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Développement des territoires - Les élus de montagne défendent leur place dans le nouvel acte de la décentralisation

L'Association nationale des élus de montage (Anem) organise les 25 et 26 octobre 2012 son 28e congrès à Bastelica, en Corse (notre photo). Au programme : des réflexions autour du nouvel acte de la décentralisation, de l'accès aux soins et des perspectives européennes. A cette occasion, Vincent Descoeur, son président, fait le point sur les attentes de l'association sur ces différents sujets.

Localtis : Quelles sont les préoccupations actuelles des élus de montagne ?

Vincent Descoeur : Actuellement, la question centrale est la place de la montagne dans la prochaine réorganisation territoriale. L'Anem a été très présente lors de la précédente réforme. Elle était précurseur en matière d'intercommunalité, elle a défendu des spécificités, comme les financements croisés, et elle s'interroge maintenant plus que d'autres sur la place du département car il est garant de la cohésion territoriale. Il y a notamment en question le mode de scrutin. Tout système qui éloignerait les populations de nos territoires des processus de décision nous inquiéterait… Nous attendons d'en savoir plus concernant le nouvel acte de la décentralisation. Pour le moment, le département a été confirmé mais pas conforté, et on a entendu François Hollande parler d'une plus grande spécialisation pour les départements plutôt qu'un rôle dans l'aménagement du territoire.

Les départements devraient toutefois regagner la clause générale de compétence. C'est un point positif ?

Le retour à la compétence générale (1) est un point important car il donne la possibilité d'agir sur un sujet dès lors qu'on est utile. Mais il reste la question de la péréquation. A dotation égale, avec en plus un contexte financier contraint, comment serons-nous assurés qu'il y aura une péréquation pérenne ? Les mécanismes dont on dispose actuellement, par exemple sur les droits de mutation ou la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), ont le mérite d'exister mais ils ont déjà montré leurs limites et perdent de leur efficacité. On s'interroge sur la création de mécanismes durables et pérennes. Dans le domaine du très haut débit par exemple, certains territoires vont bénéficier d'une offre privée, mais pour d'autres, et c'est le cas de presque tous les territoires de montagne, il faudra créer des partenariats public-privé, avec des engagements des collectivités, pour équiper les territoires.

Qu'en est-il de ces projets à financements croisés ?

Au cours de la précédente réforme, nous avons défendu bec et ongles les projets à financements croisés en provenance de plusieurs partenaires. Mais dans son discours, à la Sorbonne le 5 octobre 2012, le président de la République a signalé qu'il plaçait ce sujet parmi ceux qui ajoutent à la difficulté. Pourtant, les élus savent faire et s'y retrouver. Ils sont compétents en la matière et ils ont besoin de multiplier les partenariats. Beaucoup de projets en montagne ne verraient pas le jour sans financement croisé.

Concernant les services publics, comment voyez-vous l'avenir ?

La question des services publics est très importante, il suffit de se référer à l'actualité et au drame qui est survenu dernièrement [une mère a perdu son enfant en accouchant sur l'autoroute près de Brive le 19 octobre 2012, ndlr]. L'idée qui circule actuellement est que dans certains territoires, le maillage se traduit non pas par la proximité mais par les délais d'accès au service. Nous avons une circulaire [du 12 janvier 2012, ndlr] sur l'école de montagne qui va dans ce sens mais elle est interprétée de manière différente d'un territoire à l'autre… On manque de loi là-dessus. Une loi donnerait une obligation, car sinon rien n'interdit d'organiser les services de manière différente sans se soucier des délais d'accès. Mais bien sûr, toute décision concrète sur le sujet entraînera un coût…

Propos recueillis par Emilie Zapalski 

(1) Les régions et départements ont perdu la clause de compétence générale dans le cadre de la loi de réforme des collectivités du 16 décembre 2010. Le futur acte III de la décentralisation pourrait la réhabiliter.