Social / Finances - Les familles, grandes oubliées de la fiscalité locale ?
Alors que le débat sur la remise en cause de l'universalité des allocations familiales bat son plein, l'Unaf (Union nationale des associations familiales) publie une étude originale, intitulée "Fiscalité et tarification des services locaux : enquête sur la prise en compte des familles dans les communes et les structures intercommunales". Menée par 44 unions départementales, elle s'appuie sur l'analyse des réponses à un questionnaire de 1.700 communes et intercommunalités, représentant environ 10% de la population française.
Seules 9% des communes majorent l'abattement sur la taxe d'habitation
Le tableau qu'elle trace montre la grande diversité des prises en compte de la question familiale dans la fiscalité locale (taxe d’habitation et enlèvement des ordures ménagères) et dans les tarifs municipaux, ainsi qu'une méconnaissance des dispositifs et des leviers fiscaux sur lesquels peuvent jouer les collectivités.
La méconnaissance des dispositifs se lit, selon l'Unaf, dans le faible nombre de communes qui majorent l'abattement pour charge de familles au-delà du taux obligatoire. Ainsi, en 2012, seules 9% des communes ont majoré cet abattement pour ce qui concerne la taxe d'habitation. La décision en la matière est très fortement corrélée à la taille de la commune. Ainsi, 49% des villes de 10.000 à 100.000 habitants majorent les abattements et 84% de celles de plus de 100.000 habitants, contre seulement 5% des communes de 100 à 400 habitants.
Plus surprenant : la prise en compte de la situation familiale est minoritaire dans la tarification des services communaux. Par exemple, les deux tiers de communes proposent une cantine scolaire, mais seules 31% d'entre elles prennent en compte la situation familiale dans la tarification du service. Ici aussi, le facteur taille est décisif : 100% des communes de plus de 100.000 habitants tarifient sur la base de la situation familiale, contre seulement 10% de celles de 100 à 400 habitants, 12% de celles de 400 à 1.000 et 37% de celles de 1.000 à 10.000. Les écarts sont très voisins pour ce qui concerne la tarification des services périscolaires communaux (garderies, centres de loisirs, études surveillées, ateliers périscolaires...), avec toutefois un taux moyen plus élevé, puisque près d'une commune sur deux (47%) tarifie ces services sur la base de la composition familiale.
La tarification familiale est en revanche beaucoup plus rare pour les bibliothèques, puisque seules 10% des communes y ont recours (4% des communes de 400 à 1.000 habitants et 33% de celles de plus de 100.000 habitants). Même situation pour les piscines, où la tarification familiale est pratiquée par 17% des communes (8% pour les communes de 100 à 400 habitants et 67% de celles de plus de 100.000 habitants).
Une prise en compte de la famille plus poussée dans les intercommunalités
L'étude de l'Unaf montre aussi que la prise en compte de la situation familiale est plus développée dans les structures intercommunales. Ainsi 45% d'entre elles majorent l'abattement pour charge de famille (contre 9% pour les communes). Cet écart s'explique toutefois en partie par un effet mécanique : les intercommunalités sont - par principe - plus peuplées que les communes ; or l'étude montre que la prise en compte de la situation familiale est fortement liée au nombre d'habitants de la collectivité. Pour la même raison, les intercommunalités recourent davantage au quotient familial pour les services aux enfants.
Sans surprise, l'Unaf conclut son enquête par un appel à "une prise en compte renforcée des facultés contributives des familles" et à une majoration du taux des abattements obligatoires à la taxe d’habitation pour charge de famille, "car le taux actuel est trop bas pour pleinement prendre en compte la présence d’enfants à charge". L'association demande également que soit instaurée une obligation d’intégrer le nombre de personnes résidant dans le ménage dans le calcul de la taxe ou redevance sur l’enlèvement des ordures ménagères, si une part variable est prise en compte.