Les régions se dotent de stratégies numériques globales

"Doter le territoire de ressources numériques" et "conduire la transformation numérique des acteurs et des territoires" : voici les deux axes du "plan de numérisation de la Normandie" présenté par Hervé Morin à la mi-juin et actuellement mis à la concertation des acteurs normands. Deux axes qui représentent la volonté de la région de passer outre la fracture entre infrastructures et usages numériques.
Le constat se veut réaliste : si le déploiement du très haut débit est bien avancé dans la région, il y a aussi la "trop faible intégration du numérique dans les compétences professionnelles" et le fait que "trop peu de professionnels se sont organisés pour s’approprier et tirer parti du numérique". Parmi les sujets prioritaires, la mise en place d'une étude pour "mesurer les bouleversements majeurs provoqués par le numérique" et proposer une adaptation de l'offre de formation. La région entend aussi soutenir le développement des tiers-lieux à l'horizon 2018, avec la création d'un label régional, dans le sillage de ce qui se fait en région Nouvelle-Aquitaine. La mise en place d'un datalab ("laboratoire collaboratif d’innovation dédiée à la stratégie de la donnée et la création de service") renvoie aussi au succès du Tuba à Lyon, qui fait des émules.
La démarche de la région Paca, confirmée lors de l'assemblée régionale du 7 juillet dernier, s'inscrit aussi dans une recherche de transversalité. La stratégie de cohérence régionale pour l'aménagement numérique (SCoRAN) sera révisée pour intégrer les infrastructures mobiles, et les services et usages numériques. La région lance aussi un appel à projets permanent "lieux d'innovation et de médiation numérique" pour assister des tiers-lieux dans leur lancement. Là encore, la région réfléchit à un label commun de tiers-lieux, en réunissant le réseau Eric (espace régional internet citoyen), l'initiative Paca Labs, et les lieux bénéficiant de ce nouvel AAP.

Des stratégies ambitieuses à relier avec les préoccupations du quotidien

Si ces stratégies sont mises en place, c'est pour servir de grandes ambitions. Sur ce plan, si chacun convoque des lexiques propres, l'intention est assez homogène : se faire une place parmi les territoires qui comptent en Europe dans l'économie numérique. Sur ce terrain, la région Auvergne-Rhône-Alpes ne varie pas : dès mi-2016, Laurent Wauquiez énonçait son intention d'une "Silicon Valley à l'européenne", en s'appuyant sur les atouts indéniables des écosystèmes lyonnais et grenoblois. Une ambition qui a pour l'heure débouché sur deux faits marquants : la fusion des deux clusters numériques régionaux et l'esquisse d'un projet de campus numérique régional, dont les premières formations ouvriront à la rentrée prochaine.
Toutes les régions cherchent, en tout cas, à bâtir des stratégies numériques qui apportent plus de retombées concrètes sur l'ensemble de la population et sur les entreprises les plus classiques, au-delà de l'image cliché de l'incubateur de start-up. C'est ce que confirme Daniel Sperling, maire-adjoint de Marseille chargé de l'innovation et du développement par le numérique, qui prépare actuellement un ouvrage sur les territoires intelligents ; "tous les échelons territoriaux, dont les régions, cherchent plus de transversalité dans leurs politiques numériques, et essayent de les relier aux préoccupations de nos concitoyens. Le numérique doit être un outil mis au service du développement humain, ce n'est plus un objectif politique en soi".
Fin 2016, la région Hauts-de-France avait ainsi annoncé un partenariat avec Facebook, pour diffuser des offres d'emploi locales sur le célèbre réseau social. Début juillet, la région Auvergne-Rhônes-Alpes lui a emboîté le pas. Ce n'est qu'une première étape pour que les régions aident à la mutation numérique de leurs marchés de l'emploi. L'essentiel reste encore à inventer.