Lunas se dote d’un pôle de téléconsultation satellitaire (24)
Inauguré à Lunas en novembre 2022, le pôle de télémédecine se distingue à deux titres : il repose sur un cabinet infirmier et fonctionne grâce à une connexion satellitaire. Cette initiative, portée par la communauté d’agglomération bergeracoise, vise à faciliter l’accès des habitants des zones rurales aux médecins généralistes comme spécialistes.
Comme dans beaucoup de zones rurales, les habitants de la communauté d’agglomération bergeracoise (CAB) rencontrent des difficultés croissantes à se soigner. « Du fait du manque de généralistes, certains ne trouvent pas de médecin traitant et le problème de démographie médicale ne va pas aller en s’arrangeant : pas moins de six généralistes vont partir à la retraite l’an prochain ! » s’alarme Olivier Dupuy, vice-président en charge de l’accès aux soins à la CAB. À cela s’ajoutent des changements structurels, ainsi qu’un besoin croissant de consulter des spécialistes. Or, si le territoire est mal doté en généralistes, c’est encore pire pour ce qui est des spécialistes.
S’appuyer sur des infirmiers
Ces constats ont conduit la collectivité à s’intéresser à la télémédecine, la crise sanitaire ayant contribué à banaliser son usage. « Nous avions la possibilité d’installer une cabine de téléconsultation, mais cette solution n’est pas totalement satisfaisante, car les patients doivent effectuer toutes les manipulations par eux-mêmes », souligne l’élu. C’est la raison pour laquelle la collectivité a souhaité s’appuyer sur des infirmiers, pour faciliter la médiation entre le patient et le médecin. En fonction de ce que demande le médecin, c’est l’infirmier qui réalise les manipulations. Il échange avec le médecin et peut traduire les termes médicaux au patient.
Cumul de zones blanches
Concrètement, le projet « Colibri », porté par Prox6Nov et Numérisat, propose une solution de télémédecine. Le dispositif, nommé Oui Télémédical, assure la gestion des prises de rendez-vous pour les téléconsultations. Ces dernières sont menées avec l’aide d’un professionnel de santé, spécialement formé à ces pratiques. Le système utilise des instruments connectés (stéthoscope, oxymètre, échographe, caméra…) et une liaison satellitaire fournie par Numérisat et l’Agence Spatiale Européenne. Configurée pour du très haut débit, sécurisée, cette liaison est à même de télétransmettre des images médicales. Et si la CAB a choisi la commune de Lunas (430 habitants) pour installer ce pôle de télémédecine, ce n’est pas un hasard : il s’agit d’une commune très mal couverte en réseaux télécoms, dépourvue de médecin mais dotée d’un cabinet infirmier. Ce local, propriété de la mairie, permet à deux infirmières libérales d’exercer leur activité et accueille les équipements informatiques et médicaux.
Garantir les remboursements de soins
La partie la plus complexe du projet a cependant été de le concilier avec la réglementation. Car ce dispositif ne doit pas nuire à la concurrence qui prévaut entre les professionnels de santé libéraux. « Il a donc été décidé que le matériel de téléconsultation serait accessible aux autres praticiens sur demande », explique l’élu. En outre, si le matériel est installé dans le cabinet infirmier, il existe également une « mallette », mobile qui peut être utilisée pour des visites chez les patients. Autre difficulté : celle du remboursement des soins car, de fait, ce système de téléconsultation mobilise un médecin et une infirmière qui doivent tous les deux être rémunérés. « Il a fallu travailler avec la caisse primaire d’assurance maladie pour rendre possible les prises en charges », témoigne l’élu.
Changer les réflexes
Pour le moment, il ne s’agit cependant que d’une expérimentation de deux ans : la collectivité souhaite vérifier que le dispositif répond aux attentes des habitants avant de le pérenniser. « Le principal défi est celui de la communication et de l’acceptation de ne plus avoir de médecin attitré » fait valoir l’élu « car il induit de changer certains réflexes ». Avec ce pôle de télémédecine, la relation au médecin n’est pas directe et passe par un intermédiaire. Pour accompagner ce changement, la collectivité l’a présenté aux maires et un consultobus (camping-car aménagé pour les consultations) circule dans les communes environnantes pour faire connaître ce nouveau service. Pour le moment le succès est modeste, avec deux téléconsultations par semaine, mais il faut le temps que les pratiques changent.
Le budget
Le coût du projet pour la CAB s’élève à 8 566 € HT pour les deux ans d’expérimentation. Le financement a été complété et soutenu par l’Agence spatiale européenne et par le Centre national d'études spatiales (Cnes).
Communauté d'agglomération bergeracoise
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Frédéric Delmarès
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