Environnement - Le Sénat examine le volet énergie et climat du projet de loi Grenelle 2
L'examen du titre III consacré à l'énergie et au climat du projet de loi Grenelle 2 (art. 23 à 35) a débuté au Sénat, lors de la séance du 29 septembre 2009. Les schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie, qui se substituent aux plans régionaux pour la qualité de l'air, fixeront les objectifs régionaux en matière de maîtrise de l'énergie à l'horizon 2020 (en référence au paquet Climat-Energie) et 2050. Un amendement insère ainsi à l'article 23 les deux échéances qui structurent le cadre européen et international de lutte contre le changement climatique et déterminent les objectifs de moyen et long termes des économies en matière d'émissions de gaz à effet de serre (GES). Un autre amendement prévoit que dans chaque région et dans la collectivité territoriale de Corse, l'Etat pourra confier la maîtrise d'ouvrage des inventaires des émissions de polluants, d'émission de GES et des bilans énergie aux organismes régionaux agréés de surveillance de la qualité de l'air. Les bilans des émissions de GES prévus à l'article 26 devront être réalisés en cohérence méthodologique avec les bilans régionaux établis dans le cadre de l'article 23. Ces bilans pourront également être confiés aux organismes agréés de surveillance de la qualité de l'air existants.
Le cadre du photovoltaïque reste à définir
Les sénateurs ont en revanche rejeté un amendement de l'opposition visant à la création de zones de développement du photovoltaïque au sol, afin de préserver les terres agricoles, forêts et sites remarquables. La secrétaire d'Etat chargée de l'écologie, Chantal Jouanno, a précisé qu'un projet de décret prévoit la délivrance d'un permis de construire pour toute centrale supérieure à 250 kW, une déclaration préalable suffisant pour la plupart des autres. Seules échapperont à toute procédure les installations inférieures à 3 kW (leur surface n'excède pas 30 m2). Le tarif de rachat intermédiaire, fixé à 0,45 euro, devrait inciter les agriculteurs à utiliser le toit plutôt que le sol, a-t-elle ajouté. Enfin, un schéma régional de développement des énergies renouvelables identifiera les zones à utiliser. Toutefois, il serait judicieux "de réunir très rapidement un groupe de travail entre l'Assemblée et le Sénat afin qu'avant le vote de cette loi, une position commune soit trouvée", a-t-elle déclaré.
Un amendement du sénateur socialiste Thierry Repentin à l'article 33 prévoit que toute personne morale peut, quelle que soit la mission pour laquelle elle a été constituée, exploiter une installation photovoltaïque fixée ou intégrée aux bâtiments dont elle est propriétaire. L'exploitant pourra bénéficier de l'obligation d'achat de l'électricité ainsi produite, sous réserve, pour l'Etat et ses établissements publics, de l'accord du ministre de l'Energie. Sont ici visés en particulier les organismes HLM. Les sénateurs ont en revanche rejeté un amendement tendant à exonérer les bailleurs sociaux de l'impôt sur les sociétés lorsqu'ils installent des panneaux solaires sur les logements sociaux.
Ils ont également rejeté un amendement prévoyant la création d'un comité régional de concertation associant les collectivités territoriales et l'ensemble des acteurs intéressés sur les questions énergétiques.
Pas de contribution des collectivités aux coûts de renforcement des réseaux électriques
Un amendement à l'article 25 complète l'article 4 de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, afin de préciser que les coûts de raccordement susceptibles d'être couverts par des contributions versées au maître d'ouvrage de ces raccordements, excluent les coûts de renforcement des réseaux éventuels déjà couverts par le tarif d'utilisation des réseaux électriques (Turpe). La commission des affaires économiques avait déjà adopté un amendement de suppression du III de l'article 25, afin de ne pas mettre à la charge des consommateurs qui sollicitent le raccordement de leurs installations, ou aux collectivités en charge de l'urbanisme appelées à verser une contribution financière au maître d'ouvrage de ces raccordements, une partie des coûts de renforcement du réseau existant rendu nécessaire.
Un autre amendement prévoit d'associer les autorités organisatrices de la distribution d'électricité, propriétaires des réseaux, à l'élaboration du schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables. Ce schéma sera soumis au préfet de région dans un délai de six mois à compter de l'établissement du schéma régional du climat, de l'air et de l'énergie. Le second schéma doit en effet fixer des objectifs quantitatifs de développement des énergies renouvelables, et le premier définir les moyens de les réaliser.
Les sénateurs ont rejeté la proposition imposant à ERDF de rendre compte aux autorités concédantes d'un plan triennal d'investissement comportant une estimation prévisionnelle des dépenses pour les travaux de maintenance, de renouvellement et de développement du réseau public de distribution d'électricité relevant de ses attributions.
