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Formation professionnelle - Les salariés des zones urbaines denses écartés de la formation continue

Le constat que la formation professionnelle ne bénéficie pas à ceux qui en ont le plus besoin n'est pas nouveau. C'est même lui qui a dicté la dernière réforme de 2009. Mais en dehors des critères socioprofessionnels mis en exergue jusqu'ici, un élément supplémentaire semble déterminant : le territoire. Et les salariés des zones urbaines denses ne sont pas les mieux  lotis. C'est le constat établi par Cécile Détang-Dessendre dans un article publié par l’Insee le 21 octobre. Selon la directrice de recherche à l’Inra-Cesaer de Dijon (Centre d'économie et sociologie appliquées à l'agriculture et aux espaces ruraux), le salarié qui a le plus de chances de bénéficier d’une formation (une chance sur deux) possède une expérience professionnelle d’au moins cinq ans, occupe un emploi de cadre ou une profession intermédiaire dans une entreprise de service ou du secteur industriel à haut niveau technologique, de plus de 500 salariés. De même, les ouvriers non qualifiés, surtout ceux qui n’ont aucune formation initiale, sont les moins concernés par la formation continue. A cette catégorie de salariés "exclus" de la formation professionnelle s’ajoutent "les salariés des secteurs industriels de faible technologie, de la construction et du commerce qui ont le moins de chances de suivre une formation en entreprise".  Ainsi, de manière générale, la formation ne concerne qu’un salarié sur quatre. Et le critère territorial ajoute à cette disparité. Selon Cécile Détang-Dessendre, "la probabilité d’accès diminue lorsque la densité des marchés locaux du travail augmente". La France métropolitaine compte 348 zones d’emploi (les zones d’emploi étant des espaces géographiques à l’intérieur desquels la plupart des actifs résident et travaillent), mais les disparités entre chacune d’elles peuvent être conséquentes. Alors que dix zones concentrent plus de 400 emplois/km2 (dont Paris qui compte plus de 15.000 emplois/km2), dix zones d’emploi affichent une densité inférieure à six emplois au km2.
L’inégalité territoriale d’accès aux formations pourrait avoir deux explications bien distinctes. La première serait liée à l'adéquation entre employés et postes à pourvoir qui augmente avec la taille du marché. En effet, les entreprises trouvent plus facilement un salarié adapté au poste à pourvoir et le salarié trouve plus aisément un emploi qui lui correspond lorsque l’offre de travail est grande. Les firmes ne ressentent donc pas le besoin de financer des formations pour améliorer le niveau de productivité de leurs salariés. Autre explication : les zones d’emploi plus denses présentent plus de risques de rotation et de débauchage par les concurrents. Pas question de débourser des sommes importantes pour une formation qui servirait dans un autre établissement. Une exception vient cependant perturber ce constat : les entreprises rurales, souvent situées dans des zones peu denses, financent très peu de formation continue. Ainsi, selon l’enquête FQP, le taux d’accès à la formation en entreprise est de 26% dans les pôles urbains alors qu’il n’atteint que 15% dans les communes rurales. Et la probabilité d’accès à la formation des salariés travaillant dans des firmes situées en zones rurales est inférieure de près de 20% à celle des salariés des entreprises des zones urbaines. Ce rôle négatif de la densité ne jouerait donc que pour les salariés des zones urbaines.

 

Muriel Weiss