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PLF 2011 - Les députés aménagent la contribution économique territoriale au profit des collectivités

L’Assemblée nationale a adopté, dans la soirée du 15 novembre, une série d’amendements du rapporteur général du Budget qui reviennent sur les dispositions fiscales concernant la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) dont s’acquittent les entreprises à la place de la taxe professionnelle.
L’un des amendements, auquel s’est finalement "ralliée" la ministre de l’Economie, vise à "donner un peu de marge" aux communes et aux intercommunalités "privées de 600 à 700 millions d’euros de recettes fiscales" par la censure du Conseil constitutionnel, à la fin de l’année dernière, du régime dérogatoire de contribution économique territoriale pour les entreprises soumises au régime des bénéfices non commerciaux de moins de 5 salariés – grosso modo les professions libérales. Concrètement, les communes et leurs groupements auront des marges de manœuvre supplémentaires lorsqu’elles fixeront le minimum de la cotisation foncière des entreprises (CFE). Le droit existant prévoit que les collectivités peuvent fixer une base de cotisation minimum entre 200 et 2.000 euros pour les contribuables dont le chiffre d’affaires est inférieur à 100.000 euros. L’amendement Carrez les autorise à voter une nouvelle base de cotisation minimum située entre 200 et 6.000 euros pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 100.000 euros. "Je suis bien entendu loin de penser que cela comblera le vide créé par la suppression du régime spécifique des BNC de moins de cinq salariés", a déclaré Gilles Carrez.

Des règles plus favorables aux territoires industriels

Les députés ont aussi modifié les règles de répartition de la CVAE entre les collectivités, qui aujourd’hui sont très défavorables aux territoires industriels. De telles règles ont fortement inquiété les territoires concernés qui ont persuadé le Comité des finances locales, puis Bercy, de modifier la législation. L’amendement reprend les propositions faites en juin dernier par les six parlementaires. La répartition de la valeur ajoutée s’effectuerait donc dans les proportions suivantes : pour deux tiers sur la base des effectifs - avec une majoration des effectifs pour les établissements industriels - et pour un tiers sur la base des valeurs locatives des immeubles industriels. Le projet de loi de finances déposé en Conseil des ministres prévoyait l’affectation de la moitié du produit de la CVAE en fonction des effectifs - sans majoration de ceux des établissements industriels – et pour une autre moitié, en fonction d’un indicateur de surface défini par décret.

Une plus grande stabilité des recettes fiscales locales

Un autre amendement du rapporteur général vise à empêcher que les décisions concernant l’organisation juridique des groupes déterminent la répartition d'"une part déterminante" de la valeur ajoutée. "Nombre de maires ont eu des surprises, parfois cuisantes, avec la taxe professionnelle", a expliqué Gilles Carrez. "Alors que l’usine n’avait pas déménagé et que le nombre de salariés n’avait pas bougé d’une année sur l’autre, ils pouvaient se retrouver avec une taxe professionnelle divisée par deux ou par trois ! Parce qu’entre-temps il y avait eu une fusion, une absorption ou une scission, bref une modification de la structure juridique de l’entreprise qui vidait de substance l’assiette de la taxe." Adopté sans l’accord du gouvernement, l’amendement a pour objectif de prémunir les collectivités contre ce genre de mauvaise surprise.
Encore contre l’avis du gouvernement, les députés ont limité les possibilités d’optimisation fiscale des entreprises en matière de CVAE (voir l'amendement). Pour cela, ils ont décidé qu’une entreprise dont les comptes sont consolidés au titre de l’impôt sur les sociétés doivent l’être aussi au titre de la CVAE. Les entreprises n’auraient ainsi plus la possibilité de se présenter comme "la partie intégrante d’un ensemble" pour réduire leur imposition sur les sociétés et, dans le même temps, comme "une entité totalement indépendante" pour le calcul du chiffre d‘affaires qui détermine le taux d’imposition au titre de la CVAE. "Cette disposition est neutre pour les collectivités", a précisé le président de la commission des finances, Jérôme Cahuzac, cosignataire de l’amendement.
Les députés ont enfin simplifié les modalités de déclaration par les entreprises de leurs effectifs lorsque ceux-ci interviennent dans plusieurs communes (voir l'amendement). Au printemps dernier, les entreprises avaient dû compter leurs salariés en "équivalent temps plein travaillé". L’amendement prévoit que les salariés "devront être déclarés dans la commune où ils passent le plus de temps de travail, y compris si l’entreprise n’a pas d’établissement dans cette commune, dès lors que le salarié y travaille au moins trois mois".

Thomas Beurey / Projet publics