Développement local - Les centres-ville organisent leur premier "speed dating"
On connaissait déjà le "Meetic" du commerce : le site Ville & Commerce lancé par la Confédération des commerçants de France il y a deux ans pour mettre en relation élus et commerçants. Prochainement, élus et commerçants pourront échanger leurs numéros autour du premier speed dating du genre. A l'occasion de la onzième édition des assises nationales du centre-ville organisée à Rennes les 9 et 10 juin 2016, axée sur la ville intelligente, l'association Centre-ville en mouvement lancera pour la première fois un "centre-ville dating" qui permettra aux élus d'aller à la rencontre d'enseignes nationales, de franchises, de fédérations nationales de commerce de bouche pour présenter les atouts des locaux disponibles dans leurs villes, pouvant accueillir de nouveaux magasins commerciaux et artisanaux en cœur de ville. "Ce sont les enseignes qui exposent, aux élus de les attirer chez eux", a expliqué Pierre Creuzet, directeur général de Centre-ville en mouvement le 18 mai, à l'occasion de la présentation à la presse des assises. Autre nouveauté : la publication d'un baromètre des attentes du centre-ville et du commerce. Les résultats de cette enquête CSA, menée auprès de 1.000 personnes de plus de 18 ans, représentatives du territoire, qui seront dévoilés le 8 juin, portent sur six thèmes : comment les Français se représentent le centre-ville de 2016, le rapport des personnes à leur centre-ville, leurs attentes pour un centre-ville idéal, le commerce de centre-ville par rapport à la périphérie, la digitalisation du parcours citoyen consommateur, et la mobilité et le stationnement en centre-ville. D'après Bernard Reynes, premier vice-président de Centre-ville en mouvement, député-maire de Châteaurenard, "il y a une véritable prise de conscience de l'ensemble des maires que le centre-ville est essentiel ; tous les maires sont ainsi arcboutés sur le renouveau du centre-ville."
Une SEM détenue à 43% par les commerçants pour racheter le marché à Niort
Après une phase de développement sans entrave de la grande distribution, "à l'heure actuelle, des positions se clarifient, s'affirment, pour se concentrer sur la dynamisation des centres-ville ; la question du cœur de ville se pose avec beaucoup d'acuité, a assuré pour sa part Michel-François Delannoy, chargé du dispositif "Centres-ville de demain" à la Caisse des Dépôts (voir encadré ci-dessous), comme la décision par exemple de geler les extensions commerciales, ce qui ne se faisait pas auparavant, pour préserver l'emploi".
Dans ce travail de redynamisation, l'économie mixte est aux premiers loges. Ainsi, une société d'économie mixte a été montée à Niort pour racheter le marché local. Elles est détenue à 57% par l'agglomération et à 43% par des commerçants. La municipalité de Montrouge, ville souvent citée en exemple, a elle aussi recouru à une SEM pour racheter les pieds d'immeuble. "Si les élus souhaitent vraiment révolutionner les choses, il y a des outils et le consommateur est réceptif à l'embellissement du centre-ville", a appuyé Pierre Creuzet, directeur général de Centre-ville en mouvement, citant comme autres exemples la passerelle construite à Cherbourg pour relier les deux parties de la ville ou encore le rachat pour un euro symbolique du centre commercial des 4B, qui n'a jamais trouvé sa clientèle, par la mairie de Calais...
"Il y a un attachement au cœur de ville très important"
L'association, rassemblant élus et parlementaires depuis 2005, fait aussi la promotion des nouveautés découvertes dans d'autres pays. "Nous essayons de présenter les nouveaux concepts. Il y a beaucoup de choses qui sont en train de se développer, cela donne énormément d'espoir pour le centre-ville", a précisé le directeur général de Centre-ville en mouvement, citant par exemple l'utilisation d'imprimantes 3D, pour la reproduction de bagues ou de pièces détachées pour des appareils électroménagers. "La population réclame que son cœur de ville soit convivial ; on est souvent très négatif, mais il y a un attachement au cœur de ville très important", a-t-il dit. Les magasins doivent évoluer de plus en plus vite. Auparavant, les concepts du groupe Casino, partenaire de l'association, étaient renouvelés tous les dix ou quinze ans, maintenant c'est tous les sept ans. Le groupe a ainsi lancé un nouveau concept de Franprix baptisé "Mandarine" depuis mars 2015 qui intègre des machines à presser les oranges, des machines à café, la cuisson du pain sur place, des mini-rôtisseries, des mange-debout… Des éléments qui créent un véritable lieu de vie. L'enseigne compte convertir l'ensemble de ses magasins d'ici 2017. Le retour des fournils dans les boulangeries, des machines à coudre dans les magasins, ou l'utilisation de locaux originaux (une boucherie pour un salon de coiffure) sont aussi utilisés pour attirer les consommateurs dans les centres-ville.
Emilie Zapalski
La première convention "Centre-ville de demain" signée à Libourne
Située à une trentaine de kilomètres de Bordeaux, Libourne a souffert ces dernières années de l'attractivité commerciale de la métropole régionale. Aujourd'hui, le maire, Philippe Buisson, président de la communauté d'agglomération du Libournais (la "Cali"), veut croire au renouveau de son centre-ville. C'est le sens de la première convention "Centres-ville de demain" signée, le 19 mai, avec le directeur général de la Caisse des Dépôts, Pierre-René Lemas, pour une durée de quatre ans.
Ces conventions sont le fruit d'un partenariat passé entre la Caisse des Dépôts et l'Association des maires de France, le 30 mars, à l'occasion des 25 ans de Mairie-conseils (voir ci-contre notre article du 4 avril 2016). Il s'agit de mobiliser tous les outils du Groupe pour accompagner les plans de redynamisation des centres de villes de 15.000 à 100.000 habitants aujourd'hui en difficulté.
Avec cette première convention, la Caisse des Dépôts s'engage ainsi à mettre à disposition de la ville et de la Cali "ses moyens de financement en ingénierie, en fonds propres ou en prêts pour accompagner la nouvelle dynamique de cœur de ville initiée par Libourne à travers son projet urbain adopté en 2015", précisent les partenaires, dans un communiqué commun. Elle soutiendra par exemple les travaux d'aménagement de voirie, d'assainissement et d'eau ou la réhabilitation d'une école du centre. Elle financera aussi le programme de requalification de l'habitat et de revitalisation du commerce du "cœur de bastide", sachant que Libourne est comme de nombreuses villes moyennes "confrontée au problème d'habitat vacant – 1.400 logements recensés – et dégradé, de rez-de-chaussée commerciaux fragilisés voire vacants". Ce programme de reconquête du centre-ville s'inscrit dans un grand projet urbain que la ville dévoilera le 1er juillet 2016 : "Libourne 2025". A cette occasion sera organisé le premier atelier "péri-métropolitain" au plan national, autour d'urbanistes, architectes, chercheurs... Libourne souhaite "ouvrir l'échange autour du positionnement péri-urbain des villes moyennes voisines de grandes métropoles", poursuit le communiqué. En clair, prouver qu'elle peut aussi tirer parti du rayonnement de la métropole bordelaise.
M.T.