Urbanisme - Le Sénat a adopté une proposition de loi visant à améliorer les entrées de villes
Le Sénat a adopté en première lecture le 10 décembre une proposition de loi socialiste destinée à améliorer les "qualités urbaines, architecturales et paysagères des entrées de villes". La majorité a voté ce texte mais l'a profondément modifié par des amendements et le groupe PS s'est finalement abstenu. "Les 'entrées de villes' constituent depuis cinquante ans un véritable sinistre urbanistique. Partout, aux entrées de toutes les agglomérations urbaines, on retrouve les mêmes bâtiments, les mêmes enseignes, les mêmes cubes, les mêmes parallélépipèdes", lit-on dans l'exposé des motifs du texte initial, présenté par Jean-Pierre Sueur, sénateur socialiste du Loiret.
Alors que le projet de loi Grenelle 2 adopté en première lecture au Sénat prévoit d'interdire la publicité hors agglomération et de supprimer les préenseignes dérogatoires, le texte initial de Jean-Pierre Sueur a proposé que "tous les documents d'urbanisme assurent la qualité urbaine, architecturale et paysagère des entrées de ville" et que ces documents comportent d'ici le 1er janvier 2012 des "plans d'aménagement des entrées de villes". Ces plans devaient préciser "l'affectation des sols dans les entrées de villes, en réservant au moins un tiers des surfaces constructibles à des bâtiments à vocation culturelle, universitaire, sportive ou associative et au moins 20% du périmètre des entrées de villes aux espaces verts". Ils devaient aussi limiter "à 60% des surfaces commerciales incluses dans le périmètre des entrées de villes les aires de stationnement.
Pour en finir avec ce qu'il qualifie d'"architecture enseigne", Jean-Pierre Sueur a aussi proposé que les plans d'aménagement déterminent les règles concernant l'aspect extérieur des constructions, leurs dimensions et l'aménagement de leurs abords pour une "insertion harmonieuse (…) dans le milieu environnant". Le texte initial prévoyait aussi que les routes nationales traversant les entrées de villes deviennent des "voies urbaines" et que la construction ou la reconstruction de bâtiments dans leur périmètre soit soumise à des conditions de desserte par les transports en commun.
Dominique Braye, sénateur des Yvelines et rapporteur UMP du texte au nom de la commission de l'économie a convenu que la proposition de loi de Jean-Pierre Sueur avait le mérite de "soulever un vrai problème" auquel il était souhaitable "d'apporter au moins un début de réponse". Mais la commission a estimé que ce texte proposait "des solutions uniformes et réglementaires alors qu'il faut inciter les élus locaux à élaborer un projet global adapté aux spécificités de leur territoire". "L'enjeu constitué par les entrées de villes dépasse les clivages politiques : il est temps de réinvestir ce qui était laissé à l'abandon", a souligné de son côté le secrétaire d'Etat au Logement et à l'Urbanisme, Benoist Apparu. "Je partage votre philosophie mais pas les moyens", a-t-il lancé à l'adresse de Jean-Pierre Sueur.
Au final, le texte adopté par les sénateurs prévoit bien que "tous les documents d'urbanisme intègrent dans leurs objectifs la qualité urbaine, architecturale et paysagère des entrées de villes" mais a supprimé les autres propositions du texte initial, notamment l'obligation faite à toutes les communes dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'une carte communale de réaliser d'ici à 2012 un plan d'aménagement de leurs entrées de ville. A cette obligation, les sénateurs ont préféré substituer un dispositif "incitant les communes à réfléchir à l'aménagement de leurs entrées de villes en permettant une intervention du préfet lors de la procédure d'élaboration ou de révision du plan local d'urbanisme".
Ils ont aussi adopté un amendement d'Ambroise Dupont (UMP, Calvados), présenté au nom de la commission de la culture, visant à étendre les dispositions relatives aux entrées de villes figurant à l'article L 111-1-4 du Code de l'urbanisme à d'autres routes que celles concernées actuellement (autoroutes, routes express, déviations et autres routes classées à grande circulation) dans le cadre des schémas de cohérence territoriale (Scot). Pour l'auteur de l'amendement, les Scot constituent en effet "le niveau pertinent pour définir, le cas échéant, les routes qui devraient faire l'objet d'une réflexion relative à la constructibilité". Cette disposition entend à la fois "pallier les carences observées aujourd'hui, notamment pour des raisons liées au déclassement de certaines voies" et "renforcer la prise en compte du paysage et du cadre de vie dans les règles d'urbanisme".
Anne Lenormand