Lodève se reconstruit sur elle-même (34)

Nichée entre Montpellier et le Plateau du Larzac, la ville de Lodève tire parti de son environnement singulier pour se reconstruire sur elle-même et renouer avec son attractivité passée, dans une région de fort tropisme littoral et métropolitain. Avec des moyens limités, les élus ont mobilisé tous les dispositifs à leur portée pour soutenir une vie locale autour d’une centralité riche d’abord de ses services publics.

Les industries textile et minière étant à la source de la prospérité de Lodève, leur crise a conduit la ville vers le déclin. L’ouverture d’un site d’extraction d’uranium de la Cogema avait transitoirement accompagné cette évolution industrielle, jusqu’à son arrêt programmé en 1995. Petite ville marquée par la désindustrialisation, la montée du chômage et la métropolisation, son aménagement suit les formes classiques de périurbanisation censées redonner de l’attractivité par la grande facilité d’aménagement sur les derniers terrains exploitables au détriment de la nature, de l’agriculture ou de l’ancienne gare, tandis que la municipalité mise fortement sur la culture. À partir de 2008, une nouvelle équipe municipale prend les commandes de la commune et s’engage dans son renouveau. Avec des cabinets experts, elle affronte les dures réalités : environ 600 logements indignes sont recensés. De plus, la ville est confrontée à une forte vacance commerciale (32 % en cœur de ville en 2016), due en partie à des locaux inadaptés, ainsi qu’à une politique d’extension urbaine à contretemps, fragilisant le centre bourg.

Renforcer les services publics

Sur cette trajectoire, la perte de services publics se faisait menaçante. Devant ce diagnostic, les élus réagissent. « En nous engageant dans plusieurs opérations de rénovation, nous avons clairement manifesté notre volonté politique de renforcer les services et équipements publics pour jouer pleinement notre rôle de bourg centre d’un bassin de vie de 15 000 habitants », fait valoir la maire de Lodève, Gaëlle Lévêque.

La ville se heurte à des contraintes géographiques qui restreignent considérablement le foncier constructible. Elle est située dans une cuvette, deux rivières la traversent avec les risques d’inondation afférents, et la forêt qui la jalonne expose les habitants aux incendies. « Paradoxalement, cette contrainte géographique est aussi une chance, reprend la maire. Elle a préservé la ville d’une urbanisation de lotissements qui l’aurait dénaturée. Cela nous oblige à nous concentrer sur notre cœur de ville. »

Autre difficulté majeure, le manque de rentabilité de l’immobilier neuf comme ancien, qui décourage les propriétaires de réinvestir dans leurs immeubles et n’attire pas de nouveaux investisseurs en relais. « Une part des propriétaires préfère laisser des bâtiments vides et dégradés plutôt que d’investir dans leur rénovation malgré leurs responsabilités, les aides disponibles et la taxe foncière sur le foncier vacant qui les frappe », souligne le chargé de mission du renouveau du centre-ville, Antoine Desclèves. Ces bâtiments entretiennent une mauvaise image du centre-ville. Mais la municipalité n’a pas vocation ni les moyens de tous les reprendre, malgré les nombreux outils mis en place. Et la difficulté et la facture augmentent à mesure que le temps passe. Il faut responsabiliser ces propriétaires mais aussi les aider, financièrement, à conduire des projets, ou à comprendre qu’il leur faut passer la main et accepter les conditions actuelles du marché.

Actions sur le logement et le commerce

La multiplicité des obstacles dressés sur le parcours de la rénovation n’entame pas la volonté municipale. La ville candidate avec succès à l’Appel à manifestation d’intérêt Centre bourg dès le lancement de ce programme en 2014. Peu après, une première Opération programmée d’amélioration de l’habitat de renouvellement urbain (OPAH-RU) démarre, en partenariat avec l’Anah. Elle permet de financer la rénovation de 300 logements privés et jette les bases de la restructuration complète de trois îlots, dans le cadre du dispositif de résorption de l’habitat indigne de l’Anah. Parallèlement, la ville travaille à la redynamisation du commerce, en partenariat avec l’établissement public foncier d’Occitanie, la société publique locale Territoire 34 et l’Agence nationale de la cohésion des territoires. Cette dernière réalise des études de marché et s’engage à racheter à prix subventionné des locaux commerciaux restructurés et rénovés. La Foncière Occitanie Commerce et Artisanat Local (Foccal) rejoint la dynamique à sa création en 2021. Ce sont ainsi 1 000 m² de locaux modernes qui accueilleront bientôt de nouveaux commerçants.

