Personnes âgées - Les Paerpa fragilisés par le retrait des professions de santé libérales
L'Union nationale des professionnels de santé (UNPS) annonce qu'elle se retire du comite de pilotage du dispositif Paerpa (personnes âgées en risque de perte d'autonomie) lancé par l'article 48 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 du 17 décembre 2012. Même si ce retrait - ou plus précisément cette suspension de sa participation - ne signifie pas que les professionnels de santé concourant à l'expérimentation vont s'en retirer, c'est néanmoins un sérieux coup dur pour le dispositif. L'UNPS n'est pas en effet un simple syndicat catégoriel, mais une instance officielle créée par la loi du 13 août 2004 portant réforme de l'assurance maladie. Elle regroupe des représentants de 24 organisations syndicales de professionnels de santé en exercice libéral en France, reconnues officiellement les plus représentatives : médecins généralistes et spécialistes, mais aussi pharmaciens, sages-femmes, kinés, chirurgiens-dentistes...
Une expérimentation sur cinq ans lancée en 2013
L'article 48 de la LFSS 2013 prévoit que "des expérimentations peuvent être menées, à compter du 1er janvier 2013 et pour une durée n'excédant pas cinq ans, dans le cadre de projets pilotes mettant en œuvre de nouveaux modes d'organisation des soins destinés à optimiser le parcours de santé des personnes âgées en risque de perte d'autonomie". Le dispositif fait l'objet de dénominations variées - par exemple "parcours de soins des aînés" -, ce qui n'a pas vraiment permis d'imposer le sigle Paerpa.
Ces expériences sont mises en œuvre dans le cadre d'un cahier des charges national et le périmètre territorial de chaque projet est défini par arrêté ministériel. En pratique, chaque expérimentation fait l'objet d'une convention entre les agences régionales de santé, les organismes locaux d'assurance maladie et d'assurance retraite, les professionnels de santé, les établissements de soins, les établissements sociaux et médicosociaux, les collectivités territoriales volontaires ainsi que, le cas échéant, des organismes complémentaires d'assurance maladie.
Vis-à-vis des professionnels de santé exerçant en ville, la démarche Paerpa doit "permettre à chacun de se recentrer sur son cœur de métier tout en améliorant la prise en charge des personnes âgées", mais aussi "faciliter la coordination entre professionnels du domicile.
Un modèle hospitalier non reproductible en ville
Pour justifier son retrait du comité de pilotage, l'UNPS "ne peut que constater l'échec des expérimentations Paerpa". Plus précisément, écrit-elle dans un communiqué, "après une longue phase préparatoire et administrative (deux ans) sur des territoires disposant préalablement d'une offre sanitaire dynamique et organisée, l'UNPS observe la difficile mise en œuvre opérationnelle et le peu d'intérêt des professionnels de santé libéraux pour le dispositif tel que proposé par le ministère de la Santé".
Pour l'UNPS, les professionnels de santé ne peuvent accepter que les coordinations territoriales d'appui (CTA) - "entités administratives dont la mission n'est pas la prise en charge du patient à son chevet" - réalisent elles-mêmes les projets personnalisés de santé (PPS) ou analysent, évaluent et valident ceux réalisés par les professionnels de santé libéraux.
A contre-courant du discours ambiant, l'UNPS estime également que le modèle hospitalier du couple médecin-infirmier - reproduit dans le cadre du Paerpa - "n'a pas de sens pour une prise en charge au domicile du patient et que la coordination entre professionnels de santé ne peut se résumer au simple financement de l'écriture d'un PPS par un ou deux (voire trois) professionnels de santé".
Jean-Noël Escudié / PCA
Le Paerpa touché, mais pas coulé
Alors que l'UNPS se retire du comité de pilotage du dispositif Paerpa, la direction de la sécurité sociale (DSS) du ministère annonce, dans un communiqué du 7 mars 2016, une extension de l'expérimentation. Intervenant dans le cadre du Pacte territoire santé II, cette extension consiste à impliquer au moins un territoire d'expérimentation dans chaque région. La Bretagne, la Normandie, Auvergne-Rhône-Alpes, Paca et la Corse vont donc rejoindre le dispositif. Dans les autres régions, déjà engagées, cette nouvelle phase va se traduite par un élargissement de la taille des territoires d'expérimentation actuels, "afin d'asseoir les dynamiques de coopération". Un travail est également engagé pour étendre les Paerpa aux départements d'outre-mer. Dans son communiqué, la DSS précise également que 2.000 personnes ont déjà fait l'objet, au niveau national, d'un projet personnalisé de santé. S'il cite différentes initiatives locales mises en oeuvre dans ce cadre, le communiqué ne dit rien, en revanche, du bilan qualitatif du dispositif, ni de son éventuelle généralisation à terme (l'expérimentation étant toutefois prévue pour durer cinq ans).