Les associations d'élus pointent les failles de l'accord gouvernemental avec Orange sur la fibre
Abandon du 100% fibre en zone d’initiative privée (AMII), faible opposabilité de l’accord, nombreuses clauses limitatives… Cinq associations d’élus dénoncent les renoncements qu'entérine l'accord avec Orange sur la fibre.
Cinq associations d'élus - Avicca, Départements de France, FNCCR, Intercommunalités de France et les Interconnectés - ont affiché le 14 mars leurs réserves sur l'accord signé avec Orange deux jours plus tôt par la nouvelle secrétaire d’État au numérique Marina Ferrari (notre article du 12 mars 2024). Des critiques qui font écho à l'avis très mitigé de l'Arcep. "C'est la première fois que je note un avis de l'autorité aussi critique", nous confie Ariel Turpin, le délégué général de l'Avicca.
Abandon du 100% fibre en zone AMII
Les élus déplorent tout d'abord l'abandon de l'objectif du 100% fibre, repoussé à 2025 au lieu de 2022 comme le prévoyait l'accord de 2022. L'avis de l’Arcep estime que cet engagement aboutirait à "un taux de couverture de 97%" dans la zone AMII. Les associations ajoutent que "l'objectif de complétude est remplacé par un objectif de volume". Il ne tient pas compte, par exemple, des nouvelles constructions. Du reste, Orange s'engage selon elles plutôt "à ralentir". Pour le rattrapage dans les 55 EPCI, par exemple, les calculs de l'Avicca montrent que l'engagement sur 140.000 prises sur 18 mois… est inférieur aux 210.000 prises construites précédemment sur une même période de 18 mois.
En outre, les associations relèvent "de nombreuses conditions suspensives imaginées par Orange, conditions absentes du premier accord L 33-13". Le volet "raccordable à la demande" laisse notamment sceptiques les élus du fait des "limitations opérationnelles" introduites par Orange.
Sanctions très théoriques
Par ailleurs, les associations doutent du caractère opposable de l'accord. Il contient en effet "une date de péremption" fixée à septembre 2026. Cette date induit "qu'il faudrait que l'Arcep puisse contrôler les données transmises par l'opérateur début 2026 et vérifier la validité des nombreuses exceptions dans un délai (trop) court", souligne le communiqué. Au total Orange a donc peu de risque d'être sanctionné, alors même que les collectivités vont subir 155 millions d'annulations de crédit pour le plan France très haut débit (notre article du 27 février 2024).
Et au-delà des zones AMII, les élus soulignent que les engagements sur la zone très dense "ne sont pas opposables donc non sanctionnables". L'opérateur ne s'engage du reste à construire "que" 50% des prises restantes, alors qu'Orange y a assuré 80% des déploiements jusqu'à présent.
L'attachement à la fibre de la secrétaire d'Etat salué
Face à un gouvernement qui n'a pas tenu compte de l'avis de l'Arcep, les associations d'élus se raccrochent à un maigre espoir. La secrétaire d'Etat au numérique, qui a hérité d'un dossier qu'elle a dû défendre "malgré elle", veut-on croire à l'Avicca, a en effet déclaré que "100% des Français qui demanderont la fibre pourront y avoir accès". Une déclaration qui va dans le sens des aspirations des élus, même si les modalités de mise en œuvre, et en particulier le financement des raccordements longs et complexes pour parachever les réseaux FTTH publics, restent à définir.