Archives

Fonction publique - Les dépenses de personnel des collectivités, toujours dans le collimateur de la Cour des comptes

Pour la Cour des comptes, les collectivités doivent réduire sensiblement leurs dépenses de personnel. Dans un nouveau rapport - centré sur la masse salariale de l'Etat -, elle avance des propositions choc liées à la maîtrise des effectifs dans la fonction publique territoriale, aux avancements de carrière et aux rémunérations.

La progression continue des dépenses de personnel des collectivités territoriales se trouve depuis quelques années dans le collimateur de la Cour des comptes. Celle-ci revient à la charge à l'occasion d'une enquête sur la maîtrise de la masse salariale de l'Etat demandée par la commission des finances du Sénat et dévoilée ce 9 septembre. Alors que l'Etat a déjà fourni "des efforts notables" pour limiter ses dépenses de personnel, la Cour estime que les collectivités territoriales doivent l'imiter.
Le respect des objectifs fixés dans la loi de programmation des finances publiques exige que l'Etat économise 450 millions d'euros par an sur sa masse salariale, celle-ci devant continuer malgré tout à augmenter de 250 millions d'euros par an. Quant aux hôpitaux et aux collectivités, ils devront économiser 900 millions d'euros par an sur ce poste.
Ces économies constituent aussi une condition pour financer les mesures de revalorisation des rémunérations des fonctionnaires contenues dans un projet d'accord sur lequel les syndicats doivent se prononcer d'ici au 30 septembre. La Cour évalue leur coût annuel à l'horizon 2020 dans une fourchette comprise entre 2,5 et 3 milliards d'euros pour la seule fonction publique d'Etat. Pour les trois fonctions publiques, ce coût atteindrait 4,5 à 5 milliards d'euros. La ministre de la Fonction publique a toujours refusé de communiquer le coût de ces mesures.

Réduction des effectifs : et la territoriale ?

La politique de gel du point d'indice qui a débuté en 2010, "ne pourra pas être prolongée indéfiniment" et sera "insuffisante" pour financer ces réformes, expliquent les magistrats. Aussi ont-ils conçu une "boîte à outils" très étoffée, dans laquelle le gouvernement et le Parlement n'auront, selon eux, qu'à se servir.
L'un des "leviers", la reprise de la baisse des effectifs de l'Etat, conduirait à renouer avec une politique menée durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy. Pour la Cour, elle devra s'accompagner d'un effort de maîtrise de leurs effectifs par les collectivités, particulièrement les communes et intercommunalités. En stabilisant le nombre de leurs agents, les collectivités feraient une économie de 800 millions d'euros par an, mais leur masse salariale continuerait à augmenter. Celle-ci ne baisserait que si les collectivités ne remplaçaient plus qu'un départ en retraite sur trois. Au passage, la Cour indique qu'"une vigilance particulière devra (…) s’attacher à la fusion à venir des régions, afin de faire des économies d’échelle et éviter les doublons de postes".
Pour "faciliter la baisse des effectifs sans coût supplémentaire mais aussi engendrer des économies", les magistrats appellent de nouveau à un respect par les collectivités de la durée légale de travail, fixée à 1.607 heures par an. Lors du passage aux 35 heures, il avait été décidé de maintenir les accords dérogatoires antérieurs octroyant un temps de travail inférieur, en particulier dans 1.550 collectivités locales. De ce fait, la durée de travail dans la fonction publique territoriale ne serait actuellement que de 1.567 heures par an.

Des avancements de carrière trop rapides

Un autre "levier" consiste, pour l'institution de la rue Cambon, à rendre moins rapide le déroulement de carrière des agents. Ainsi, les avancements d'échelon des agents territoriaux devraient être accordés moins systématiquement en fonction de l'ancienneté minimale. En revanche, le gel temporaire des avancements, solution que la Cour a préconisée dans un précédent rapport, serait en fait "non dépourvue d'inconvénients".
En matière de rémunération, les magistrats proposent de faire évoluer plusieurs dispositifs qui ont la particularité de concerner les agents des trois fonctions publiques. Là encore, la Cour n'y va pas avec le dos de la cuillère. Elle prône la réduction du nombre de primes et indemnités indexées sur la valeur du point d’indice, la révision des règles de calcul - avantageuses selon elle - de la garantie individuelle du pouvoir d'achat (Gipa) et du traitement minimum (l'équivalent du Smic dans la fonction publique). Sont aussi préconisés : la limitation du bénéfice de l'indemnité de résidence aux fonctionnaires travaillant en Ile-de-France, la suppression progressive du supplément familial de traitement, l'arrêt des temps partiels à 80% et 90 % payés respectivement 85,7 % et 91,4 %, ou encore la limitation des majorations accordées aux fonctionnaires en poste en Outre-mer.
En 2014, la masse salariale publique - c'est-à-dire les dépenses de personnel des 5,4 millions de fonctionnaires (d'Etat, territoriaux et hospitaliers), auxquels s'ajoutent les agents des organismes publics - a atteint 278 milliards d'euros, soit près du quart de la dépense publique, indique la Cour.
Au cours des dix dernières années, elle a augmenté en moyenne de 2,4% par an, "soit un rythme comparable" aux salaires du secteur privé. Mais cette croissance masque des évolutions contrastées. Alors que l'Etat réduisait le nombre de fonctionnaires entre 2008 et 2012 avec le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux, les effectifs des collectivités territoriales augmentaient en moyenne chaque année de 1,3% entre 2009 et 2012. Sur la même période, ceux des hôpitaux grimpaient de 1,2% chaque année.