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Refondation de l'école - "Les collectivités ne sont pas que des carnets de chèques" (Vincent Peillon)

Vincent Peillon compte sur les collectivités pour mettre en oeuvre la refondation de l'école. Sur leur capacité de financement, mais pas seulement, assure-t-il. Message reçu par les associations d'élus, qui expriment leur bonne volonté tout en soulignant les obstacles difficilement surmontables et en demandant un délai d'adaptation.

"Je compte beaucoup sur les élus locaux pour réussir", a déclaré Vincent Peillon, mercredi 24 octobre, devant la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale. Dans le projet de loi d'orientation et de programmation sur la refondation de l'école, qui sera présenté en Conseil des ministres en décembre, "beaucoup d'éléments associeront mieux les collectivités qui ne sont pas que des carnets de chèques", a-t-il ajouté, rappelant que déjà, "25% de la dépense éducative vient des collectivités". Elles doivent "aussi pouvoir décider et contractualiser des orientations pédagogiques, des contrats d'objectifs, des plans éducatifs locaux", a ajouté le ministre.
"Les collectivités ne peuvent être là juste pour signer des chèques", avait-il déjà assuré aux élus locaux, le 16 juin, à l'issue de la réunion avec six associations représentatives (AMF, ADF, ARF, AdCF, AMGVF, AMRF), selon le compte rendu fait par l'une d'elles (voir l'article ci-contre paru dans AdCF Direct). Selon cette même source, Vincent Peillon se serait déclaré "extrêmement surpris par la teneur des échanges et le caractère éminemment constructif des interventions" ainsi que "conforté dans sa volonté de renforcer le copilotage de la réforme par l'Etat et les collectivités et de redynamiser les outils nationaux et locaux de concertation à cette fin".
D'une manière générale, la nouvelle approche contractuelle, élargie aux collectivités (contrats tripartites entre rectorat, établissements et collectivités), aurait été "unanimement approuvée". Ainsi l'AMF, dans un communiqué de presse daté de jeudi 25 octobre, fait savoir que "s’agissant des rythmes éducatifs, [elle] souhaitait un cadre national mais pouvant être aménagé localement. Elle se réjouit de la prise en compte de cette demande par le ministre de l'Education nationale". Et d'ajouter : "Il est en effet indispensable d'associer plus directement les maires et présidents d’EPCI à la décision locale, liée au territoire et non à l'établissement, au minimum à l'échelle de la commune ou de l'intercommunalité."

Les collectivités pas prêtes pour la rentrée 2013

Vincent Peillon aurait également reconnu que "la mise en oeuvre des nouveaux rythmes scolaires ne serait pas simple" et que "nous avons la durée du quinquennat pour réussir".
Justement, les associations d'élus auraient souligné "le temps d'adaptation qu'il faudra laisser aux collectivités pour définir des solutions acceptables, tant avec les personnels qu'avec les associations mais aussi les entreprises (restauration, transport…)". "Les élus s'interrogent sur les moyens dont ils disposeront pour organiser et financer le temps périscolaire supplémentaire, notamment au regard des difficultés de recrutement des personnels en milieu rural", confirme l'AMF. Estimant que "l'application de la réforme à la rentrée serait trop juste pour permettre aux communes de se préparer correctement", elle demande "un délai de deux ans".
L'AMF calcule que, dans le projet du ministre, 1 h 30 d'accueil éducatif complémentaire par semaine serait à la charge des communes et communautés. Une charge qui "doit faire l'objet d'une évaluation précise de son impact". Les conseils généraux la chiffreraient à 60 millions d'euros pour ce qui les concernent, les grandes villes estimant à 15% les surcoûts engendrés.

Pistes intercommunales

"Le sujet de la péréquation financière et des modalités d'intervention du fonds de compensation qu'envisage l'Etat a été largement évoqué", rapporte l'AdCF, en pointe depuis longtemps sur le sujet de la péréquation. Deux de ces représentants, l'un urbain, Etienne Butzbach, président de la communauté d'agglomération de Belfort, l'autre rural, Marc Fesneau, président de la communauté de communes Beauce et forêt, ont souligné "les concours que l'intercommunalité pouvait apporter aux communes en termes de mutualisation voire d'harmonisation des niveaux de services". Souhaitant la constitution d'un "véritable service public péri et post-éducatif", Etienne Butzbach a plaidé pour des projets éducatifs locaux conçus à des échelles plus larges que les communes afin de "renforcer les solidarités territoriales, mobiliser un tissu associatif qui ne présente pas le même dynamisme d'une commune à l'autre, optimiser l'usage des équipements à l'échelle du bassin de vie scolaire". Il a proposé que ces futurs contrats puissent faire l'objet d'expérimentations sur des territoires-pilotes. Marc Fesneau a quant à lui évoqué les 450 communautés rurales qui s'investissent déjà dans la gestion d'équipements scolaires. "Tout en confortant les responsabilités de premier plan des équipes municipales et des maires, l'intercommunalité scolaire sera à développer pour résorber les fractures scolaires et s'adapter aux nouveaux rythmes", propose l'AdCF, soulignant que "les incidences sur les compétences intercommunales (transport scolaire dans les agglomérations, équipements culturels et sportifs…) nécessiteront d'impliquer les communautés dans la nouvelle contractualisation proposée par le ministère".

Equipement numérique des écoles

Sur le numérique, l'AMF a pris acte de la volonté du ministre d'assurer une meilleure formation de l'ensemble des enseignants et un développement de ressources pédagogiques numériques innovantes. "Ces deux engagements sont déterminants pour justifier l'effort d'équipement des écoles demandé aux élus, et qui ont besoin d'avoir une meilleure visibilité sur les choix adéquats", insiste l'AMF, satisfaite par ailleurs de "l'annonce faite par le ministre en faveur de la négociation d'offres d'achat d'équipements attractives, incluant la maintenance", qui répond à l'une de ses demandes.
Enfin, "la question des directeurs d'école doit être traitée avec beaucoup de sérieux, et dans un dialogue avec eux que j'ouvrirai au premier trimestre 2013", a annoncé Vincent Peillon lors de la commission parlementaire. Les directeurs d'école, interlocuteurs permanents des communes (pour la cantine, le périscolaire, le transport en car lors d'une sortie scolaire…), ressentent une véritable "souffrance au travail" face à des missions "pléthoriques", selon une enquête du SE-Unsa publiée le 18 octobre. Le dialogue annoncé permettra de "reconnaître le travail spécifique de la direction d'école", se félicite Sébastien Sihr, du syndicat SNUipp-FSU, citant notamment "la gestion des relations avec la mairie" qui "ne s'improvisent pas".