Médicosocial - La commission des affaires sociales de l'Assemblée veut "clarifier" l'utilisation des réserves de la CNSA
Les différents rapporteurs de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2017 ont remis leurs différents rapports sectoriels. Le tome III - présenté par Philip Cordery, député (PS) des Français établis hors de France - est consacré au secteur médicosocial. S'il porte un jugement d'ensemble positif sur le soutien aux dépenses dans le secteur médicosocial ("un budget excédentaire dans un contexte dynamique"), il n'en formule pas moins un certain nombre d'observations.
744 millions d'euros de réserves, qui suscitent des convoitises
Le rapport se penche ainsi sur "l'enjeu spécifique des réserves de la CNSA" (Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie). Après avoir connu une nette décélération ces dernières années, celles-ci sont en effet reparties à la hausse, notamment du fait d'un exercice 2015 excédentaire de 303 millions d'euros alors qu'il était attendu un déficit prévisionnel de 361 millions d'euros. Du coup, les réserves s'établissent à 744 millions d'euros, après avoir atteint 444 millions d'euros en 2014 (voir notre article ci-contre du 15 avril 2016). Ces écarts et cette montée en flèche des réserves ont une explication quasi unique : "la non-consommation des crédits issus de la Casa [contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie, ndlr], en l'absence de mise en œuvre de la loi d'adaptation de la société au vieillissement avant fin 2015".
Devant cette situation, le rapporteur demande une "clarification" de l'utilisation de ces réserves, un sujet délicat et qui a déjà valu des débats très vifs au sein du conseil d'administration de la CNSA.
L'Ondam médicosocial n'a pas vocation à financer d'autres sous-objectifs
Plus précisément, le rapporteur estime que "l'utilisation des réserves de la CNSA pour alimenter les crédits du secteur médicosocial ne paraît ni incohérente avec l'objectif de maîtrise de l'Ondam [objectif national des dépenses d'assurances maladie, ndlr], ni injustifiée au regard de l'origine de ces réserves - des crédits de l'Ondam médicosocial non consommés. Elle ne doit néanmoins pas conduire à compenser durablement une réduction de la part de l'Ondam à l'OGD" (objectif global de dépenses).
Le rapport se fait plus précis, en considérant que "de manière plus préoccupante, les crédits de l'Ondam médicosocial n'ont pas vocation à être mis en réserve pour financer le dépassement d'autres sous-objectifs, avec en premier lieu l'Ondam soins de ville". Le rapporteur "estime donc utile de clarifier dès à présent les modalités et l'ampleur de la mobilisation des réserves de la CNSA, de sorte qu'elle ne constitue pas un frein à la pleine mise en œuvre des mesures contenues dans la loi d'adaptation de la société au vieillissement".
Réforme de la tarification des Ehpad : les décrets sont dans le tuyaux
Le rapport se penche aussi sur la mise en œuvre de la loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement. S'il se félicite du rythme soutenu de parution des décrets d'application - avec en particulier la publication remarquée de cinq textes d'application avant même la publication de la loi... -, il relève cependant que 22 dispositions importantes de la loi voient leur application conditionnée à la publication prochaine de textes réglementaires.
Le rapporteur pointe notamment du doigt "deux chantiers réglementaires particulièrement attendus". Le premier concerne la tarification des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). L'article 58 de la loi se contente en effet de renvoyer au pouvoir réglementaire pour définir le contenu de cette réforme attendue de longue date. Selon le rapporteur, les quatre décrets d'application correspondant à cette réforme "sont en cours d'examen par le Conseil d'Etat". Ils portent respectivement sur la modification des dispositions financières applicables aux établissements et services sociaux et médicosociaux, le mode de calcul du forfait global dépendance et des tarifs journaliers afférents à l'hébergement dans un Ehpad, la détermination des minorations applicables au forfait soins lorsqu'un Ehpad refuse de signer un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (CPOM) et, enfin, la définition des principes généraux de la tarification et du forfait global de soins des Ehpad. Selon les informations transmises par le gouvernement, la publication de ces quatre décrets devrait intervenir en novembre 2016.
Le second chantier concerne la gouvernance des politiques gérontologiques. Il concerne trois décrets, portant respectivement sur la création du Haut conseil de l'enfance, de la famille et de l'âge - dont la publication serait imminente -, sur la modification de la composition du conseil d'administration de la CNSA (le décret vient en réalité de paraître) et sur la définition d'un cahier des charges et d'une procédure de labellisation des maisons départementales de l'autonomie.
Jean-Noël Escudié / PCA
Référence : Assemblée nationale, rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, tome III médicosocial.