Médicosocial - Les réserves de la CNSA devraient chuter de 96% en 2017
Dans son rapport, fait au nom de la commission des affaires sociales du Sénat, sur le volet médicosocial du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 (PLFSS), René-Paul Savary, sénateur (Les Républicains) et président du conseil départemental de la Marne, se penche en détail sur la question des réserves de la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie). La où son homologue de l'Assemblée nationale - qui a déjà adopté le PLFSS en première lecture - se contentait de demander une "clarification" de l'utilisation des réserves de la CNSA (voir notre article ci-contre du 27 octobre 2016), le rapporteur du Sénat va nettement plus loin dans le diagnostic.
Un "manque de visibilité" sur les flux
L'analyse part du constat d'un résultat de la CNSA "fortement, mais exceptionnellement, excédentaire en 2015", qui porte le niveau des réserves à près de 745 millions d'euros au début de l'exercice 2016 (voir notre article ci-contre du 15 avril 2016). Le niveau des réserves à la fin de 2016 sera, pour sa part, arrêté lors du conseil d'administration de la CNSA, prévu le 22 novembre. Mais celle-ci l'évalue dès à présent à environ 715 millions d'euros, soit un niveau très proche de celui de 2015.
Le rapporteur s'étonne de cette faible diminution du niveau des réserves, alors que la CNSA a dû assurer, en 2016, d'importants "décaissements sur réserves" (autrement dit reprises sur les réserves) : couverture du déficit budgétaire estimé à 60 millions d'euros, participation à l'objectif global de dépenses (OGD) initialement fixée à 160 millions par la LFSS 2016, montant de gels et de surgels de crédits estimé au minimum à 80 millions et contribution à l'Anah de 20 millions. Ces décaissements totalisent 320 millions d'euros, "ce qui suppose, pour atteindre la diminution nette de 30 millions, que les 'encaissements de réserves' auraient atteint sur la période 290 millions d'euros."
Le rapporteur observe au passage que "le Parlement ne dispose que d'une visibilité restreinte sur le montant et sur l'origine de ces encaissements de réserves". Il estime qu'ils sont le produit du "très grand nombre de reprises sur provisions repérées dans le budget de la CNSA, qu'on peut chiffrer à environ 235 millions d'euros". Ces provisions sont essentiellement issues des autorisations d'engagements non consommées du plan d'aide à la modernisation et à l'investissement (160 millions), du fonds de soutien aux départements en difficulté (50 millions) et du fonds pour la modernisation des services d'aide et d'accompagnement à domicile (Saad, 25 millions).
710 millions d'euros de reprises sur les réserves en 2017
Selon le rapport, les réserves de la CNSA devraient connaître une réduction drastique de 96% en 2017, pour tomber à un montant de 28,5 millions d'euros en fin d'exercice. Cette chute s'explique par les diverses reprises programmées sur les réserves actuelles : contribution à la construction de l'OGD 2017 (230 millions d'euros, sans anticipation des gels et surgels), produits provisionnés en 2016 et dont l'essentiel sera consommé en 2017 (235 millions), enveloppe supplémentaire pour le fonds d'appui aux Saad, plan d'aide à l'investissement (PAI) 2017 (120 millions), mise en place d'un "fonds d'appui aux politiques d'insertion au bénéfice des départements" prévu par l'article 50 du PLF - mais dont on voit mal le rapport avec les missions de la CNSA - (50 millions) et financement de mesures annoncées à la dernière Conférence nationale du handicap (25 millions). Au final, des décaissements de l'ordre de 710 millions d'euros, qui devraient réduire à la portion congrue les réserves de la CNSA.
Une menace directe sur le plan d'aide à l'investissement
Le rapporteur voit deux menaces dans cette chute annoncée des réserves. La première concerne l'impossibilité d'abonder l'OGD dans des proportions comparables à celles de ces dernières années. Ceci aura pour conséquence "une tension directe sur l'Ondam médicosocial, dont les gels et surgels seront beaucoup moins facilement compensables".
La seconde menace concerne le plan annuel d'investissement (PAI), dont le financement est aujourd'hui le principal emploi récurrent des réserves. La loi Vieillissement du 28 décembre 2015 ne prévoit en effet de montant minimal du PAI que pour les seuls exercices 2016, 2017 et 2018. Mais, pour le rapporteur, "il paraît difficilement soutenable d'interrompre l'effort d'investissement après cette échéance, surtout en raison de la prorogation de la plupart des grands plans de créations de places à 2020". Or le rapport estime "presque impossible", en l'état actuel des ressources de la CNSA, de poursuivre le financement de l'investissement dans les mêmes proportions. Conclusion : "Il sera alors urgent de trouver à la CNSA un surcroît (pérenne cette fois) de ressources propres".
Jean-Noël Escudié / PCA
Références : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, rapport n°114 de M. René-Paul Savary, fait au nom de la commission des affaires sociales (volet médicosocial).