Ressources humaines - Lutte contre les discriminations : le Label Diversité, un outil à saisir pour les collectivités
Lundi 18 avril, Nantes Métropole, le conseil départemental de Seine-Saint-Denis, et seize autres organismes publics et privés, ont reçu le "Label Diversité" des mains de Myriam el Khomri, ministre du Travail et Annick Girardin, ministre de la Fonction publique. Il récompense leur "engagement collectif et volontaire" pour la promotion de la diversité et la prévention des discriminations dans le cadre de la gestion des ressources humaines. Coup de projecteur sur une démarche encore rare dans les collectivités, que le gouvernement souhaite amplifier et encourager, dans la droite ligne des objectifs rappelés lors du 3e Comité interministériel égalité et citoyenneté (voir ci-contre notre article du 14 avril).
Faire connaître les pratiques "valorisant la diversité"
Créé en 2008, le Label Diversité vise à prévenir les discriminations et à promouvoir la diversité dans les secteurs publics et privés. Cette certification délivrée par Afnor Certification "reconnaît et fait connaître les bonnes pratiques de recrutement et d'évolution professionnelle valorisant la diversité" dans la sphère du travail. Le Label Diversité concerne tous les types d'employeurs : entreprises, administrations, collectivités territoriales, établissements publics, associations. Il est valable quatre ans, avec un audit de contrôle au bout de deux ans.
D'après la DGAFP, qui co-préside la commission de labellisation au titre de la fonction publique, ce label permet de vérifier, et le cas échéant, d'améliorer les processus RH afin de prévenir ou de corriger les mécanismes de discrimination, en "examinant l'ensemble des critères de discrimination définis par la loi, dont l'âge, le handicap, l'origine, le genre, l'orientation et l'identité sexuelles, les opinions syndicales ou religieuses".
S'inscrivant dans la continuité de la Charte de la diversité en entreprise de 2004, il se veut aussi un des leviers de mise en œuvre de la Charte pour la promotion de l'égalité et la lutte contre les discriminations dans la fonction publique, promue par le ministère en charge de la fonction publique et le Défenseur des droits (voir ci-contre notre article du 18 décembre 2013).
Peu de collectivités se sont pour l'instant engagées dans cette démarche longue et exigeante. Elle implique en effet, explique Afnor Certification, une forte maîtrise des services RH, et s'avère de ce fait difficile à mettre en oeuvre dans une structure étendue, que cela soit par ses effectifs ou son éclatement géographique. Cette démarche suppose aussi une conviction forte de la personne qui préside la collectivité, et doit "porter" le projet.
Dans la Seine-Saint-Denis, une démarche militante
Dans le cas de la Seine-Saint-Denis, souligne Frédéric Oyhanondo, directeur général adjoint en charge du pôle personnel et relations sociales du conseil départemental, la démarche a été soutenue par Stéphane Troussel, président du conseil départemental, qui avait auparavant piloté l'agenda 21 des services et était de ce fait convaincu de l'importance de cette action. Elle s'inscrit dans un processus engagé ces dernières années au sein de la collectivité afin d'améliorer sa politique de lutte contre les discriminations, dans tous les domaines de l'action départementale, et constitue un objectif politique fort.
Le département s'est voulu exemplaire dans ses pratiques de recrutement, de promotion interne, et de lutte contre les discriminations au travail. De ce fait, il voit dans l'obtention du Label Diversité une légitimation de sa démarche "en apportant la preuve qu'il s'applique à lui-même les exigences éthiques qu'il avance dans les actions qu'il entreprend sur le territoire", notamment vis-à-vis des entreprises et des services déconcentrés de l'Etat, dont il attend un engagement similaire. La labellisation obtenue concerne les services employant 50% des personnels du conseil départemental. Il se fixe désormais comme objectif de passer à 100% en 2018, ce qui incluerait notamment les personnels de la collectivité affectés en collège.
Allier "Diversité" et "Egalité"
Le processus de certification comporte une phase de diagnostic "sans concessions", insiste Frédéric Oyhanondo, qui a été l'occasion pour la collectivité d'identifier les points forts sur lesquels elle pouvait s'appuyer, mais aussi des domaines où sa politique RH était perfectible. En l'occurrence, des dispositifs égalité femmes/hommes à formaliser plus avant, les problématiques liées aux "questions de laïcité" et au handicap.
Le conseil départemental a ainsi développé un dispositif de maintien dans l'emploi des personnels ayant obtenu la qualité de travailleur handicapé (RQTH), qui implique souvent un reclassement sur un nouveau poste. Après une formation adaptée et un parcours qui peut durer dix-huit mois, les agents, qui bénéficient également d'un tutorat, sont prioritaires à la mobilité interne. La mise en place de ce dispositif s'est accompagnée d'un important travail de pédagogie à l'égard des directions du conseil départemental, afin de les convaincre d'examiner les candidatures de ces agents sans a priori.
Lors du 2e Comité interministériel égalité et citoyenneté du 6 mars 2015, le gouvernement a décidé que les ministères évalueraient leurs procédures en matière de gestion des ressources humaines afin de candidater au Label Diversité d'ici à la fin de 2016. Ils sont invités à rechercher simultanément une double labellisation, Diversité et Égalité entre les femmes et les hommes. Les collectivités territoriales sont également encouragées à obtenir cette labellisation (voir ci-contre notre article du 11 mai 2015). La réalisation de cet objectif se veut facilitée par le rapprochement entre les deux labels, effectif depuis janvier 2016 : un cahier des charges en sept points, adapté aux trois versants de la fonction publique, est désormais commun.
Laurent Terrade
Peu d'organismes publics labellisés pour l'instant
Outre Nantes Métropole et le conseil départemental de Seine-Saint-Denis, les premières structures labellisées Diversité dans la fonction publique sont : les ministères économiques et financiers (2010), les ministères sociaux (2012), trois agences régionales de santé (ARS) (2012 et 2015), le Conseil supérieur de l'audiovisuel (2012), la ville de Lyon (2010), la ville de Nantes (2012), ainsi que le Centre hospitalier de Brie-Comte-Robert, l'Établissement public gérontologique de Tournan-en-Brie (2012) et le Centre hospitalier de Jouarre (2016).
L. T.