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Coopération - Les propositions de la Commission européenne pour l'Union pour la Méditerranée écornent les ambitions françaises

A deux mois du lancement officiel de l'Union pour la Méditerranée (UPM), qui se déroulera à Paris le 13 juillet 2008, la Commission européenne a présenté, mardi 20 avril, ses propositions pour renforcer le partenariat entre l'Union européenne et les pays méditerranéens. Ce projet s'éloigne de plus en plus des ambitions françaises, puisqu'il ne devait initialement rassembler, côté européen, que les pays riverains de la Méditerranée. Face à l'opposition allemande, la Commission européenne avait proposé de rassembler les 44 pays riverains de la Méditerranée et de l'Adriatique (les 27 Etats membres, les 13 membres et observateurs du "processus de Barcelone" lancé en 1995 par les Européens pour un partenariat avec les pays au Sud de la Méditerranée, ainsi que la Croatie, la Bosnie, le Monténégro et Monaco).

Suite au sommet européen des 13 et 14 mars 2008, la France a dû accepter que ce projet, rebaptisé "Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée", se contente de redynamiser le processus et non de le restructurer en profondeur. Pour la Commission européenne, il s'agit de veiller à ne pas affaiblir ou doubler les instances européennes existantes. Benita Ferrero-Waldner, commissaire en charge des relations extérieures, a rappelé que les objectifs fondateurs du processus de Barcelone, à savoir la création d'une zone de paix et de stabilité, une zone de libre-échange et un rapprochement entre les peuples "restaient valables".

 

Divergences au sujet de la gouvernance de l'UPM

Au niveau de l'organisation de l'UPM, trois instances seront créées : la présidence, le secrétariat et le comité permanent. La représentation européenne au niveau de la présidence devrait être assurée par les présidents respectifs du Conseil et de la Commission, une fois le Traité de Lisbonne entré en vigueur. En attendant, Nicolas Sarkozy assurera la première présidence pour six mois, en tant que président en exercice du Conseil de l'UE. Paris souhaite qu'un pays riverain de la Méditerranée assure la coprésidence, alors que Bruxelles propose de laisser les pays partenaires désigner leur président. L'Egypte semble favorite à l'heure actuelle. Mais cette question pose problème au Sud de la Méditerranée, la Syrie refusant l'éventualité qu'un jour Israël puisse prétendre à la coprésidence. Elle envisage même de ne pas participer au sommet de juillet à Paris si Israël est présent.

Deuxième instance : un secrétariat sera mis en place afin de mettre en œuvre les projets de partenariat. En ce qui concerne son siège, Paris privilégie Tunis, Nice ou Marseille, alors que les instances européennes préfèreraient Bruxelles. Il s'occupera notamment des cinq projets au cœur du dispositif, présentés dans la communication de la Commission européenne : la dépollution de la Méditerranée d'ici à 2020, la protection civile, une autoroute du Maghreb arabe reliant la Mauritanie, le Maroc et l'Algérie, la création d'autoroutes de la mer et le développement de l'énergie solaire.

Enfin, un comité permanent, composé de 44 hauts fonctionnaires, sera chargé de superviser les travaux du secrétariat et d'organiser les événements comme les sommets et réunions ministérielles.

 

Des inquiétudes grandissantes

Au niveau financier, Benita Ferrero-Waldner, commissaire en charge des Relations extérieures a précisé que "les projets régionaux ne peuvent être mis en œuvre au détriment de nos budgets existants". Les subventions du budget communautaire dans le cadre du processus de Barcelone n'augmenteront donc vraisemblablement pas  beaucoup. Bruxelles souhaite privilégier le recours à des fonds privés, des fonds d'Etats ou encore aux institutions financières internationales.

Les Pays-Bas et le Royaume-Uni s'inquiètent de devoir payer pour ce projet. Quant à la Pologne, elle craint qu'avec ce partenariat renforcé, l'Union européenne ne délaisse sa politique de voisinage, notamment avec l'Ukraine.

La députée verte Hélène Flautre déplore pour sa part l'absence de "référence explicite à la démocratisation et aux droits de l'homme".

 

Blandine Potemsky/ Welcomeurope