par la ville (80.000 euros) et la région (25.000 euros), mais aucune de ces collectivités ne souhaite prendre le relais de l'Etat. Les sommes issues de l'Europe (53.000 euros) ne peuvent elles non plus compenser le désengagement de l'Etat…
A Argentan, la fermeture de la maison de l'emploi à la fin de l'année 2014 a été prononcée en juin 2014 lors de l'assemblée générale de l'association. L'Etat a divisé par deux sa subvention (de 130.000 à 50.000 euros). Les collectivités, communauté de communes du pays du Camembert et ville d'Argentan, ne peuvent plus pallier ce désengagement.
D'autres décident d'arrêter leur activité d'accueil. La maison de l'emploi et de la formation professionnelle (MDEFP) de Loudéac a fait ce choix. Depuis le 1er juillet, la structure n'a plus de personnel d'accueil et son espace multimédia est également hors service pour les usagers. Elle a recentré ses activités sur des missions de GPEC, suivant les exigences du nouveau cahier des charges des maisons de l'emploi.

Des ministres acquis à la cause des maisons de l'emploi

Pourtant, malgré ces annonces de fermetures en cascade, Marie-Pierre Establie d'Argencé ne se décourage pas. La déléguée générale d'Alliance Villes Emploi considère que le phénomène n'est pas si important et concerne souvent des territoires où les élus n'étaient pas totalement convaincus de l'intérêt de ces structures. "Cela arrive, ce n'est pas grave", assure-t-elle. AVE place ses espoirs dans le rapport de Patricia Bouillaguet, personnalité qualifiée du Conseil national de l'emploi (CNE), remis le 1er juillet au ministre du Travail (voir notre article ci-contre). Le rapport met en avant l'utilité des maisons de l'emploi, et indique notamment qu'aucun des partenaires interrogés ne souhaite leur disparition. Il propose une période transitoire de deux ans, durant laquelle l'Etat devrait maintenir le cahier des charges de ces structures et leur financement. "Les maisons de l'emploi ne sont pas toutes parfaites, mais elles ont une vraie utilité, le rapport le dit bien, signale ainsi la déléguée générale d'AVE, plusieurs maisons de l'emploi ont décidé de fermer mais en fin d'année, les décisionnaires vont peut-être revenir sur leur choix."
Le budget des maisons de l'emploi est passé de 82,2 millions d'euros en 2010 à 26 millions d'euros en 2014, auxquels s'ajoutent 10 millions d'euros pour des actions liées à la GPEC…
Marie-Pierre Establie d'Argencé, dont l'association a récemment rencontré François Rebsamen, ministre du Travail, espère un retournement de situation, avec des budgets supplémentaires pour les années à venir. D'après elle, le ministre est acquis à la cause, même s'il doit tenir compte des contraintes budgétaires. "Il nous a promis son soutien, et Carole Delga, nouvelle secrétaire d'Etat à l'économie sociale et solidaire, est elle aussi acquise à notre cause", assure-t-elle. Preuve en est la réapparition des maisons de l'emploi dans le projet de loi sur l'économie sociale et solidaire, dans le cadre de la mise en oeuvre des clauses sociales. Durant les discussions, les structures avaient disparu du texte, pour revenir dans la version validée le 17 juillet 2014 par la commission mixte paritaire.
Pour AVE, les maisons de l'emploi vont toutefois devoir se réorienter vers leurs nouvelles missions : moins d'accueil du public, plus de GPEC, et aussi "un vrai rôle, en lien avec les régions, sur l'évolution professionnelle, dans le cadre du conseil en évolution professionnelle (créé par la loi de 2013 sur la sécurisation de l'emploi), détaille Marie-Pierre Establie d'Argencé, certaines régions choisissent de mandater leurs maisons de l'emploi sur cette thématique."