Lutte contre l’artificialisation des sols : vers des zones préférentielles de renaturation dans les documents d’urbanisme
Afin d'améliorer la planification et la mise en oeuvre des opérations de renaturation, permettant de restaurer certaines continuités écologiques ou d'insérer des espaces de verdure au coeur d'un périmètre urbain, des zones préférentielles peuvent désormais être identifiées au sein des schémas de cohérence territoriale (ScoT). Un projet de décret mis en consultation articule cette nouvelle faculté avec la prescription des mesures compensatoires des atteintes à biodiversité.
Alors que le gouvernement a annoncé le 14 juin dernier le lancement d'un fonds de 500 millions d'euros pour la "renaturation des villes" (lire nos articles des 14 et 16 juin), le ministère de la Transition écologique organise, jusqu’au 13 juillet prochain, une consultation publique sur un projet de décret pris en vertu de deux dispositions de la loi Climat et Résilience et visant à favoriser la renaturation de terrains urbanisés comme levier de "désartificialisation" dans les documents d’urbanisme.
La première disposition (article 197) donne aux schémas de cohérence territoriale (SCoT) la faculté d’identifier, au sein du document d'orientation et d'objectifs (DOO), des zones préférentielles pour la renaturation, par la transformation de sols artificialisés en sols non artificialisés, en lien avec l'objectif de protection de la biodiversité, des continuités écologiques et de la ressource en eau. Elle prévoit de même pour les orientations d'aménagement et de programmation (OAP) des plans locaux d’urbanisme (PLU) qui peuvent désormais porter sur la renaturation de quartiers ou de secteurs. La seconde (article 214) renforce les obligations d'évaluation préalable applicables aux projets d’aménagement, en instaurant une étude dédiée à l’optimisation de la densité des constructions, ce potentiel de "densification" tenant compte de la qualité urbaine ainsi que de la préservation et de la restauration de la biodiversité et de la nature en ville.
Mieux cibler la compensation
La réforme entreprise par la loi Elan pour moderniser les ScoT a fait apparaître la notion de "lutte contre l'artificialisation" parmi les objectifs de politique publique qui y sont déclinés. Elle a également étoffé leur contenu en matière de transition écologique, de valorisation des paysages et de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, c’est-à-dire entre autres concernant les trames vertes et bleues. Les collectivités territoriales mettent d’ailleurs déjà en oeuvre de nombreuses actions de renaturation et de restauration des continuités écologiques, à l’exemple du SCoT du Pays de Rennes via la création de corridors verts à travers la zone urbaine pour relier la forêt de Rennes, au nord-est de la ville, et la vallée de la Vilaine, au sud-ouest. Toutefois, les initiatives de renaturation sont souvent menées projet par projet, à l'échelle individuelle, ou portées par les collectivités territoriales compétentes (le département ou les EPCI principalement). Il est donc apparu pertinent de développer la planification de ces opérations dans les documents d’urbanisme (ScoT et PLU), pour viser une plus grande cohérence d'ensemble et une meilleure efficacité, et de fournir dans la loi Climat et Résilience de nouveaux outils aux collectivités à cette fin.
Ce dispositif prévoit en outre que les mesures de compensation des atteintes à la biodiversité (la fameuse séquence "Eviter-Réduire-Compenser"- ERC) soient mises en oeuvre en priorité - lorsqu’elles ne sont pas mises en oeuvre directement sur le site concerné - sur les zones préférentielles de renaturation identifiées par les SCoT et par les OAP des PLU. Cette articulation doit permettre de mieux cibler les efforts individuels de compensation, et de combiner les initiatives des collectivités et les actions des aménageurs privés. Bien entendu, les compensations prescrites n'étant pas toujours compatibles avec les sites et modalités de renaturation envisagées par les SCoT et PLU, le texte précise que cette priorité ne s'applique que lorsque les orientations de renaturation et la nature de la compensation prévue pour le projet "le permettent". L’objet du projet de décret en consultation est ainsi de "lever la difficulté d’une double priorisation", souligne le ministère, en rappelant le nécessaire respect du principe de proximité avec le site endommagé.
Obligation de réaliser une étude d'optimisation de la densité des constructions
Pour les actions ou opérations d’aménagement soumises à évaluation environnementale, une étude de faisabilité sur le potentiel de développement en énergies renouvelables (ENR) de la zone était déjà prévue. L’article L. 300-1-1 du code de l’urbanisme - introduit là encore par la loi Climat et Résilience - regroupe la nouvelle obligation d’étude d’optimisation de la densité des constructions et celle, déjà existante, d'étude de faisabilité "ENR", étant entendu qu'elles s'appliquent aux mêmes types de projets. Le projet de décret complète en conséquence le contenu de l’étude d’impact (à l'article R. 122-5 du code de l’environnement) en y intégrant sans davantage de précision les conclusions de l’étude d’optimisation de la densité des constructions dans la zone concernée.