Logement : le Sénat adopte la proposition de loi Kasbarian
Le Sénat a à son tour adopté la proposition de loi durcissant les sanctions contre les squatteurs et accélérant les procédures en cas de loyers impayés, en veillant à distinguer les deux cas de figure.
Le Sénat a adopté jeudi 2 février en première lecture, après l'Assemblée nationale, la proposition de loi durcissant les sanctions contre les squatteurs et accélérant les procédures en cas de loyers impayés, décriée par la gauche et les défenseurs des mal-logés. Le vote a été acquis par 252 voix contre 91. Le texte va maintenant retourner à l'Assemblée.
"Sans le dénaturer", les sénateurs l'ont remanié pour distinguer clairement la situation du squatteur de celle du locataire en difficulté. Le ministre chargé du logement, Olivier Klein, a salué "un texte équilibré" – formule qu'il avait d'ailleurs déjà utilisé la veille devant la fondation Abbé-Pierre (voir notre article).
Inscrit à l'ordre du jour du Sénat à la demande du groupe RDPI (à majorité Renaissance), le texte du député macroniste Guillaume Kasbarian a été d'autant bien accueilli par la majorité sénatoriale qu'il reprend des mesures d'une proposition de loi contre le squat de la sénatrice LR Dominique Estrosi Sassone, adoptée par le Sénat en janvier 2021 (voir notre article de 2021).
L'une des mesures emblématiques de la proposition de loi Kasbarian consiste à tripler les sanctions encourues par les squatteurs, jusqu'à trois ans d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende.
Le Sénat a conservé la possibilité de pénaliser le locataire qui se maintient dans les lieux à la suite d'un jugement d'expulsion devenu définitif, mais a supprimé - avec un avis favorable du gouvernement - la peine de six mois d'emprisonnement encourue, ne gardant que la peine d'amende. "Personne n'ira en prison parce qu'on est en impayés de loyer, bien évidemment !", avait déjà assuré Olivier Klein le 1er février.
À gauche, les groupes CRCE à majorité communiste et écologiste ont ferraillé contre ce texte qui entraînera selon eux "une dégradation du droit des locataires et des droits humains". En toile de fond des débats, la problématique du mal-logement, remis comme chaque année sous les feux de l'actualité avec la publication du rapport de la fondation Abbé-Pierre. Dans sa 28e édition, celle-ci estime à 330.000 le nombre de personnes sans domicile en France. Soit 30.000 de plus que l'année précédente (sur le contenu de ce rapport, voir notre article du 31 janvier).
Pour les loyers impayés, le texte accélère les procédures judiciaires dans les litiges locatifs, en incluant notamment de manière systématique dans les contrats de bail une "clause de résiliation de plein droit". Activer cette clause permettrait à un propriétaire d'obtenir la résiliation du bail sans avoir à engager une action en justice et de pouvoir ainsi obtenir plus rapidement une expulsion.
Les sénateurs ont rétabli la possibilité pour le juge d'accorder d'office un délai de paiement au locataire qui n'en ferait pas lui-même la demande.
"Nous avons voulu renforcer le volet contre le squat et lutter contre l'usage dilatoire des procédures par des locataires de mauvaise foi", a expliqué Dominique Estrosi Sassone. La centriste Valérie Létard a salué un "rééquilibrage indispensable" et "un gros travail pour apporter des outils dans la prévention des impayés".
À gauche, la présidente du groupe CRCE, Eliane Assassi, a regretté que "le mal ne soit pas traité à la racine" et que le gouvernement ne s'attaque pas "aux inégalités d'accès au logement". Selon l'écologiste Guy Benarroche, le texte devrait s'intituler "proposition de loi condamnant les plus précaires à la rue". Pour l'heure, son objet est quelque peu camouflé derrière l'intitulé "proposition de loi visant à renforcer l'action des collectivités territoriales en matière de politique du logement".