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Education - Les élus locaux disent oui à la refondation de l'école mais s'interrogent sur son financement

Les associations d'élus locaux mettent toutes en avant l'intérêt de l'enfant et s'engagent à jouer le jeu de la semaine des 4,5 jours. Elles attendent toutefois avec fébrilité les précisions sur les modes de contractualisation avec l'Etat et ses concours financiers. Quant au recours à la péréquation, il semble, pour nombre d'élus, pour le moins hasardeux.

Les associations d'élus locaux seront attentives, jeudi 11 octobre, à la présentation, par Vincent Peillon, des grandes lignes de la loi d'orientation et de programmation pour l'éducation, au Conseil supérieur de l'éducation. Si elles se félicitent toutes du retour de la semaine à 4,5 jours, conscientes que c'est "dans l'intérêt de l'enfant", elles n'ont pas trouvé toutes les réponses à leurs interrogations dans le discours du président de la République, mercredi 10 octobre, à la Sorbonne, en clôture de la concertation pour la refondation de l'école.
La plus enthousiaste est évidemment l'Association des régions de France qui s'est immédiatement félicitée que le président de la République ait "reconnu la place qu'ont prise les régions dans le système éducatif" et qu'il a "confirmé le rôle qui devrait être le leur, tant dans la définition de la carte des formations professionnelles que dans le pilotage de services publics régionaux d'orientation, aux côtés de l'éducation au choix réalisée par l'Education nationale dans les collèges et lycées". C'est la rançon d'une participation "active" à la concertation, comme le souligne un communiqué de l'ARF. Une participation illustrée notamment par la voix de François Bonneau, président de la commission Education de l'ARF, président de la région Centre, qui était un des quatre membres du comité de pilotage de la concertation. C'est donc très naturellement que les régions se retrouvent dans le "projet progressiste" que constitue le rapport de la concertation qui a par ailleurs le mérite, pour elles, de "ne pas oublier d'articuler les projets des élèves avec les nécessités du développement économique des territoires". Si bien que "les régions attendent maintenant avec sérénité les discussions qui vont s'engager pour la préparation de la loi". Une "sérénité" qui n'est pas partagée par toutes les associations d'élus.

Concours de l'Etat et péréquation

"Les aides de l'Etat sont très attendues", résume Pierre-Alain Roiron, maire de Langeais (Indre-et-Loire), qui est par ailleurs très attaché à l'idée de déployer un dispositif de péréquation entre les communes riches et celles qui en auraient le plus besoin. Une proposition qu'il a soutenue dans le cadre de la concertation où il participait au titre de l'Association des maires de France, avec son collègue Pierre-Yves Jardel, maire d'Orbais-l'Abbaye (Marne) et président de la communauté de communes de la Brie des Etangs. "Certaines communes rurales consacrent déjà 40 % de leur budget à l'école", souligne pour sa part Pierre-Yves Jardel qui voit mal comment elles trouveront le personnel qualifié pour assurer les temps périscolaires ("il faut que les enfants puissent s'ouvrir à la culture, au sport… ce ne doit pas être une garderie"), ni comment le payer, ni les locaux où les accueillir… "Les fonds de concours de l'Etat, c'est bien, la péréquation est une bonne idée mais difficile à mettre en place", réfléchit cet élu qui se qualifie pourtant d'"optimiste" sur le lien qui unit la commune et l'Etat "depuis 150 ans" pour tirer l'école primaire vers le haut. Il n'y a pas de raison, selon lui, de douter de ce lien "tant que tous les deux tirent dans le même sens et qu'il n'y en a pas un pour dire ce qu'il faut faire et l'autre qui paye".
A l'Association des maires ruraux de France (AMRF), même climat d'interrogation et même bonne volonté affichée. "Nous sommes favorable à la semaine de 4,5 jours car c'est l'intérêt de l'enfant qui prime, y compris chez les maires ruraux, dans un contexte où il y a de plus en plus d'enfants scolarisés en milieu rural", affirme l'AMRF qui s'engage à "jouer le jeu". Elle ne manque toutefois pas l'occasion de rappeler combien un dispositif à caractère national, de surcroît lorsqu'il implique des financements de la part des collectivités, ne pourra pas être absorbé de manière identique dans les grandes villes, les villes moyennes et les plus petites. "Plus de temps périscolaire, plus de restauration scolaire, cela veut dire que cela un coût : soit c'est la collectivité qui paye, soit les parents, soit l'Etat." Et l'AMRF de plaider pour "le rééquilibrage des dotations en faveur des territoires ruraux, pour répondre de la même manière dans une logique d'égalité républicaine".
Le discours n'est pas très différent chez les grandes villes. L'AMGVF se félicite du renouvellement de la contractualisation entre l'Etat et les collectivités à travers le projet éducatif local, preuve, pour elle que "l'Etat ne se désengagera pas". Tout est question de proportion : "Il ne s'agirait pas qu'on soit les seuls à payer", ajoute-t-elle.

Les territoires touristiques défendent le zonage

Plusieurs associations d'élus touristiques se sont associées dans une position commune tournée exclusivement vers les préoccupations de développement économique local. : l'Association nationale des maires des stations de montagne (ANMSM), l'Association nationale des maires des stations classées et des communes touristiques, l'Association nationale des élus de la montagne (Anem) et l'Association nationale des élus du littoral (Anel).
Elles sont favorables à la semaine de 4,5 jours avec mercredi travaillé, libérant deux jours de week-end, car "elle facilite la fréquentation des stations par les clientèles de proximité et les adeptes des courts séjours".
Pour les vacances hors été, "on est condamné à conserver un zonage en trois zones régionales", commente l'Anem qui retient par ailleurs la position des chronobiologistes assurant que "les bienfaits du 7/2 [NDLR : 7 semaines d'école suivies de 2 semaines de vacances] restent à vérifier". Les quatre associations d'élus proposent, pour l'hiver, une amplitude de quatre semaines et pour le printemps, une programmation plus tôt en avril.
Une formule qui permettrait de garantir aux stations une fréquentation sur une période longue et d'éviter les phénomènes de saturation en fluidifiant les fréquentations touristiques. "Ces périodes, en particulier les vacances d'hiver, sont essentielles à l'activité touristique des stations de montagne qui génère un chiffre d'affaires annuel estimé à 7 milliards d'euro", fait notamment valoir l'ANMSM.
Pour les vacances d'été, les quatre associations d'élus militent pour une plage, commune à toutes les zones, de quatre semaines : entre le 15 juillet et le 15 août. Pour elles, le "calendrier triennal glissant" est également une priorité car il permet aux professionnels et aux associations d'élus des territoires touristiques d'être consultés chaque année sur le calendrier des vacances scolaires de l'année n+3 et d'avoir une visibilité sur les trois prochaines années. Elles se mettent ainsi à la place des professionnels qui cherchent à fidéliser leurs clientèles et à préparer des offres tarifaires pour les tours opérateurs sur différentes périodes de la saison. Elles ne renieraient pas les propos du délégué général de Domaines skiables de France, Laurent Reynaud, lorsqu'il déclarait la semaine dernière à l'AFP : "Bien sûr c'est l'intérêt de l'enfant qui prime (...) mais l'intérêt de l'emploi reste aussi une priorité du gouvernement. Et 120.000 emplois dépendent directement de l'activité hivernale des stations (moniteurs, hébergeurs, restaurateurs, loueurs ski...)."