Finances locales - Les régions confrontées à une croissance rapide de leur dette
La dette des régions françaises n'a cessé de grandir au cours de ces dernières années. De 9,4 milliards d'euros en 2008, elle a grimpé à 15,7 milliards en 2009 et a atteint 16,8 milliards à la fin de l'année dernière. Or, cette progression rapide de la dette des régions devrait se poursuivre dans les prochaines années, selon un rapport de Fitch. L'agence de notation estime que la dette des régions devrait croître de "plus de 35% d'ici à 2013 pour approcher 23 milliards d'euros". Il faudrait alors en moyenne 6 ans aux régions pour rembourser le capital de leurs emprunts avec leur épargne brute, contre une moyenne de 3,8 ans aujourd'hui.
Globalement, la dette des régions reste toutefois "modérée". Les meilleures élèves sont l'Aquitaine, Midi-Pyrénées, la Haute-Normandie et la Bretagne. Il leur suffit d'un an à un an et demi pour rembourser leur dette. Dans 4 autres régions (Centre, Champagne-Ardenne, Poitou-Charentes, Rhône-Alpes), la situation n'est peut-être pas aussi saine que les comptes de ces régions ne le laissent paraître. Celles-ci ont eu récemment recours à des contrats de crédit-bail pour financer leurs investissements ferroviaires pour des montants représentant plus de 30% du volume de leur dette. Or, les collectivités ne les prennent pas en compte dans leur endettement. Cinq régions arrivent en queue de classement : la Lorraine, Provence-Alpes-Côte d'Azur, l'Alsace, le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie. Ces régions auraient besoin de plus de 6 ans pour rembourser leur dette dans l'hypothèse où toute leur épargne serait consacrée à cet effort. Plus que les autres, la Picardie s'approche de la zone dangereuse que certains experts des finances locales font commencer à 11 ou 12 années de remboursement.
"Recentrage"
"Depuis une dizaine d'années, la capacité d'endettement et les marges de manoeuvre financière des régions se sont réduites", constate Fitch. Or, tout laisse à penser que le phénomène va se poursuivre. En effet, la réforme de la fiscalité locale a pratiquement ôté toute possibilité pour les régions de voter les taux de fiscalité et la valeur ajoutée qui sert d'assiette à l'impôt qui remplace la taxe professionnelle "sera peu dynamique à l'avenir". Du coup, l'agence anticipe une augmentation de seulement 1 à 2% par an en moyenne de la cotisation sur la valeur des entreprises (CVAE), alors que la taxe professionnelle a progressé en moyenne de 4,5% par an entre 2008 et 2010. A cela s'ajoutent les effets de la crise économique - qui ont été lourdement ressentis dans certaines régions, en particulier dans le quart Nord-Est - et le gel strict des dotations de l'Etat aux collectivités locales.
Pour retrouver des marges de manœuvre, les régions ne peuvent guère faire des économies sur leurs dépenses. Les principales d'entre elles - formation professionnelle et apprentissage, transports et enseignement - s'avèrent peu compressibles. Les régions n'y toucheront pas. Certains investissements vont même s'avérer très onéreux, en particulier dans le ferroviaire (pour le renouvellement des trains régionaux ou le financement des lignes à grande vitesse). En définitive, les régions devraient continuer à financer leurs compétences obligatoires, mais au détriment des compétences qu'elles exercent à titre facultatif. Selon Fitch, c'est dans ce "recentrage" que réside "la principale marge de manœuvre financière des régions". La "suppression" de la clause générale de compétence par la loi de réforme des collectivités territoriales devrait les aider à enclencher le mouvement, analyse encore l'agence de notation. La baisse des subventions des régions aux autres collectivités locales, constatées en juillet par l'observatoire des finances locales (lire notre article du 20 juillet 2011), devrait donc se poursuivre.