Lutte contre l’artificialisation des sols : l’ordonnance simplifiant les procédures d’urbanisme et environnementales en consultation
Un projet d’ordonnance relatif à la rationalisation des procédures d’urbanisme et environnementales pour des projets en faveur de la lutte contre l’artificialisation des sols est soumis à consultation jusqu’au 9 mai. L’objectif est d’optimiser les gisements fonciers déjà artificialisés dans le cadre d’opérations d’aménagement associant étroitement Etat et collectivités territoriales.
Un engagement a été pris dans la loi Climat et Résilience d’atteindre le zéro artificialisation nette (ZAN) en 2050, en s’appuyant sur un premier objectif intermédiaire de réduction de moitié du rythme de la consommation d’espaces dans les dix prochaines années. Dans le prolongement des dispositions déjà inscrites dans le dur du texte pour lutter contre l’artificialisation des sols, l’article 226 prévoit une habilitation à légiférer par ordonnance pour faciliter les projets "vertueux" sur des terrains déjà artificialisés et dans les secteurs à enjeux faisant notamment l’objet d’un protocole ou d’une convention entre l’Etat et les collectivités, c’est-à-dire dans les périmètres d’opérations de revitalisation de territoire (ORT), de grandes opérations d'urbanisme (GOU) ou d'opérations d'intérêt national (OIN). C’est l’objet du projet d’ordonnance, mis en consultation jusqu’au 9 mai prochain, pour rationaliser, autrement dit simplifier et accélérer, les procédures d'autorisation, de planification et de consultation prévues au code de l'urbanisme et au code de l’environnement. Avec toutefois pour garde-fou "de ne pas opérer des transferts de compétences entre les collectivités, leurs groupements ou l'Etat, ni de réduire les compétences des EPCI ou communes compétents en matière d’urbanisme" d’une part, et, d'autre part, "sans régression du niveau de protection de l’environnement", souligne le ministère de la Transition écologique.
Accélérer la procédure d’autorisation environnementale
La technique est désormais bien rodée. Comme pour d’autres précédents (pour un projet de création d’unités touristiques nouvelles soumis à autorisation, par exemple), l’ordonnance (art. 1 et 2) propose ainsi de remplacer - pour les projets ayant fait l’objet d’une présentation préalable en commission de suivi de site au sens de l’article L. 125-2-1 du code de l’environnement - l’enquête publique par une procédure dématérialisée de participation du public par voie électronique. Compte tenu de la spécificité des projets de recyclage foncier, le projet d’ordonnance (art.3) autorise également la reconnaissance de la raison impérative d’intérêt public majeur de l’opération au stade d’une déclaration d’utilité publique (DUP), au titre d’une des trois conditions cumulatives pour disposer d’une dérogation au régime d'interdiction d’atteinte aux espèces protégées, sans que cela ne remettre en question la nécessité de répondre aux deux autres critères dans un second temps (pas d'autre solution satisfaisante et la dérogation ne nuit pas au maintien de la population des espèces concernées dans un état de conservation favorable).
Faciliter le recyclage foncier
Les modalités de consultation des opérations d’intérêt national (OIN) "particulières" mentionnées à l’article L. 741-2 du code de la construction et de l’habitation - à savoir les opérations de requalification des copropriétés dégradées d'intérêt national - ne sont pas strictement les mêmes que celles prévues pour les OIN "classiques" à l’article L. 102-12 du code de l’urbanisme "et toutes les collectivités concernées ne sont donc pas forcément consultées", explique la notice de présentation. L’ordonnance (art.4) permet donc une mise en cohérence des procédures ainsi que la fixation d’un délai (de trois mois à compter de la saisine) aux collectivités pour rendre l’avis.
Le texte réintroduit par ailleurs la mesure permettant l’installation de panneaux photovoltaïques sur des friches en zone littorale, selon une liste fixée par décret pris après concertation avec le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres. La dérogation qui figurait déjà dans la loi Climat et Résilience a été censurée par le Conseil constitutionnel au titre des cavaliers législatifs. La proposition de loi de Didier Mandelli (LR, Vendée), votée en première lecture au Sénat en février dernier, qui reprenait l’essentiel du dispositif n'a pas pu aboutir avant la fin de la législature. Aussi, l'ordonnance (art.5) intègre-t-elle la mesure de ladite proposition de loi, à laquelle le gouvernement était globalement favorable, en la limitant néanmoins aux opérations mentionnées (OIN, GOU et ORT).
L’OIN est ajoutée (art. 6) à la procédure intégrée pour les projets qui en assurent la mise en œuvre et ce sur des espaces déjà artificialisés. Cette procédure prévue à l’article L.300-6-1 du code de l’urbanisme présente l’avantage sur une déclaration de projet de pouvoir adapter plus rapidement les documents de planification en amont. Initialement réservée au logement (PIL), son application a été progressivement étendue à d’autres opérations d’aménagement et de constructions : unités touristiques nouvelles (PIUTN) en montagne, GOU (PIGOU), ORT (PIORT).
Pour les GOU, l’ordonnance (art. 7) étend la dérogation déjà ouverte aux ORT par la loi 3DS pour faciliter les projets de recyclage urbain pour des constructions dont la destination n’est pas autorisée par le document d’urbanisme, dès lors qu’elle contribue à la mixité fonctionnelle du secteur concerné. Le texte intègre également aux GOU une autre particularité applicable aux ORT depuis la loi Elan s’agissant cette fois de la procédure de déclaration de biens en état d’abandon manifeste. Dans le périmètre d'une ORT, l’abandon manifeste d'une partie d'immeuble est en effet constaté dès lors que des travaux ont condamné l'accès à cette partie de l’immeuble (article L. 2243-1-1 du code général des collectivités territoriales).
Favoriser la mobilisation du foncier pour un usage temporaire et la densification
Enfin, deux autres mesures de rationalisation des procédures d’autorisation d’urbanisme sont prévues (art.8). L’une reprend peu ou prou une préconisation de la commission pour la relance durable de la construction de logements, présidée par François Rebsamen, le maire de Dijon, et propose d'étendre jusqu'à quatre ans la durée d'implantation en-deçà de laquelle une construction temporaire implantée sur des terrains déjà artificialisés est dispensée de formalités d’urbanisme, et ce dans le périmètre d’une OIN, d’une GOU ou des secteurs d’intervention d’une ORT. Pour rappel, l’article R. 421-5 du code de l’urbanisme permet déjà la dispense des constructions implantées pour une durée n’excédant pas trois mois. Un décret n° 2021-812 du 24 juin 2021 a porté temporairement (jusqu’au 31 décembre 2022) à 18 mois cette durée maximale pour les constructions temporaires lorsqu'elles sont exclusivement à usage de résidences universitaires, résidences sociales, centres d’hébergement et de réinsertion sociale et structures d’hébergement d’urgence.
L’autre mesure vise à améliorer la densification en zone pavillonnaire. Ainsi, il est dérogé au dispositif existant de majorité qualifiée des deux tiers, pour y substituer "une majorité qualifiée à la moitié" dans le cas où le maire souhaite augmenter le nombre de lots, par rapport au nombre prévu initialement dans le lotissement issu d’un permis d’aménager, afin de permettre les subdivisions de lots.