Les acteurs du logement craignent de "perdre énormément de temps"
En introduction des Assises nationales du logement et de la ville, qui se tenaient mardi 25 juin à la Cité internationale universitaire de Paris, les membres de l’Alliance pour le logement ont fait part de leur inquiétude face à une instabilité politique venant retarder la reprise tant espérée du secteur.
C’est dans un climat évidemment tout particulier que les Assises nationales du logement et de la ville se sont ouvertes, mardi 25 juin à la Cité internationale universitaire de Paris (voir aussi notre article du 25 juin sur l'une des autres séquences de ces assises). Celui de l’incertitude et, disons-le, de franche lassitude. La vague de la dissolution semble en effet avoir emporté avec elle les maigres espoirs des acteurs du logement. Si les membres de l’Alliance pour le logement, qui introduisaient la journée, se sont gardés de commenter la décision du président de la République, tous s’accordent à dire que celle-ci retardera la potentielle reprise du secteur. La mise à l’arrêt de l’activité parlementaire implique de fait le report des travaux. "Après la crise du logement vient se greffer une crise politique et les marchés du logement n’aiment pas ça, souffle Loïc Cantin, président de la Fnaim. Guillaume Kasbarian, le ministre du Logement, était à notre écoute. Nous allons encore perdre du temps, alors que nous en manquons !"
Du côté de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) aussi, la météo est plus que maussade. "Depuis plus de deux ans, nous essayons de pousser les choses. Nous sentions un léger frémissement avec Guillaume Kasbarian, bien que son analyse était erronée et qu’il fallait travailler sur la solvabilité de la demande plutôt que sur un choc d’offre. Un projet de loi était sur la table, quoi qu’on en pense… Malheureusement, le logement n’est pas un sujet politique. On va encore perdre énormément de temps, c’est désespérant", regrette Didier Bellier-Ganière, délégué général de la FPI.
"Le neuf coule, la rénovation énergétique patauge…", déplore pour sa part Olivier Salleron, président de la Fédération française du bâtiment. Tandis que 10.000 emplois auraient déjà été perdus dans l’industrie de la promotion immobilière, selon la FFB, Grégory Monod, président du pôle habitat, redoute quant à lui le coût "colossal" de cette destruction d'emplois.
Des mea culpa raillés
Interrogée sur le mea culpa d’Emmanuel Macron et de Bruno Le Maire, qui estimaient mi-juin ne pas avoir "assez fait" sur le logement, Emmanuelle Cosse, présidente de l’Union sociale pour l’habitat (USH), déclare sans détour : "En 2022, j’étais reçue à Matignon et on me promettait déjà de faire mieux !" Grégory Monod ironise : "Bruno Le Maire préconise de relancer une grande consultation sur le logement avec les élus autour de la table. Je crois que cela s’appelle le CNR…"
La vraie question reste de savoir ce que la future majorité, quelle qu’elle soit, décidera pour répondre à la crise, tant du point de vue législatif que des actions réglementaires. Loïc Cantin s'interroge : "Sans majorité, comment le pouvoir législatif pourra-t-il prendre de vraies solutions ?"
Dans ce contexte, les collectivités constitueront des interlocuteurs fiables, selon Emmanuelle Cosse. Une position partagée par Laure-Anne Geoffroy-Duprez, présidente de l’UNSFA (union des syndicats d'architectes). "La reprise nécessitera un travail de dentelle avec les territoires, du sur-mesure. Les élus auront besoin d’être accompagnés en amont. Nous allons devoir garder les manches retroussées et faire preuve d’agilité."
Si les professionnels regrettent une campagne trop rapide pour établir un quelconque débat avec les futurs parlementaires et faire preuve d’innovation, tous entendent se serrer les coudes. "Il faut transformer le chaos grâce aux forces vives de la nation !", prône Loïc Cantin. L’Alliance parle ainsi d’un moment "historique" qu’il est possible de mettre à profit en établissant une vision prospective commune. Grégory Monod conclut : "Le logement est transpartisan et nous ne sommes pas des bétonneurs compulsifs ! Les élus doivent nous faire confiance dans l’aménagement des territoires."