Habitat - L'Unpi veut "ubériser" le logement social
L'Union nationale de la propriété immobilière publie une série de propositions en matière de logement. Au-delà de revendications classiques, certaines mesures sont plus inédites, dont la possibilité pour les bailleurs privés d'opter pour le statut d'auto-entrepreneur ou de bénéficier d'une partie des avantages des organismes HLM. Encore moins consensuel : lancer des logements low-cost, supprimer le permis de construire dans certaines zones...
Profitant de la période électorale, l'Union nationale de la propriété immobilière (Unpi) - principal représentant des propriétaires bailleurs privés -, entend bien faire entendre sa voix. L'association publie donc une brochure très argumentée, intitulée "Politique du logement : entrer en modernité". Certes, la modernité revendiquée n'est pas vraiment sans rapport avec les intérêts matériels des propriétaires. On y trouve donc sans surprise - à travers quinze "mesures d'urgence", déjà présentées, et sept nouvelles "mesures phares" - la suppression de l'ISF, le blocage de l'augmentation de la taxe foncière, l'abaissement du taux de l'impôt sur les société de 33,33% à 19%, la réduction "drastique" des droits de mutation pour les primo-accédants, mais aussi la suppression de l'encadrement des loyers et du volet de la loi Alur sur les rapports locatifs ou encore le retour à deux mois de la caution locative. Le plaidoyer pro domo ne fait donc pas vraiment dans la nuance...
Un statut d'auto-entrepreneur pour les propriétaires bailleurs
Certaines des "mesures phares" proposées méritent toutefois qu'on s'y attarde. L'Unpi propose ainsi d'étendre le statut d'auto-entrepreneur, en l'adaptant aux bailleurs privés. Ce qui aurait pour les propriétaires l'avantage moral "de démontrer que leur activité n'est pas une rente", mais aussi l'avantage plus terre à terre de sortir le patrimoine immobilier - devenu du coup un outil de travail - de l'assiette de l'ISF.
Autre proposition insolite : la remise à plat de l'activité du parc HLM "ou comment ubériser le logement social pour tous les propriétaires". Derrière le chiffon rouge d'Uber - qui a d'ailleurs assez peu de rapport avec la proposition -, l'Unpi explique que l'Etat se défausse sur les bailleurs privés indépendants pour loger les plus démunis. L'idée serait donc d'étendre aux bailleurs privés certains avantages des organismes HLM, avec pour objectifs "d'augmenter l'offre de logement à loyer adapté, de mobiliser le parc existant et de reconnaître la contribution du parc privé à l'offre locative intermédiaire, sociale, voire parfois très sociale". Selon l'Unpi, la mobilisation du parc privé à des fins sociales mettrait fin "à la sur-construction dans les zones détendues par le parc HLM" et permettrait à ce dernier de se concentrer "sur sa mission initiale de loger les plus pauvres".
Le "logement essentiel" pour loger tout le monde
S'inspirant de la réussite des compagnies aériennes ou des voitures "low cost", l'Unpi propose également de mettre en œuvre, en concertation avec tous les acteurs concernés dont les collectivités, la notion de "logement essentiel", autrement dit de logements plus accessibles. L'association estime en effet "préférable de loger tous les habitants de notre pays, fut-ce dans des logements moins luxueux, que de laisser à la rue des milliers de personnes qui n'ont pas les moyens d'y accéder".
En l'occurrence, il ne s'agit pas "de discuter sur tel ou tel point de la règlementation qui ferait gagner 2% de coût sur telle ou telle dépense, mais de créer un concept entièrement nouveau", sur le modèle de celui développé notamment par le groupe indien Tata. L'objectif serait ainsi de parvenir à un prix d'acquisition inférieur à 1.000 euros le m2, grâce notamment à des systèmes de préfabrication et à des procédés innovants de construction. Une proposition qui n'est finalement pas si éloignée de l'utilisation - expérimentale - de containers aménagés pour loger des étudiants (avec toutefois la différence qu'il s'agit, dans ce cas, de logement temporaire).
Et si on supprimait le permis de construire ?
On retiendra également la mesure numéro 7, consistant tout simplement à supprimer le permis de construire dans les zones urbaines, tout en conservant néanmoins "quelques règles fondamentales", comme celles relatives à la hauteur maximale ou à l'alignement. L'argument avancé à l'appui de cette proposition est que "les collectivités territoriales, dans l'élaboration de leurs documents d'urbanisme, établissent déjà des contraintes très précises d'utilisation du sol".
Pour l'Unpi, cette "libération forte de l'acte de construire" devrait "doper la construction de façon sensible et donc diminuer le prix des terrains à bâtir". Elle aurait aussi le mérite de "mettre en évidence les freins apportés par les élus eux-mêmes à la faculté de bâtir lorsqu'ils limitent trop étroitement les zones constructibles". En contrepartie de cette liberté nouvelle, les sanctions attachées aux constructions illicites seraient renforcées, pouvant aller jusqu'à la démolition du bâtiment.