Enfin, un amendement du rapporteur, Bruno Sido précise qu'un décret définira les conditions d'application spécifiques de l'article 25 en mer. Afin de tirer les conséquences du Grenelle de la mer, un second amendement complète cet article et précise le régime applicable au raccordement des installations éoliennes en mer et des autres énergies marines.
Les plans Climat-Energie territoriaux constitueront le volet climat des agendas 21
Un amendement à l'article 26 du rapporteur Bruno Sido prévoit une articulation entre les agendas 21 locaux et les plans Climat-Energie territoriaux (PCET). Ainsi lorsque les collectivités territoriales s'engageront dans l'élaboration d'un projet territorial de développement durable ou agenda 21 local, le PCET en constituera le volet climat. Les sénateurs ont en revanche rejeté un amendement proposant d'étendre les PCET aux communes et communautés de communes de 30.000 habitants (au lieu du seuil de 50.000).
Un amendement de Thierry Repentin ouvre la possibilité aux organismes HLM, s'ils en font la demande, de donner un avis sur le PCET, comme cela est prévu en matière de PLU.
Les concessionnaires des réseaux de distribution d'électricité et de gaz devront diffuser annuellement les données permettant d'élaborer et d'évaluer les schémas régionaux Climat-Air-Energie et les PCET ainsi qu'un détail de leur contribution à ces plans.
Par ailleurs, un article additionnel (art. 26 bis) modifie l'article L.2224-34 du Code général des collectivités territoriales et prévoit la faculté des collectivités territoriales, EPCI ou syndicats mixtes en tant qu'autorités concédantes de la distribution publique d'électricité et de gaz, de réaliser ou faire réaliser, par le gestionnaire du réseau public de distribution ou par le concessionnaire du service public de fourniture d'électricité, des actions tendant à maîtriser la demande d'énergies de réseau des consommateurs finaux ou de différer des travaux d'extension et de renforcement des réseaux publics de distribution d'électricité et de gaz. Enfin, l'article 26 ter nouveau autorise les EPCI et les syndicats mixtes compétents pour l'organisation de la distribution de l'énergie à élaborer un PCET, en concertation avec les communes qui ne sont pas elles-mêmes soumises à cette obligation.
Un comité de suivi des énergies renouvelables au sein du Conseil supérieur de l'énergie
Les sénateurs ont rejeté un amendement à l'article 27 visant à maintenir en l'état le champ des actions éligibles à la délivrance de certificats d'économies d'énergie pour les collectivités couvertes par un plan Climat. En revanche, ils ont adopté un amendement modifiant les dispositions envisagées, afin de conserver aux collectivités l'éligibilité de leur action menée, non seulement sur leur propre patrimoine, mais dans le cadre de leurs compétences.
Les sénateurs ont à nouveau repoussé l'accès des collectivités à l'éco-prêt à taux zéro, proposé par le groupe socialiste. Pour la secrétaire d'Etat à l'Ecologie, "les collectivités ne sont pas dans la même situation que les particuliers, elles ont accès à d'autres sources de financement, ceux qu'elles pourront mobiliser auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations sont presque à taux zéro".
Le Sénat a adopté un article 29 bis nouveau prévoyant la remise d'un rapport gouvernemental au Parlement, dans un délai d'un an à compter de la publication de la présente loi, sur l'évaluation des puits de carbone retenus par les massifs forestiers et leur possible valorisation financière pour les territoires. De même un nouvel art 30 A institue un comité de suivi des énergies renouvelables au sein du Conseil supérieur de l'énergie, afin d'évaluer la progression vers l'objectif de 23% d'énergies renouvelables dans la consommation d'énergie finale en 2020, concrétisant ainsi la proposition du comité opérationnel n°10 du Grenelle de l'environnement.
S'agissant des réseaux de chaleur, les sénateurs ont repoussé les amendements excluant l'incinération, le stockage et la récupération et exigeant que la compétitivité de l'offre et la vérification technico-économique des réseaux soient assurées pour l'extension, le classement ou la prolongation de la durée de concession des réseaux d'énergie. De même ont-ils rejeté l'amendement réservant au préfet, la décision de classement. A défaut d'avoir obtenu certaines garanties, le groupe socialiste s'est donc prononcé contre l'article 30.
Enfin, un amendement gouvernemental supprime la disposition de l'article 33 instituant la possibilité pour les EPCI à fiscalité additionnelle, percevant la taxe professionnelle (TP) de zone et la TP sur les éoliennes terrestres, d'instituer dans leurs statuts une dotation de solidarité au profit de leurs communes membres ou des EPCI à fiscalité propre limitrophes. Il s'agit notamment de tenir compte de la suppression de la taxe professionnelle.
Philie Marcangelo-Leos / Victoires-Editions