Les maires d'Ile-de-France veulent construire, mais se plaignent des obstacles
A l'occasion des Assises et du Salon de l'habitat francilien - organisés du 8 au 10 décembre, au parc des expositions Paris Nord Villepinte, l'Association des maires d'Ile-de-France (Amif) publie les résultats d'une étude sur "Les maires et le développement de l'offre de logements", réalisée avec le Journal du dimanche. Cette question revêt en effet une acuité particulière en Ile-de-France, confrontée depuis longtemps à une insuffisance de l'offre de logements, notamment dans le parc social, et à des coûts d'accès souvent très élevés (voir notre article ci-contre du 8 octobre 2009). Lors de son discours de présentation du projet du Grand Paris, le 29 avril dernier, Nicolas Sarkozy avait d'ailleurs fixé un objectif de livraison annuelle de 70.000 logements en Ile-de-France, soit près du double du rythme de construction constaté avant la crise économique (voir notre article ci-contre du 30 avril 2009).
L'objectif du chef de l'Etat est partagé par la quasi-totalité des maires d'Ile-de-France, toutes tendances confondues : 98% des édiles de villes de plus de 10.000 habitants affirment ainsi avoir des projets de construction ou la volonté de construire dans leur commune. Cette proportion est de 96% dans les villes de 5 à 10.000 habitants et de 70% dans les communes de moins de 5.000 habitants. La nature des projets envisagés ou souhaités diffère selon la taille de la communes. Celles de plus de 10.000 habitants privilégient l'accession libre (97% de citations), le locatif social (88%) et l'accession sociale (80%), tandis celles de 5 à 10.000 habitants privilégient plutôt l'accession sociale et le locatif social (93% de citations chacun), devant le locatif privé (67%). L'enquête comporte également une question sur l'abaissement des plafonds d'accès au logement social décidé par la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement, mais les résultats sont difficilement exploitables compte tenu de la confusion dans les items proposés. Sur les projets urbains de densification par la construction de tours, il n'y a par contre aucune ambiguïté : 95% des maires de villes de moins de 5.000 habitants y sont défavorables, comme 81% de ceux des communes intermédiaires et 73% de ceux des villes de plus de 10.000 habitants. L'urbanisme de tours des années 70 a manifestement laissé des traces... La construction de pavillons est en revanche plébiscitée dans les deux premières catégories (respectivement 72% et 81% de maires favorables), mais nettement moins dans la troisième (seulement 42% de favorables). De la même façon, les maires de villes de plus de 10.000 habitants portent un jugement nettement plus sévère que leurs collègues sur l'application de la loi Dalo (droit au logement opposable) du 5 mars 2007. Tous se retrouvent cependant pour estimer que la mise en œuvre du Dalo serait facilitée si les communes avaient la délégation du contingent préfectoral (respectivement 94%, 90% et 74% de "oui").
Des freins multiples au développement de l'offre
La dernière partie de l'enquête est consacrée aux freins au développement de l'offre de logements. Les communes possédant un ou plusieurs terrains publics susceptibles d'accueillir des constructions étaient ainsi invitées à indiquer si elles se heurtent à des difficultés. Les maires des villes de plus de 10.000 habitants évoquent le prix (76% de citations), la pollution du site (47%), la difficulté d'identification d'un opérateur potentiel (37%) et la modification du PLU (34%). Les deux autres catégories de communes ne se voyaient curieusement proposer que les items prix et modification du PLU, ce qui interdit la comparaison. Enfin, une dernière question, plus générale, proposait une liste d'une douzaine de freins possibles au développement de l'offre de logements. Les résultats sont assez contrastés selon la catégorie. Cinq freins à la construction se détachent nettement parmi les maires de villes de plus de 10.000 habitants : le coût des équipements publics supplémentaires (89% de citations), le prix du foncier (87%), le financement (79%), le manque de foncier (77%) et les risques de recours contentieux (63%). Dans les communes intermédiaires (5 à 10.000 habitants), ce sont le prix du foncier (95% de citations), le coût des équipements publics supplémentaires (87%), l'opinion des électeurs (73%, qui correspondent à la difficulté à faire accepter le logement social), les procédures nécessaires pour modifier les documents d'urbanisme (69%) et les risques de recours contentieux (63%) qui se détachent. Les maires des petites communes d'Ile-de-France évoquent, pour leur part, le prix du foncier (89% de citations), le coût des équipements publics supplémentaires (83%), le financement (82%), le manque de foncier (79%) et le droit de réservation du préfet (66%).
Jean-Noël Escudié / PCA