COP21 - La logistique urbaine : un enjeu contre la pollution des centres-ville

A l'approche de la COP21, l'association Centre-Ville en Mouvement souligne les enjeux environnementaux des coeurs de ville à travers l'éclairage public et, surtout, la logisitique urbaine, sachant que les livraisons représentent 32% des déplacements en ville et autant d'émissions de CO2. Dans la métropole grenobloise, collectivités et acteurs privés ont ainsi signé un plan d'action pour une logistique urbaine durable... Par ailleurs, pour redynamiser les centres en déclin, l'association relance l'idée d'un dispositif de défiscalisation.

A l'approche de la COP21, tout le monde y va de son couplet. Et les centres-ville ont aussi leur mot à dire. Pour Pierre Creuzet, directeur général de Centre-Ville en mouvement, association d'élus et de parlementaires oeuvrant pour la redynamisation des centres-ville, ces derniers ont un rôle important à jouer dans la lutte contre le réchauffement climatique. "Les politiques ne se sont pas du tout posés le problème dans ce sens, mais la COP21 c'est aussi la proximité, explique-t-il à Localtis, quand on consomme dans les centres-ville, on consomme au plus proche." Cela va sans dire mais c'est mieux en le disant. L'association, qui a été reçue à l'Elysée le 8 octobre pour faire passer le message, a organisé une conférence sur le sujet le 14 octobre. L'occasion de mettre en avant les nombreuses initiatives mises en place par les villes labellisées "COP21", en matière de transport ou d'éclairage public, sachant que, selon l'association, le nombre de points lumineux dans l'Hexagone a augmenté de 30% en dix ans. Plusieurs communes ont décidé de supprimer l'éclairage public certaines heures de la nuit. La ville de Saumur, elle, s'est même équipée de lampadaires dotés de cellules capables de détecter les mouvements et de s'allumer en conséquence...

La politique du dernier kilomètre ne fait pas voter !

Mais pour les centres-ville, l'un des gros enjeux environnementaux demeure la logistique urbaine, avec la question du "dernier kilomètre" de livraison. Un sujet qui reste difficile à aborder par les élus car, comme le signale Pierre Creuzet, "cela ne fait pas voter !". Pourtant, la livraison de marchandises représente 32% de la circulation en centre-ville et elle a tendance à augmenter avec la croissance du e-commerce et le développement de stratégies multicanales (vente en ligne et boutique physique) mises en place par les commerçants.
Pour Danièle Patier, vice-présidente de Centre-Ville en Mouvement, le transport de marchandises en centre-ville est le plus souvent considéré comme "un mal nécessaire". Pourtant "l'approvisionnement ne doit pas être considéré comme une verrue, mais comme quelque chose qui doit être intégré", a insisté la vice-présidente lors de cette conférence, mettant en valeur les outils qui existent actuellement pour tracer les livraisons et prévoir le nombre d'établissements concernés, le nombre de déplacements à venir, etc. Le modèle de simulation du transport de marchandises en ville Freturb est aujourd'hui utilisé par 55 villes seulement, a-t-elle précisé. "Nous organisons des ateliers de l'innovation pour rendre compte des avancées dans ce domaine, mais nous avons peu de succès car les élus préfèrent aller dans les ateliers qui concernent le commerce."
Même constat du côté du groupe La Poste concerné au premier chef par ces problèmes de congestion et de pollution. "Personne ne paiera plus cher pour un transport plus propre", a constaté Benjamin Demogé, directeur du programme prioritaire logistique urbaine de La Poste, nous sommes dans un monde de centimiers. Pour nous, La Poste, l'enjeu est de faire à même coût une meilleure logistique urbaine." Le groupe, qui en a fait une priorité de sa stratégie, a par exemple décidé de multiplier ses points-relais et de construire un réseau très dense de consignes automatiques. Quant à la question d'organiser un service public de la logistique, posée durant le colloque, le responsable de La Poste préfère s'en remettre au marché. "Dans la livraison en ville, il y a un nombre important de filières, qui sont très spécialisées, ce sont de vrais métiers et s'improviser grand intégrateur de l'ensemble paraît difficile", a signalé Benjamin Demogé, citant toutefois l'exemple de Grenoble où collectivités et acteurs privés ont signé un premier plan d'action pour une logistique urbaine durable dans la métropole destiné à optimiser les flux de marchandises dans une logique économique, urbaine et environnementale. A l'heure actuelle, dans la métropole grenobloise, les flux de marchandises représentent plus de 190.000 "mouvements" par jour (enlèvements et livraisons) dont 40% dans la seule commune de Grenoble. Ce transport représente à lui seul 5% des émissions totales de particules fines et 30% des émissions d'oxydes d'azote. Parmi les engagements pris par les signataires : l'intégration de la logistique dans les documents d'urbanisme et de planification, l'amélioration de la desserte du centre-ville en étudiant la faisabilité d'un centre de distribution urbaine, le développement des services logistiques dans les centralités et les pôles d'échanges de l'agglomération, et l'élaboration d'un schéma des aires de livraison…

Des centres-ville prioritaires défiscalisés

Bernadette Laclais, présidente de Centre-Ville en Mouvement, et députée PS de Savoie, retient quant à elle l'idée d'un schéma directeur dans ce domaine, articulé au plan de mobilité des communes. "Il ne s'agit pas de rajouter une réglementation supplémentaire, mais de mieux articuler ce champ au plan de mobilité."
La présidente de l'association a avancé d'autres propositions dans le cadre de la COP21 comme l'idée de créer des centres-ville prioritaires, bénéficiant de système de défiscalisation, à l'image des zones franches urbaines. L'idée n'est pas nouvelle, elle a déjà fait l'objet d'une proposition de loi UMP déposée en 2013. "Il s'agirait de repérer les centres-ville en difficulté, il y en a environ une cinquantaine, et de leur proposer une défiscalisation pour inciter soit les propriétaires à faire des investissements pour les habitants, soit les commerçants à moderniser leurs magasins", a précisé l'ex-maire de Chambéry. Une manière, d'après elle, de sensibiliser tous les acteurs et de "donner un intérêt à faire", plutôt qu'une simple aide financière.
Enfin, la présidente de Centre-Ville en Mouvement a insisté sur l'idée de créer des sociétés d'économie mixte (Sem) régionales capables de racheter les pieds d'immeuble pour travailler avec les élus sur l'attribution des locaux.
Les prochaines assises de Centre-Ville en Mouvement auront lieu les 1er et 2 juin 2016 à Rennes.