La commune accentue encore son engagement en 2021, en signant une convention pour conduire une Opération de revitalisation du territoire (ORT), puis en 2022 en lançant une seconde OPAH-RU, centrée sur Lodève (la première OPAH concernait le territoire intercommunal). « Ces actions envoient un signal fort aux investisseurs et aux propriétaires du centre-ville, en leur montrant que la commune prend toute sa part dans la rénovation », indique la maire. Notons aussi qu’une aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine (AVAP) devenue Site Patrimonial Remarquable (SPR) a été mise en place en 2020, pour encadrer et orienter les rénovations sur le bâti patrimonial.

Des aides publiques indispensables

À ce jour, le volontarisme des élus a permis d’obtenir les soutiens nécessaires à la préservation et à la création de plusieurs équipements publics. On note ainsi la réhabilitation de quelques centaines de logements, la rénovation du musée (50 000 visiteurs par an) et celle du lycée, dont le maintien en cœur de ville a pu être assuré. Une halle des sports a été construite, avec l’appui du département. La création d’une Maison des services publics a maintenu sur place une trentaine de partenaires, dont la Chambre de commerce et d’industrie, la Chambre d’agriculture, qui, sans cela, auraient quitté la ville, faute de locaux adaptés. Enfin, la création d’une maison de santé pluridisciplinaire participe à lutter contre la désertification médicale, en s’adaptant aux besoins de la nouvelle génération de soignants. En logeant tous ces services sur des friches réhabilitées en cœur de ville, les collectivités appliquent le discours de renouvellement urbain et mesurent ses contraintes. « Les aides publiques sont indispensables à une ville comme la nôtre, dotée de trop peu de ressources pour effectuer les investissements qu’exige sa reconstruction », explique la maire. La rénovation des trois îlots d’habitat indigne, par exemple, a exigé un investissement de 3 500 €/m2 pour un prix de revente de 1 500 €/m2. Difficile de trouver un investisseur privé à ces conditions, surtout quand, dans le neuf sur terrain nu, l’investissement n’est que de 1 500 à 2 000 €/m².

Aux yeux d’Antoine Desclèves, le redressement d’une ville comme Lodève exige un engagement sur plusieurs décennies. « Outre la mobilisation des financements, il faut aussi faire face à des situations très complexes comme les opérations de résorption de l’habitat indigne dont certaines peuvent prendre jusqu’à près d’une dizaine d’années. » Actuellement, les élus réfléchissent à l’instauration du permis de louer et se concentrent sur le dispositif Petites villes de demain qui prend le relais du programme Centre bourg. « Il nous redonne les moyens de nous projeter sur la durée et de poursuivre nos actions de rénovation. Cela nous a notamment permis de conserver nos services publics et même de les étendre », conclut Gaëlle Lévêque.

Les difficultés de Lodève en quelques chiffres

20 % des habitants de la commune sont à la recherche d’un emploi, le taux de pauvreté avoisine les 30 % et le revenu médian annuel s’élève à 16 560 euros, soit un niveau bien inférieur au revenu médian annuel national, qui est de 22 000 euros. 20 % des logements sont vacants sur le périmètre de l’ORT et la grande majorité des 385 petites copropriétés (4 logements au plus) sont en situation de fragilité, faute de pouvoir recruter un syndic. De plus, elles ne sont habitées que par un tiers de propriétaires occupants.

Commune de Lodève

Nombre d'habitants :

7500
7 place de l’Hôtel de Ville
34 700 Lodève

Gaëlle Lévêque

Maire

Antoine Desclèves

Chargé de mission du renouveau du centre-ville

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